20 janvier 2025 1 20 /01 /janvier /2025 09:18

De Walter Salles (Brésil 2024)

 

avec Fernanda Torres  Fernanda Montenegro  Selton Mello 

 

 

Prix du meilleur scénario Mostra de Venise (septembre 2024) 

Golden Globe Awards de la meilleure actrice dans un film dramatique (janvier 2025)

Rio, 1971, sous la dictature militaire. La grande maison des Paiva, près de la plage, est un havre de vie, de paroles partagées, de jeux, de rencontres. Jusqu'au jour où des hommes du régime viennent arrêter Rubens, le père de famille, qui disparaît sans laisser de traces. Sa femme Eunice et ses cinq enfants mèneront alors un combat acharné pour la recherche de la vérité.

Je suis toujours là

Tu adorerais être ici avec nous aujourd'hui (disait en 2009 Dilma Rousseff lors d’un meeting s’adressant à Carlos Alberto Soares de Freitas, alias Beto « tombé dans la fleur de l’âge » )
je suis toujours là semble répondre Rubens Paiva ….dans le film que lui dédie Walter Salles


Dès le premier plan -alors que le visage d’Eunice émerge de l’eau, le ciel s’est légèrement zébré – une alerte ? une menace ? ce que confirmerait la scène où une des filles, toujours caméra au poing, est arrêtée (manu militari) avec ses amis pour un « contrôle »  (les visages du chauffeur et des passagers sont confrontés avec ceux figurant sur une liste de « suspects »…) Dans la première partie (1971 Rio Plage(Copacabana ? Ipanema ?) qui se veut solaire lumineuse (entente familiale, insouciance des plus jeunes enfants, musique, réceptions) la dictature militaire -mise en place par les USA dès le coup d’état de 1964 qui sévira jusqu’en 1985 - est prégnante (l’extrême droite fût-elle habillée en Prada comme dans certaines démocraties occidentales actuelles et d’autres en passe de le devenir… n’en reste pas moins extrême dans sa chasse aux « suspects » (de « gauche » et en 1971 en Amérique latine ce sont les communistes  …rappelons que dès 1968 un code de procédure pénale militaire autorise l'armée et la police à arrêter, puis à emprisonner, hors de tout contrôle judiciaire, tout « suspect  )


Walter Salles qui s’inspire de faits réels et qui a connu la famille Palva, adopte le point de vue de l’épouse et mère Eunice (magistralement interprétée par Fernanda Torres relayée pour la dernière partie par sa propre mère Fernanda Montenegro l’actrice principale de Central do Brasil 1998 du même cinéaste  ) 
Sa mise en scène classique, dont la linéarité est ponctuée par les repères Rio de Janeiro 1971,   Sao Paulo 1996,  2014), et qui fait fi du « spectaculaire » (nous sommes dans la tragédie et non dans le mélodrame) est scandée  par des « indices » comme autant de signaux -certains récurrents- qui mettent en exergue une hantise celle de la transmission, celle de la mémoire, une mémoire qui ne doit pas « refaire » l’histoire ( le récit historique n’est-il pas celui des "vainqueurs" ?) afin de "regarder le passé en face"  (et non comme l’aurait souhaité le « bolsonarisme »)
Le titre lui-même est l'aveu d'une permanence (le "je" de l'énonciation renvoie tout aussi bien à la mère qu'à l'ex député enlevé de façon arbitraire et dont le corps ne fut jamais retrouvé, qu'à la "démocratie" !) .  Voici en outre des films de famille, des photos, (enjeux identitaires fortement ritualisés et pour le présent et pour le futur) des coupures de presse (à commenter critiquer)  voici les meubles et cartons, empreintes/témoins que l’on emporte avec soi vers un « ailleurs », voici le livre du fils Marcelo (qui a d’ailleurs servi de « déclic »)  Voici cette dent que le père avait faussement enterrée dans le sable (mais comment être sûr de la retrouver ? s’interrogeait la gamine ; Il suffit de compter le nombre de pas depuis la maison ….)

Oui le sable aussi mouvant soit-il ne doit pas être  synonyme d’effacement. Sodade sodade murmure Cesaria Evora…


Un film récompensé à Venise, accueilli très favorablement au Brésil? Certes l’interprétation qui a valu un prix à Fernanda Torres est formidable, certes les changements d’ambiance de lumière de grain, d’une partie à l’autre , sont déterminants dans leurs contrastes (cf lumière explosive en I - l’effervescence comme force de résistance ? ombres ténébreuses après l’arrestation de Rubens et les « dépositions » lors d’interrogatoires, le sourire exemplaire  censé illuminer la "survie"  après la perte) Et pourtant….ce film  "devoir de mémoire" (de remise en cause de la politique d’amnistie « synonyme d’amnésie ») n’a pas la force convaincante des films chiliens ou argentins sur les dictatures (Guzman P Larrain entre autres) 
Est-ce parce que ce docu-fiction (cf l’album de famille au générique de fin) se donne à voir essentiellement comme une  "chronique familiale" ? ou comme le portrait d’une mère courage qui imprime sa pulsation de bout en bout et impose une  version  "trop hiératique  de la souffrance et du sacrifice de soi"  ??? 

