16 mai 2025 5 16 /05 /mai /2025 05:19

De Karim Moussaoui (Algérie France 2024)

 

Avec Sammy Lechea, Zar Amir Ebrahimi, Idir Chender, Hamid Amirouche, Nassima Benichou 

 

Présenté en compétition au Festival d'Angoulême 2024

Réda vit chez ses parents dans un quartier bourgeois d'Alger. Il occupe un poste dans la plus grande entreprise d'hydrocarbures du pays dirigée par son père, un homme froid et autoritaire. Sous tous ces vernis apparents, Réda dissimule un mal-être profond. Un jour, le père meurt et un événement inattendu se produit : le reflet de Réda disparaît du miroir.

L'effacement

Comment concilier tradition et modernité ? (dans la société algérienne entre autres) telle était la thématique du très original En attendant les hirondelles .( https://www.cinexpressions.fr/2017/11/en-attendant-les-hirondelles.html  En mêlant plusieurs genres (réalisme cru et fantastique entre autres) en faisant éclater la chronologie (cf le prologue où le fils à l'écart, à l’ombre regarde sur écran une interview de son père en gros plan en pleine lumière et séquence finale en flash back) en refusant des indices traditionnellement attendus, et en évitant les pièges du manichéisme, le réalisateur poursuit ce questionnement dans L’Effacement  mais en insistant sur  "le désarroi de la jeunesse algérienne" à travers l'itinéraire de Reda

Ce personnage sera de tous les plans (le jeu de l’acteur Sammy Lechea est absolument convaincant) Nous allons assister à sa descente aux enfers, --alors qu’était "attendu" un "autre parcours initiatique". Les tableaux se succèdent -Reda et sa relation au père Reda et son frère Faycal, Reda au bureau Reda et sa préparation militaire Reda au reflet  effacé -; Reda et son apparente impassibilité, Reda le taciturne, Reda le mutique. Un rythme assez lent et une métamorphose qui en fait  un être violent , un tueur…La mort du père, les sévices corporels (préparation militaire), se donnent à voir, à lire tels des  traumas …et l’esquisse d’une romance avec une restauratrice (excellente Zar Amir Ebrahimi, vue dans Les nuits de Maashad) apparaissait tel un contrepoint…Mais

Comment la violence s’est emparée de ce jeune algérois, fils d’une famille bourgeoise (le père est PDG de la Sonapeg) promis à un bel avenir  ; tel est bien l’enjeu d’un film qui dénonce entre autres les carcans familiaux,  mais à travers ce portrait (qu’accompagne un prélude de Chopin) le cinéaste fait celui d’une génération qui hélas ne trouve pas sa place dans son pays (le frère Faycal ne fuit-il pas tout autant un père autoritaire auquel il a su résister, que son pays qu’il abandonne définitivement ?) Se soumettre ou partir tel est le dilemme auquel serait confrontée la jeunesse

Les contrastes entre la plénitude ressentie dans la vastitude d’un désert ocre et rougeoyant (avec Malika) et l’absence à "soi-même" - comme à son "propre désir" d’ailleurs – et dont l’effacement, sens propre et figuré, est la métaphore-, la séquence finale, (alors que Reda vient de commettre l’irréparable) flash back sur le « mariage arrangé » - -où le hagard côtoie le festif, , tout cela crée une tension trouble illustrant d’ailleurs le rôle néfaste d’un pays qui aura sacrifié sa jeunesse….

 Mon film ne dit pas autre chose que ce désarroi d’une jeunesse algérienne qui ne trouve pas sa place et l’urgence d’accorder enfin à l’individu le droit de se construire par lui-même

A voir 

 

Colette Lallement-Duchoze

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12 mai 2025 1 12 /05 /mai /2025 13:11

De Kostis Charamoutanis  (Grèce Macédoine 2024)

 

avec Simeon Tsakiris , Elsa Lekakou , Konstantinos Georgopoulos , Afroditi Kapokaki et Elena Topalidou

 

Film d’ouverture de la section ACID  Festival de Cannes 2024

En plein été, Babis, père célibataire, embarque ses jumeaux, Konstantinos et Elsa, sur l'île de Poros pour des vacances en mer. Entre baignades, rires et nouvelles rencontres, une révélation bouleverse leur insouciance : sans le savoir, ils croisent leur mère biologique, disparue depuis leur enfance. Un été où les illusions s'effritent, où le passé refait surface, et où grandir devient inévitable.