 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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17 janvier 2025 5 17 /01 /janvier /2025 06:47

D'Arnaud Desplechin (2024)

 

avec Milo Machado Graner ‘(Paul Dedalus enfant) Mathieu Amalric (Paul Dédalus adulte) Salif Cissé (Paul Dedalus)  Francoise Lebrun (la grand-mère)  Micha Lescot (Pascal Kané)  Olga Milshtein Pamela Demal (l’ouvreuse) 

 

Festival Cannes 2024 séances spéciales 

Qu’est-ce que c’est, aller au cinéma ? Pourquoi y allons-nous depuis plus de 100 ans ? Je voulais célébrer les salles de cinéma, leurs magies. Aussi, j’ai suivi le chemin du jeune Paul Dédalus, comme le roman d’apprentissage d’un spectateur. Nous avons mêlé souvenirs, fiction, enquêtes… Un torrent d’images qui nous emporte.

Spectateurs !

Un titre trompeur ? emploi du pluriel ? Certes le cinéaste convie d’autres « spectateurs » que lui en particulier ou ses doubles fictionnels incarnés par quatre acteurs. Ainsi la grand-mère (Françoise Lebrun) qui d’emblée « apprend » à faire le distinguo entre tv et cinéma, ou ces « anonymes » dont les visages se succèdent en vignettes répondant aux questions sur le rapport à la salle, à l’écran, aux émotions suscitées ou encore des « amis » Mais l’essentiel de ce film aux allures d’autofiction est bel et bien un hommage au cinéma et Arnaud Desplechin veut prouver qu’en 30 ans de carrière il a été est et restera avant tout un « spectateur » (d’où peut-être l’importance du point d’exclamation et la justification a posteriori du pluriel)

La fascination qu’ont exercée sur lui Truffaut (Paul Dédalus incarné par Salif Cissé explique tous les plans du générique et prologue des 400 coups ) Jacques Lanzmann (longue séquence tant le film Shoah a été perçu et vécu comme une Révélation) Ford (les Cheyennes) ou encore la discussion dans un bar avec la philosophe Sandra Laugier, le cours du professeur cinéaste et critique Pascal Kané, l’échange à New York avec Kent Jones, le prouveraient aisément  

 

Les douze chapitres (dont les titres apparaissent en lettres rouges) la voix off (quand le réalisateur n’apparaît pas dans le cadre vers la fin ) au ton souvent professoral voire pontifiant, semblent déployer avec un mélange (pas toujours convaincant) d’extraits de films (cf entre autres l'adolescent subjugué par  Liv Ullmann dans Cris et chuchotements dont  le  visage agrandi est sublimé en "paysage"  de commentaires,  d’interviews,  de reconstitutions, une longue réponse à la question fondamentale que posait André Bazin Qu’est-ce que le cinéma ?  Tout en sachant que cette interrogation est, restera ouverte… 

 

Spectateur vous serez peut-être agacé, intéressé ou subjugué par ce soliloque, par la façon dont le cliché sur la  magie  du cinéma est  ….revisité  (un mélange d’amplitude et d’inachevé, de fugace et d'éternel) 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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16 janvier 2025 4 16 /01 /janvier /2025 11:30

Documentaire réalisé par Pierre Creton et Vincent Barré (France 2024)

 

2024 • FIDMarseille - Festival International de Cinéma de Marseille • Marseille (France) • Prix du Centre National des Arts Plastiques (CNAP) - Première mondiale
2024 • IDFA - International Documentary Festival Amsterdam • Amsterdam (Pays-Bas) • Paradocs

À la recherche de plantes indigènes, nous suivons le botaniste Mark Brown, depuis Aizier jusqu'à Sainte-Marguerite-sur-Mer, chez lui. De la vallée de la Seine, suivant le littoral cauchois en sept promenades, nous filmons les plantes jusqu'à son projet botanique fou : reconstituer une forêt primaire à L'Aube des Fleurs.