Kyuka -avant la fin de l'été

Un récit désynchronisé, qui fait la part belle à certaines audaces formelles (dont une séquence filmée à l’envers) et dont le montage avec ses ruptures de ton (entremêlement d’images vidéo, raccords inattendus) peut rappeler la « géographie » des îles de l’archipel ( ?)  

Le film débute comme un film de « vacances familial » : soleil mer entente entre le père et ses deux enfants (jumeaux) et rappellerait à s’y méprendre ce monde « merveilleux » fait de clichés, ceux  des cartes postales  (une mer d’huile, un bleu azuréen, des corps inondés de lumière et de soleil, une forme de farniente, de « lâcher prise » ) mais …

Les « rencontres »(une femme solitaire attendant un bus, une gamine, sa sœur aînée)  sont-elles le fruit du hasard ? l’art du cinéaste est de donner l’illusion (apparemment seuls le père et le spectateur sont «avertis » la réalité va éclater (pour les deux adolescents) en douloureuse épiphanie et provoquera une rupture (définitive) avec le monde de l’enfance

Certes le film n’échappe pas à certains excès métaphoriques (cf la séquence où le père et le nouveau compagnon de la « mère » miment un duel  entre le pêcheur et sa proie, celle-ci étant la « femme à ferrer » le ton monte puis les visages grimaçants semblent aussi violents d'érubescence  qu’au moment de l’orgasme…mais ....dans un silence assourdissant ; cf aussi les gros plans sur ces poissons qui font la gueule comme le père…Un père prétendu excellent pêcheur et qui est contraint de cuisiner des pâtes…Ou encore la répétition du geste de rejet  -la fille éjecte son père par-dessus bord (le comique de répétition s’est mué en « drame »); ajoutons la musique de Tchaïkovski … dont les strates sonores parfois égarent

Or dès l’exergue   le public était averti La mer est le premier jour de l’été, la lune en est le dernier. et le format de l’image (4,3) avait d’emblée enfermé les personnages comme dans une coque

Oui pour un temps relativement bref le solaire aura maquillé la mélancolie, mais la beauté s’est diluée dans les frictions et rivalités intestines, dans les « pseudo révélations » Apollon et Dionysos, comme au temps de la tragédie antique, la lumière s’estompe l’enfance sera à jamais derrière soi… le père divin menteur ….relégué dans la confrontation avec sa propre  conscience !

A voir

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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12 mai 2025 1 12 /05 /mai /2025 05:30

Film documentaire réalisé par Hind Meddeh ( France Tunisie Qatar 2024)

 

 

Présenté en avant-première lors de la 81ᵉ Mostra de Venise en 2024

 sélectionné au FIPADOC 2025,

En avril 2019, après trois décennies de dictature sous le régime d'Omar el-Béchir, le Soudan connaît un bouleversement politique majeur. La réalisatrice Hind Meddeb se rend alors à Khartoum pour capturer l'effervescence et l'espoir qui animent les rues de la capitale. À travers les trajectoires de jeunes militants tels que Shajane Suliman, Maha Elfaki, Ahmed Muzamil et Khatab Ahmed, le film dépeint avec sensibilité les aspirations et les défis de cette génération en quête de changement....jusqu'à ce que la guerre détruise tout, mettant les Soudanais sur les routes de l'exil

Soudan, souviens-toi

En France on parle peu de la guerre au Soudan

A la mémoire oublieuse la réalisatrice va rappeler l’immense soulèvement de 2019, (qui a duré plus de 50 jours et a mis fin à une oppression de 30 ans) rappeler sa sanglante répression par les FSR (forces de soutien rapide) mais surtout saluer la vaillance d’une jeunesse militante et insurgée. Elle a choisi une forme qui rappelle  l'épistolaire, en s’adressant (voix off) à deux jeunes femmes soudanaises avec lesquelles elle a cheminé durant quatre ans, Shajane et Maha et dans l’interpénétration des voix, de ces réponses à l’imparfait se dessine en creux cet immense espoir (malgré tous les malgré). Surtout ne pas s’attendre à un documentaire sur la guerre avec images d’archives commentaires attendus interviews en bonne et due forme. Le générique de fin égrènera les terribles chiffres (nombre de morts d’exilés de déportés de victimes de la famine)

Nous allons assister à une triple révolution (qui d’ailleurs structure ce long métrage) :féministe (rôle si éminent des jeunes filles et jeunes femmes insurgées, la fin de la dictature signifiant la fin d’une oppression dont elles furent les  premières victimes) poétique (poèmes/harangues face aux instruments génocidaires) et politique (quand les rêves -d’émancipation- individuels deviennent des revendications collectives…) Un élan de beauté face au mal absolu (dit la réalisatrice interviewée sur Arte 28 minutes https://www.arte.tv/fr/videos/126747-001-A/soudan-souviens-toi/