Sept promenades avec Mark Brown

Une structure en deux « volets » comme les deux « faces » d’un herbier que l’on va feuilleter avec délicatesse 


La première -sorte de making of- nous invite à suivre pendant 7 jours -et pour 7 balades sur le littoral cauchois, en 7 lieux différents-, cette équipe avec laquelle P Creton nous a déjà familiarisé (cf Le prince  et Toto)  Mais surtout nous entendons la voix du maître paléobotaniste décrypter, décliner pour le profane, la vie et l’histoire des plantes «indigènes » (certaines datant de plusieurs millions d’années cf l’ophioglosse, fougère primitive datant d’avant les dinosaures) chacune sera immortalisée grâce à l’opérateur Antoine Pirotte (que nous voyons ajuster capter l’angle de vue mesurer la lumière, placer son cadre, comme pour stariser l’élément floral, végétal) alors que Pierre Creton - caméra numérique au poing- filme l’équipe isolant en gros plan la main de Mark Brown, le filmant de dos -solitaire mains croisées- ou intégré au groupe ; une petite famille happée par le paysage au point de se fondre en lui, un tapis de velours tel un écrin pour le repos de leurs corps allongés
Une promenade bucolique prolégomène à …Car dans la seconde partie voici que l’écran offre au regard ce qui a été filmé en I ; plantes fleurs tiges se succèdent en plans fixes  (selon le même schéma chapitré); la voix off de Mark Brown égrène noms savants noms vulgaires, espèce, historique alors que chaque fleur chaque plante gagne en couleurs sensualité éblouissement. 


Le commentaire savant certes jamais ne vire au pédantisme (et parfois il a les accents d'une mélopée)  la voix susurre elle dote chaque plante d’une « histoire » qui peut avoir  la saveur de l’érotisme (cette prairie tapissée de fleurs blanches n’est-elle pas idéale pour faire l’amour ? se rappelle Mark Brown). Pédoncules pistils corolles tiges (que caressent les doigts de l’expert) autant d’organes qui exultent de vie en l’exaltant. Une vie, école d’humilité, que l’homme hélas de par son activité même menace dangereusement ; le simple promeneur d’ailleurs peut l’écraser de ses pieds maladroits et son regard l’ignorer… Constat amer que renforce le son grave sensuel et mélancolique de la clarinette…
 

Sept promenades ou le temps retrouvé; sept  promenades ou la révélation d’un monde insoupçonné 
 

Un documentaire à ne pas rater !!

 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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15 janvier 2025 3 15 /01 /janvier /2025 12:33

De Myriam Joobeur (Tunisie 2024)

 

avec Salha Nasraoui  (Aicha) Mohamed Graïaa  (Brahim)  Malek Mechergui  (Mehdi) Adam Bessa (Bilal) Dea Liane  (Reem)  Rayene Mechergui (Adam)

 

Berlinale 2024, Allemagne (Première Mondiale, Mention Spéciale – Génération). 
Festival de Taipei 2024, Taïwan (Grand Prix – New Talent). HKIFF 2024, Hong Kong (Meilleure Réalisatrice).

 

Dans un village reculé de Tunisie, Aicha et Brahim sont dévastés par le départ inexpliqué de leurs fils, partis pour une guerre indicible. Quand l’un d’eux revient avec une mystérieuse fiancée voilée et muette, les parents décident de taire ce retour. Mais Bilal, un policier et ami de longue date, enquête sur des événements inquiétants. Ses suspicions ne tardent pas à le mettre sur la piste de la famille.

La source

Je me suis inspirée des récits de femmes enrôlées en Syrie, mais aussi de témoignages des génocides cambodgiens et rwandais. Ce n’est pas un film sur Daech, mais avant tout sur l’horreur, la noirceur. Et ces extrémismes qui transforment les hommes en sadiques 

 

Comment rendre palpable  la douleur de ceux qui « restent », ces parents  hébétés quand deux de leurs fils sont partis   "pour combattre en Syrie"? La cinéaste   a choisi pour la narration - qui sera immersion dans les consciences-  les ellipses, la coexistence réel fantastique (on passe d’une réalité supposée à un cauchemar ou à un rêve provoqué par cette « réalité » soit le passage de l’image du « réel » à l’image "mentale" ) l’éclatement de la chronologie (voici un tableau qui s’inscrit dans le moment présent et juste après, sans raccord évident, voici un flashback ou le souvenir d’un épisode marquant). Si l’on ajoute une prédilection pour les très gros plans qui enserrent le visage par exemple, un rythme lent (propre à la contemplation ou à la méditation) une forme d’esthétisme où dans un même cadre l’arrière-plan est flou (ou flouté) le mutisme des personnages (l’essentiel est à capter dans une circulation de regards) on est en droit de s’interroger sur le bienfondé d’une telle stylisation - ne risque-t-elle pas de tenir  à distance le spectateur ?
 

Un choix esthétique qui rappelle aussi  le "conte". Le film est divisé en trois chapitres or les titres sont si intemporels ("les conséquences", "une ombre émerge", "le réveil") qu’ils en deviennent atemporels. L’élément végétal -cet arbre qui encadre le film mais dont la stature n’efface pas la fonction de  " gibet" (?) - et ce cheval caparaçonné sans cavalier, sont traités comme des personnages à part entière. La blessure qui s’ouvre béante et peine à se cicatriser balafrant la paume de cette main  travailleuse et vigilante, celle de la mère, avant de se fermer, comme pour enserrer un secret, serait le symbole de toute plaie vive (pour les parents celle liée au départ définitif de leurs fils) et pour les  "revenants"  (tel Mehdi) symbole d’un trauma mortifère…à cause de la cruauté de leurs actes (cf la scène de tabassage mortel avec Mehdi comme bourreau )


Une famille de bergers jusque-là  "sans histoire" mais les "apparences trompeuses" vont voler en éclats à cause de ce "drame"   (Mehdi accuse le père; le père accuse le laxisme de l'épouse; la mère est aux abois...propices à tous les mensonges et autres formes de dénégations) .