Lents travellings sur les fresques murales qui rendent hommage aux martyrs : en écho après la répression sanglante travellings sur les corps morts ou agonisants au sol ; une fenêtre comme ouverture sur la tragédie et l’Espoir alors que nous entendons la voix de la réalisatrice qui commente ou s’adresse à …

Révolution de 2019 coup d’état de 2021 guerre actuelle ; la réalisatrice a fait siennes des images prises par les manifestants sur leurs téléphones. Souvent dehors dans les rues avec les manifestants eux-mêmes,  parfois en surplomb elle nous montre des chars de guerre alors que nous entendons au loin des tirs. Nous serons à l’écoute de Muzamil, Khatab, Maha, Shajane et tant d'autres  témoins galvanisés par l’espoir de voir enfin un gouvernement démocratique de paix, d'égalité

 Et si l’art restait un bastion imprenable ?(le mot est un être vivant rappelle la cinéaste qui cite V Hugo)

Rester debout ?est-ce encore possible ?  Alors que l’espoir  terrassé,  se heurte aux forces militaires et a conduit nombre de Soudanais à l’exil (dont la « pétroleuse » Maha)

Soudan, souviens-toi, un film « musical » à la force explosive et poétique, à ne pas rater

 

Colette Lallement-Duchoze

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7 mai 2025 3 07 /05 /mai /2025 09:43

De David Cronenberg (Canada 2024)

 

avec Vincent Cassel (Karsh) Diane Kruger (Becca, Terry, Hunny) Guy Pearce (Maury) Sandrine Holt (Soo-Min  Szabo) Steve Switzman (Dr Jerry Zecker)

 

Présenté en Compétition festival de Cannes 2024
 

Karsh, 50 ans, est un homme d'affaires renommé. Inconsolable depuis le décès de son épouse, il invente un système révolutionnaire et controversé, GraveTech, qui permet aux vivants de se connecter à leurs chers disparus dans leurs linceuls. Une nuit, plusieurs tombes, dont celle de sa femme, sont vandalisées. Karsh se met alors en quête des coupables.

Les linceuls

Un film qui ne fait pas l’unanimité et pour cause…Trop bavard (même verbeux) pour certains, chef d’œuvre pour d’autres, il n’en reste pas moins stimulant dans ses excès ou ses faiblesses. 


Son point de départ ? Assurément la mort de la compagne Carolyn Zeifman en 2017, et l’impossible  deuil. A 82 ans David Cronenberg  aborde ainsi la thématique de l'absence- présente (ou présence absente,  éprouvée au profond), qu’il va confronter à d’autres angoisses sur le monde contemporain!  Et si ce film était aussi comme le prolongement du très court métrage the death of David Cronenberg 2021 (que vous pouvez visionner sur You tube https://www.youtube.com/watch?v=ZpvNuH420W8 )

Abondent les mises en abyme, les effets de miroir. A commencer par la  ressemblance  entre l’acteur et le réalisateur (Vincent Cassel double de Cronenberg) et pourquoi pas les linceuls comme les limbes du cinéma « cronenbergien» et du cinéma en général ??

Soit toujours la thématique du double (et même triple quand Diane Kruger interprète à la fois Becca l’épouse morte -et dont le cancer vorace avait mutilé le corps en souffrance- la sœur jumelle Terry et l’IA Hunny) 


La scène liminaire donne le ton. Karsh se réveille d’un affreux cauchemar alors qu’il est chez son dentiste ; lequel  lui dit tout de go « vos dents pourrissent par trop de souffrance » …Un zoom sur la bouche ouverte du  patient (= celui qui souffre) alors que sur écran apparait sa radiographie dentaire…Raccord cut. 
Corps vivant qui risque le délitement, corps mort dont on pourra "ausculter"  les étapes de la décomposition, de la putréfaction grâce à ces stèles/linceuls équipées de capteurs.