La source ? Un voyage dans le subconscient féminin et

une parabole sur la perte de repères et les cas de conscience ....

 

Colette Lallement-Duchoze

La source
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14 janvier 2025 2 14 /01 /janvier /2025 08:56

 d’Alexandros Avranas. (film allemand, estonien, finlandais, français, grec et suédois 2024)

 

avec Chulpan Khamatova, Grigoriy Dobrygin, Naomi Lamp, Miroslava Pashutina, Eleni Roussinou

Suède, 2018. Un syndrome mystérieux affecte les enfants réfugiés. Dans l'espoir d'une vie meilleure, Sergei, Natalia et leurs deux filles ont été contraints de fuir leur pays natal. Malgré tous leurs efforts pour s'intégrer et incarner la famille modèle, leur demande d'asile est rejetée. Soudainement, Katja, leur plus jeune fille, s'effondre et tombe dans le coma. Ils vont alors se battre, jusqu'à l'impensable, pour que leur fille puisse se réveiller.

Inspiré de faits réels.

Quiet life

Ce film d’une glaçante sobriété aura à n’en pas douter ses détracteurs. Car pour s’être inspiré de « faits réels » le cinéaste n’en choisit pas moins une forme déshumanisante déstabilisante, -proche de la SF ou de la dystopie-, où les personnages sont comme désincarnés  (apparemment sans affect)  ils évoluent dans des décors vides aseptisés,  des espaces impersonnels aux couleurs froides et ternes (blanc gris beige )  quand ce n’est pas le vert qui recouvre tel un linceul les corps des enfants alignés à l’hôpital ou le point rouge tel un signal , tout cela accentue l’effet clinique revendiqué. 
 

Or, ce parti pris formel n’est-il pas en étroite adéquation avec l’impitoyable ? Réfugiés adultes déclassés, enfants victimes du « syndrome de résignation » -maladie expliquée dans un carton -générique de fin-, parcours kafkaïen, administration pointilleuse vétilleuse et inhumaine. Mais un impitoyable qui n’exclut pas le burlesque (cf les séances « obligatoires » de thérapie où l’on apprend à « sourire » sous l’égide d’une coach au rire forcé…) ou l’humour noir (cf l'épisode en voiture dans un parking -tel un simulacre de  départ en "vacances"-, où les quatre membres de la famille arborent des  lunettes noires -alors que les paupières des filles sont … closes-)


Voici face à l’écran une puis deux gamines en socquettes au garde à vous ; le tableau se complète avec l’arrivée de la mère puis du père ; bloc soudé dans un silence minéral regard vide face à la caméra ,c’est le plan d’ouverture. Il  s’élargit avec la visite de deux représentants de l’Office de l’immigration ; pas qui claquent , couvercles que l’on soulève à la cuisine  pour s’assurer de la qualité de la nourriture, l'inspection est minutieuse … Bilan positif malgré des ricanements ou des allusions grimaçantes …Mais la demande d’asile sera refusée, pour insuffisance de preuves. Première conséquence : Katya (la seule d’ailleurs à pouvoir témoigner de l’agression subie par le père en Russie), tombe .....dans le coma, nécessité d’une prise en charge par le personnel hospitalier, sevrage affectif. Elle sera cette endormie traitée à coup de médocs. Puis ce sera le tour de la sœur aînée (elle a témoigné …à la place de Katya ; le jury n’est pas dupe…et l’on pense ici à Souleymane -qui apprenait par cœur une version des faits auxquels il était  étranger mais son "témoignage" devait  émouvoir et convaincre )….

A partir du moment où les parents "récupèrent"  leurs filles endormies  tels des bébés auxquels on va tout (ré)apprendre, le film bascule vers plus d’humanité laquelle triomphera dans la séquence à la piscine ! 

 

Un film à ne pas rater! 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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13 janvier 2025 1 13 /01 /janvier /2025 07:03

De Pedro Almodovar (Espagne USA 2024)

 

 

avec Tilda Swinton, Julianne Moore, John Turturro

 

 

Lion d'Or Mostra de Venise 2024

Argument: Deux amies de longue date , une romancière à succès et une reportrice de guerre, ont dû se séparer pour leurs carrières. Des années plus tard leurs routes se recroisent dans des circonstances troublantes 

La chambre d'à côté

Apparemment neutre dépassionné iridescent jaune vert ou rouge l'apprivoisement de la mort,  -un memento mori minutieusement préparé-, se dessine -acte ultime de vie ante mortem-, sur les lèvres pourpres et prend corps dans le jaune...