Voyeurisme morbide ? peut-être. En tout cas à la recherche des auteurs du vandalisme (profanation de tombes) c’est l’ensemble des préoccupations contemporaines qui vont émerger (IA ,théories complotistes, géopolitique libérale entre autres) qu’incarnent des personnages suspects:  de la productrice coréenne, Soo-Min  Szabo (Sandrine Holt) épouse d’un nabab hongrois agonisant, à la belle-sœur éleveuse de chiens, sosie de Becca, en passant par le frère informaticien névrosé, (Guy Pearce) l’écologiste islandais Elvar  (Ingvar E. Sigurðsson)  et l’oncologue Dr Jerry Zecker (Steve Switzman) que Karsh soupçonne avoir été l’amant de son épouse malade 
Or la frontière entre mort et vie  ne semble-t-elle pas « abolie » par ces écrans interposés?   L’atmosphère d’ensemble glaciale renforce cette impression 

Bienvenue dans un univers où science-fiction flirtant toujours avec psychanalyse se pare ici de l’intime ; un intime  irrésolu car non soluble (quel que soit le bain chimique/cinématographique adopté) Résonnerait le glas du never more ? 

Mais voici que se profile le corps de l’aimée - si désirable-, si désiré en ses mutilations mêmes, voici que les chairs se mêlent à nouveau pour l’acte suprême orgastique…

Un autre visage ?  et pourtant le même 

 


Un film à voir !

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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6 mai 2025 2 06 /05 /mai /2025 04:39

De Bogdan Mureşanu (Roumanie  2024)

 

avec Adrian Văncică (Gelu l'ouvrier et père de Marius)   Nicoleta Hâncu (Florina), Emilia Dobrin (Margarita la mère d'Ionut)  Mihai Calin Andrei Miercure

 

Prix  du meilleur film Orizzonti et prix Fipresci au Festival de Venise en 2024

 

Présenté en soirée de clôture au festival à l’Est Rouen samedi 15 mars 2025

20 décembre 1989. La Roumanie est au bord de la révolution. Les autorités préparent les festivités du Nouvel An comme si de rien n’était ou presque mais le vernis officiel commence à craquer. Dans l’effervescence de la contestation, six destins vont se croiser au fil d’une journée pas comme les autres. Jusqu’à la chute de Ceausescu et de son régime.

Ce nouvel an qui n'est jamais arrivé

Film choral au montage parallèle et alterné. Et ce sont précisément les sous-intrigues -dont les tonalités le traitement, le rythme sont délibérément différent.es- qui pimentent l’ensemble (l’essentiel étant la dénonciation de l’autoritarisme du régime dictatorial de Ceausescu et l’importance du collectif pour vaincre l’oppression).

Les 6 personnages  plus ou moins individualisés - mais "connectés" » entre eux par tel ou tel lien- vont participer (certains à leur insu) à un séisme collectif  dont rendra compte la séquence finale de plus de 20'  (où l’individu se fond dans le tout, une multitude qui envahit l’écran, écrase le régime, avec pour fond sonore le Boléro de Ravel) 


Voici Stefan Silvestru (Mihai Calin) directeur d’une équipe de télévision ; il recherche dans l'urgence une doublure pour une émission de propagande ; il engagera Florina (Nicoleta Hancu) actrice de théâtre; alors que son fils Laurentiu (Andrei Miercure) tente lui, de passer la frontière avec un ami. La Securitate efficace et multiforme, est incarnée par Ionut Dinca (Iulian Postelnicu) dont la mère Margareta (Emilia Dobrin) ne peut se résoudre à quitter son appartement qui doit être démoli… Gelu (Adrian Văncic) l’ouvrier affecté au déménagement, farouche adversaire du dictateur, est désespéré - son fils a envoyé au père Noël, une lettre où il a exprimé ses vœux: une locomotive pour lui, un sac pour sa mère et pour son  père  la  mort du vieux Nico .....

 

6 personnages en quête de …6 personnages au destin si loin, si proche. Et la télévision instrument de propagande par excellence comme fil rouge, dans cette "fable" loufoque  Dès lors quand apparaît chevrotant le dictateur (il est alors âgé de 71 ans) censé louer les vertus de son régime, tout va partir à vau-l’eau ; il aura suffi d’une étincelle…(et les ex partisans abandonnent fissa fissa leur fonction -torturer soutirer des aveux entre autres… ) Une libération orgastique? 