La mort lui va si bien!

 

Saturé de couleurs chaudes en grands aplats, dans un environnement somptueux (aussi flamboyant et glacé que celui de magazines de décoration), saturé aussi de références littéraires (dont Les gens de Dublin et la 15ème nouvelle les Morts) et cinématographiques (dont Persona de Bergman)  ce premier long métrage d'Almodovar en anglais (La voix humaine avec Tilda Swinton était un court métrage)  avec deux actrices hollywoodiennes (qu'on ne présente plus)  séduit par son esthétisme, un esthétisme  qui refuse le lugubre mais si lisse que.... 

 

Martha (ô les métamorphoses de Tilda Swinton !) ex reportrice de guerre pour the New York Times atteinte d'un cancer en phase terminale a décidé de mourir dans la dignité ; elle sollicite la présence d'Ingrid (étonnante et formidable Julian Moore) dans la "chambre d'à côté";  Ingrid écrivaine à succès -hantée par la mort comme le cinéaste d'ailleurs...-,  acceptera de partager ce cheminement vers...   Elle écoute en silence les confessions/confidences de Martha ; un silence qui n’a rien de sépulcral ; leur complicité culmine dans ce plan qui rapproche dans un arrondi à la Brancusi les deux  visages ; la  musique d'Alberto Iglesias s'est tue ou du moins on ne l'entend plus dans la sidération de l'instant soudainement magnifié 


Célébrant l'amitié féminine dans ce plaidoyer pour " le droit à mourir dans la dignité " le film s'encombre hélas de flash-back maladroits (sur la fille de Martha, et son père biologique)  tout comme il évoque ( sous forme de simples constats) la maladie  de notre planète   (climat et montée inexorable de l'extrême droite) John Turturro  n'est hélas pas du tout convaincant en porte parole de ces bilans  (d'ailleurs le  parallèle entre la fin de vie et la catastrophe climatique n’est-il pas un peu facile ?). 


Voici Martha et  Ingrid assises sur un canapé bleu vert, elles portent des vêtements bleu turquoise et rouge vermeil, deux tasses rouge et bleue sont posées sur une table basse orangée, au-dessus des deux visages filmés de profil voici accroché.es au mur un autoportrait en noir et blanc de Martha et une photo de femmes voilées tout de noir vêtues, les mains gantées de blanc, soudées en un seul corps  comme défiant la mort ?)  Oui ce plan était (par son cadrage et ses jeux d'opposition) bien plus suggestif ( sans  toutefois  l’étrange étrangeté des toiles de Hopper) 

 

La mort est devenue paysage dans cette villa luxueuse aux immenses baies vitrées où la forêt s'est tout naturellement invitée! 


Etre en vie .....  Ne  pas survivre ! 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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12 janvier 2025 7 12 /01 /janvier /2025 13:43

Documentaire réalisé par Yannick Kergoat (2024)

Une démocratie et une dictature. Une campagne présidentielle et de l’argent noir. Une guerre et des morts. « Personne n'y comprend rien », se rassure Nicolas Sarkozy au sujet de ses liens avec le colonel Kadhafi. Alors que s’ouvre le procès de l’affaire des financements libyens, voici le film qui va enfin vous permettre de tout comprendre à l’un des scandales les plus retentissants de la Ve République.

Personne n'y comprend rien

Le titre est emprunté …..malicieusement …à Sarkozy lui-même lors d’une interview donnée au Fig Mag  en 2023

 

 

Les lecteurs plus ou moins assidus de Mediapart n’apprendront pas grand-chose de ce film (subventionné grâce aux dons de particuliers, dont les noms apparaissent au générique de fin) .. Car ils auront lu la plupart des comptes-rendus et enquêtes du journaliste d’investigation Fabrice Arfi ou lu l’ouvrage coécrit avec Karl Laske dont  s’inspire Yannick Kergoat.   Nul étonnement face aux rebondissements, aux palinodies rocambolesques de Ziad Takieddine, aux gesticulations de l’ex président qui se dit offensé outragé  ( à travers lui c’est la France qu’on assassine… ) face aux accusations (souvent éhontées) de ses sbires …(des propos de Rachida Dati, actuelle ministre de la Culture, frisent le délit d’opinion…) Mais  en tant que "spectateurs" ils seront sensibles  au bienfondé des "images" sélectionnées, au dispositif choisi, à la  construction et à  l’impact d’un tel documentaire ! 

 


Un dispositif de base assez sobre : un appartement immense et vide. Au premier plan une ou deux chaises; on entend le crissement de pas sur le parquet, ceux de la personne qui viendra s’asseoir et "commenter" face à la caméra.  Appartement comme caisse de résonance?. Appartement, lieu tenu secret à l’instar des  "sources" qu’un journaliste ne doit jamais révéler ? Ou les deux ? En tout cas les murs joueront souvent le rôle d’écran sur lequel sont projetées, retranscrites, des bribes de conversation téléphonique, des images télévisées, des images d’archives; la personne assise filmée en frontal, semble  -même en surimpression-, faire partie de ce faisceau d’informations…

 


Afin de  "démêler"  l’écheveau et ses multiples ramifications l’écran se rétrécit s’élargit se divise se fractionne en split screens et autres mosaïques ; les interviews des  "commentateurs",  surtout celles  des journalistes Fabrice Arfi et Karl Laske qui jouent le rôle de "conteurs", sont confrontées (mises en miroir, mises en écho) avec ce qui est dénoncé (par une voix off celle de Florence Loiret-Caille ); au spectateur de se faire sa propre opinion ; la mini séquence avec François Molins (procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris de 2011 à 2018, puis procureur général près la Cour de cassation de 2018 à 2023) fonctionne de façon exemplaire … il est question du  "pouvoir des juges"  que pourfend de sa hargne Sarkozy et que fustige sa bande. Idem pour l’intervention de Danièle Klein, sœur de l’une des victimes de l’attentat du DC 10 de la compagnie UTA, orchestré en 1989 par des proches de Kadhafi, elle rappelle comment cette affaire a des liens directs avec nos vies du fait de la tentative d’abandonner les poursuites contre le commanditaire de cette tragédie qui provoqua 170 morts…
 

La sphère médiatique est gangrenée par  les nouveaux chiens de garde ? http://www.cinexpressions.fr/article-les-nouveaux-chiens-de-garde-97011746.html  ; certains ont la prétention, ou l’art de  "refaire l’histoire"  (avec l’aide ou non de  l'IA) ? 
 

Alors oui saluons le courage de qui s’attaque à cette gangrène et ose révéler ce qui "sera peut-être"  "un des plus grands scandales de la Vème République "

 

 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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11 janvier 2025 6 11 /01 /janvier /2025 13:35

De Yasujirô Ozu (Japon 1932) Version restaurée 

 

avec  Hideo Sugawara (Ryoichi, le fils aîné), Tokkan Kozo (le cadet), Tatsuo Saito (Yoshii, le père), Mitsuko Yoshikawa (la mère), Takeshi Sakamoto (le patron), Seiji Nishimura (le maître d'école). 

La famille Yoshi s’installe dans la banlieue de Tokyo où le père a trouvé un emploi. Ryoichi et Keiji ses deux fils se lient avec Taro, le fils du patron de leur père.

Gosses de Tokyo (muet)

Un camion de déménagement patine. Très gros plan sur une roue dans l’ornière boueuse. Deux gamins descendent, aident à pousser ; ils rentreront seuls car leur père va rendre visite à son patron Iwasaki …C’est la scène d’ouverture. En écho inversé au final le père, à la demande expresse de ses deux fils, s’en vient saluer son patron,  prend place à ses côtés dans la voiture alors que le fils Taro rejoint Keiji et Ryoichi Yoshi réconciliés et les trois "gosses" regardent la voiture s’éloigner ……Ce qui était  "suggéré" dans la scène liminaire aurait trouvé sa résolution ?? Et les enfants Yoshi, victimes de conflits de classe et de génération, peuvent-ils poursuivre leur cheminement ? Le cinéaste qui adopte leur point de vue et filme à leur hauteur, expose impulse et stimule ces questionnements  jusqu’à leur résolution (sous forme de "réconciliation")

 

Film muet de 1932, film populaire comme les shomin-geki, qui content la vie des petits gens, Gosses à Tokyo est composé de deux parties la séquence du "film dans le film"  jouant le rôle de transition. S’adapter à un nouveau milieu, affronter des « clans » déjà constitués, subir des invectives, être victime de malversations voire de brimades, tel est le lot des deux frères Yoshi ; ils désertent, le père les tance , et leur enjoint de « devenir des êtres importants » grâce à l’école Mais lors d’une soirée organisée par le patron (projection privée) ils prennent douloureusement conscience d’être les enfants d’un père "minable d’obséquiosité" aux « grimaces de marionnette, et décident de se « rebeller (on pense à Bonjour 1959)  « faire la grève de la faim ». (Puisque le « salaire » perçu par un employé sert à la « survie » de la famille)

Inversion des rôles. Le père bat sa coulpe. Il sait que la raison est de leur côté (l’école à quoi bon si l’avenir est déjà tracé ?)  ce qui n’interdira pas la fessée, marque d’autorité…

Dans le monde des "gosses" c’est la loi du plus « grand » Un monde avec ses rites (œuf de moineau à gober) ses codes (signe de pistolet qui met à terre la victime) ses gestes (chaussure posée sur la tête);  dans le monde des adultes c’est la dure loi des "castes sociales"… Déterminer les spécificités de chacun, faire éclater leurs  "ressemblances" (par un montage parallèle), afin de dépasser des forces  "enchaînantes" que matérialisent ces poteaux ces fils électriques ces barrières (passage à niveau, jardin) à la récurrence sur-lignée ? Peut-être
 

Peu de mouvements de caméra (le travelling latéral sur ces employés qui baillent au bureau ou celui sur les deux visages des frères qui rompant leur contrat portent à leurs lèvres une boulette de riz n’en seront que plus marquants…) ; la récurrence du passage de trains rappelle certes le contexte de la banlieue ; bien plus le passage à niveau franchi chaque jour marque la frontière entre le monde de l’intime (la famille) et celui plus vaste (et dévastateur) des conflits sociaux et autres; privilégier dans le cadre une présence collective (groupe des gamins, duo des frères, famille) sans exclure les plans rapprochés aptes à déceler une sensation,  s’intéresser aux détails moins pour les grossir que pour les auréoler d’une belle calligraphie… tout dans la forme est pure saveur (et prouve l’acuité du regard )… ajoutons l’interprétation des deux gamins (facétieux à souhait) l’humour omniprésent ;  dommage que la musique (qui accompagne la version restaurée) crispe parfois par ses aigus  
 

 

Un film à ne pas rater ! 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

 

(attention une séance par jour; Omnia dimanche 11h, lundi 20h30, mardi 13h30)
 

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8 janvier 2025 3 08 /01 /janvier /2025 04:29

De Ray Yeung (Chine Hong Kong 2024)

 

avec Patra, Au (Angie)  Maggie Li Lin-Lin (Pat) Po Tai (Shing) Chung Hang Leung (Victor) 

 

 

Récompensé du Teddy Award du meilleur film de fiction à la dernière Berlinale 2024 

Argument; Angie et Pat vivent le parfait amour à Hong Kong depuis plus de 30 ans. Jamais l’une sans l’autre; leur duo est un pilier pour leurs parents et leurs amis. Au brusque décès de Pat, la place de Angie dans la famille se retrouve fortement remise en question...

Tout ira bien

Le film est encadré par deux plans, classiques certes, mais ô combien signifiants. La caméra suit de dos un couple cheminant à pas lents dans une allée c’est le plan d’ouverture ; le même couple assis immobile souriant  vu de face, c’est le plan final. Ante et post mortem. Le vécu souverain et le souvenir jamais aboli de ce vécu !

Entre ces deux plans tout le cheminement qui ira de l’entente  du partage (les proches acceptent le couple lesbien de sexagénaires ; agapes pour la fête de la mi automne savamment préparées ) à l’exclusion (à la mort soudaine de Pat on fait comprendre à Angie qu’elle doit « quitter » l’appartement -le légataire officiel est Shing frère de Pat …car .en l’absence de testament olographe ou autre signé on applique la « loi »)

Il est vrai que cette application stricte n’est pas l’apanage de Hongkong (on fait fi des sentiments face aux diktats de la loi de …succession…) 


Mais ici -et c’est la dynamique interne, le réalisateur oriente son film selon  deux perspectives : l’homophobie (qui avant la mort de Pat ne disait pas son nom et les promesses réitérées de Victor le neveu semblaient sincères) et la « revanche sociale » (ascension sociale de Pat et parallèlement galères financières et professionnelles vécues par le frère et le neveu) Récupérer l’appartement est une « aubaine » !!  

Et l’on « détruira » toute trace, témoin du passé heureux vécu par les deux femmes (cf le dessin réalisé par un  petit-neveu que la mère  arrache avec fracas …)

Lacération et fissures; arrachage définitif et  reconquête d'un espace "normal" .par "exclusion" de l'autre "anormal"  ...Ô  puissance des détails ! 

 

Or  ces deux forces (mouvements)  ne sont-elles pas étroitement liées ? Et en cela le film serait éminemment politique (quand on sait que la communauté LGBT est fortement méprisée à Hong Kong,  quand on sait que le capitalisme y est ravageur, un tel film ne plaide-t-il pas en faveur de …. ? simple question ! 
 

Pudeur et délicatesse grâce aux ellipses pour "dire"  la douleur de l’absence (pour exemple : la mort de Pat reste hors champ, une question d’Angie sans réponse, un fondu au noir … le plan suivant nous montre l'urne que rapporte la famille de Pat…) Et le procédé du fondu au noir qui se double d’une ellipse -temporelle le plus souvent- empêchera à chaque fois de verser dans le larmoyant … 
 

La formule tout ira bien  rassurante,  entachée par la cruauté ( ?)  des « ayants-droit» ? Tout ira bien, une antiphrase ? Certes mais par-delà le mutisme des apparences, Angie n’a-t-elle pas transcendé fissures convoitises et autres malversations ? Avec élégance le cinéaste filme le désarroi qui se lit sur son visage éploré ou attendri quand elle surprend son beau-frère hoquetant de larmes...


Et c’est avec des "amies" (dont la notaire) qu’elle peut s’élancer vers un futur vers un ailleurs là où reposera à jamais au profond bien vivante celle qui a partagé tant de décennies…

Qu’importe dès lors un appartement devenu "prison"  enfermement des cupidités et autres convoitises mesquines,  à moins que...

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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7 janvier 2025 2 07 /01 /janvier /2025 04:27

De Margarida Cardoso (Portugal 2024)

 


avec Carloto Cotta (Dr. Afonso), Hoji Fortuna (Alphonse), Rúben Simões (Ismaël), Gonçalo Waddington (Raimundo), Sara Carinhas (Luisa), Romeu Runa (Augusto), João Pedro Bénard (Dr Figueira), Maria Do Céu Ribeiro (Adelia), Matamba Joaquim (Maianço), Cirila Bossuet (Guilhermina)

 

Sélection officielle au Festival international du film de Karlovy Vary, 2024

Prix Árvore da Vida du meilleur film portugais au Festival international du film indépendant, IndieLisboa, 2024
 

1907. Afonso, médecin, arrive sur l'île de Principe pour soigner les domestiques d'une plantation de cacao "infectés" par le Banzo, nostalgie des esclaves, qui meurent de faim et se suicident. Le groupe est confiné dans la forêt, où Afonso décide de les soigner en essayant de comprendre ce qui affecte leur âme. Réussira-t-il à les sauver ?

Banzo

Un homme au port altier fixe l’horizon ; son corps tout cartographié de tatouages et autres palimpsestes  soudainement s’écroule. C’est la scène inaugurale. Le bateau accoste. A  son bord le médecin Afonso, ami du trépassé, il est mandaté à la fois pour établir un rapport et (éventuellement)  guérir  (de)  cette « maladie » suspecte le banzo. Il vient du Congo belge …

Quel rôle soudainement soustrait à toute logique était dévolu au premier personnage ? On ne le saura pas…et ce ne sont pas les conversations autour de la table réservée aux VIP qui apporteront une quelconque réponse…Hormis peut-être cette phrase prononcée par la femme du gouverneur (ou propriétaire de la plantation de cacao) elle qui se réjouit de rentrer à Lisbonne Bientôt, cela fera une histoire. Et moi, je serai un personnage de cette histoire. C'est agréable, de devenir un personnage Oui les  personnages  c’est pour là-bas … dans des récits  ethno et  eurocentrés ; mais ici sur l’île Sao Tomé,  ce n’est que labeur sous la pluie diluvienne, sous le soleil cuisant, où l’on meurt de nostalgie!


Nous sommes en 1907. Et bien que l’esclavage soit officiellement aboli les conditions de travail, de vie (survie) imposées à ces Africains mozambicains sont tout simplement inhumaines. La réalisatrice dénonce ce colonialisme malsain (pour ne pas dire vénéneux) qui s’exerce sans vergogne dans un environnement qui enserre, oppresse; un univers qui peut tout autant griffer que caresser dans sa luxuriante diversité ; un univers fait de buées, de déluges, avec son immense forêt (un plan illustre l’engloutissement des travailleurs par et dans l’élément végétal,  effacement des  "invisibilisés" )

Nous ne voulons pas mourir : nous voulons rentrer chez nous telle sera la réponse au professeur (qu’on avait piégé en lui faisant croire que ces forçats étaient venus de leur plein gré) . 

Patiemment (trop lentement parfois et d’une lenteur qui se voudrait hypnotisante dans son esthétisme presque suranné alors que s’impose parallèlement une forme de naturalisme et/ou de réalisme...) la cinéaste analyse de l’intérieur  un système  "Cette dimension où les systèmes d’exploitation de la terre et des hommes détruisent et piègent clairement, physiquement et moralement, tous ceux qui y participent, volontairement ou involontairement." (ce sont ses propos)

Alphonse le photographe (un Noir) lui, peut revendiquer sa liberté  "je suis le seul homme libre"  (entendons vu le contexte il peut partir quand bon lui semble…)
 

On pourra peut-être déplorer une insistance complaisante (cf ce plan sur ces membres de corps morts mal enterrés, ces deux plans qui se succèdent avant de se confondre : un groupe s’affaire au premier plan alors qu’au second se profile la procession menant au tombeau, terre mère à la fois nourricière et mortifère ; une infirmerie surchargée de corps moribonds ; bureaucrates  blancs qui éructent des propos venimeux face au mutisme des opprimés) ou encore une fâcheuse tendance à la  "théâtralisation"  (cf  les déambulations calculées du professeur claudiquant….quand il arpente les différents espaces ; ou le récitatif du photographe)   N’empêche ...
 

La mort ? seule issue ?
Etres vivants ou morts, corps malmenés fouettés crucifiés, fantômes au hiératisme décomplexé, forces vives d’une nature sublime déchaînée ou muette, peut-on  "documenter la vérité sur cet endroit"  ? demande le médecin  au photographe. Le constat est amer  
A quoi bon ? le reste du monde n’y verra qu’un nègre de plus 

 

Mais le plan final .... serait-il porteur d'espoir ???

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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