La caméra est aussi virevoltante que les intrusions du pouvoir dans l’intimité de chacun, les sautillements aussi déréglés que la paranoïa qui s’est emparée de tous et que renforce le format de l’image (cf l’intrusion de Florina chez ses voisins, ou ses automutilations, les délations, la lettre de délation qu’écrit le directeur de théâtre  sous la férule de son épouse, et en écho la lettre d’aveux  de leur fils dictée sous la torture)

 Au gré des rebondissements circulent des regards accusateurs ou tendres, coupables ou résignés et la violence -verbale ou physique, affichée ou suggérée- s'inscrit dans cette spirale 

 

Certes on sourit de bon cœur (comique de situation et décalage) mais on rit jaune aussi car hors champ il y a cette violence répressive qui fait mal (on murmure Timisoara ; Florina est sans nouvelle de son compagnon  qui  participait à la manif…les médias sont muets) … 


Un film à voir

 

Colette Lallement-Duchoze

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5 mai 2025 1 05 /05 /mai /2025 03:43

Du 14 mai au 14 juin 2025, 

la 24ème édition propose 21 films en compétition, 8 séances thématiques ainsi que des rencontres et expériences immersives

 

au cinéma Ariel Mont-Saint-Aignan

et à l'Omnia Rouen

 

https://courtivore.com/programmation-2025/

 

TROIS ACTES

AU CINEMA ARIEL 

les 16, 23 et 30 mai 2025 à 20h

 

Le Courtivore 24ème festival du court-métrage
Le Courtivore 24ème festival du court-métrage
Le Courtivore 24ème festival du court-métrage

LA FINALE 20H  OMNIA 

(re) découvrez les 6 films sélectionnés par le public pendant le festival  votez assistez à la remise de l'ensemble des prix en deuxième partie de soirée 

 

Un cocktail sera servi en sortie de séance pour clôturer cette 24ème édition,

 

PRIX du public,

PRIX du jury étudiant,

PRIX "en short" 

MENTION SPECIALE   collèges & lycées 

Le Courtivore 24ème festival du court-métrage

LE 14 MAI SOIREE LES COURTS DE RATTRAPAGE 

 

AU QUARTIER LIBRE 20H

 

Le Courtivore 24ème festival du court-métrage
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3 mai 2025 6 03 /05 /mai /2025 06:15

De Shokir Kholikov (Ouzbékistan 2023)

 

avec Abdurakhmon Yusufaliyev, Roza Piyazova , Rano Sharipova, Nasrullo Nurov

Un vieux couple ouzbek poursuit son mode de vie intemporel : tondre les moutons, traire les chèvres, s'occuper des pastèques et tisser des tapis. La vieille femme ne permet à personne de quitter leur maison sans un cadeau et prend soin avec douceur de son mari acariâtre. L’irritabilité́ chronique de celui-ci s’intensifie lorsque leurs deux fils adultes - l'un à proximité́, l'autre au loin - commencent à remplacer leurs appareils ménagers par d'autres, modernes et inconnus, qu'ils ont du mal à faire fonctionner. Leur dernier projet est de démolir et de reconstruire la maison familiale, sans tenir compte des objections de leurs parents.

Dimanches

Passent les jours, passent les semaines, passent les saisons (le dernier dimanche dans ce film segmenté en 8 chapitres qui sautent d’une semaine à l’autre en avançant d’une journée, se déroule en hiver) et se répètent les mêmes gestes ritualisés dans le même décor ; un univers de lenteur et de silence  que vient "perturber" l’intrusion de la technologie offerte par les fils (gazinière, écran plat, réfrigérateur silencieux, cartes de crédit,  smartphone) deux fils aux intentions à peine voilées : s’accaparer de la maison, la démolir et construire du neuf. Mais  ce film ne saurait se réduire à l’opposition (certes prégnante) entre tradition et modernité ; il est avant tout la chronique d’un crépuscule, chronique délicate et souvent émouvante (vers la fin l’épouse, dit avec le calme impérial de l’évidence solaire « quoi que nous ayons fait ensemble nous aurons bien vécu ») chronique que métaphorisent la boîte d’allumettes et la recherche réitérée du feu… 


Le jeune cinéaste multiplie les angles de vue et varie les plans tout en privilégiant le plan fixe,(la répétition ne sera pas redondance) tout comme il "joue" sur les effets de verticalité (le nouveau frigo monolithe) et d’horizontalité (l’estrade/couchage), tout en mettant en évidence l’irritabilité, le machisme de l’époux et l’apparente servilité de l’épouse (en fait une maîtresse femme malicieuse).

 

Et le film se donne à lire tel un syllabaire où l’objet « moderne » aussi performant soit-il dans sa technologie est perçu dans sa volonté de briser un rapport séculaire à l’espace, au temps -et que concrétisent ces gestes si précis dans leur déroulé :  traire, cuisiner, tondre la laine, la teindre, la tisser, gestes comme suspendus dans une quiétude surannée. La main et le pis que l’on presse, les doigts et les fils de laine à déplier à déployer, le bras qui refuse l’enlacement ou le quête avec désespoir quand le couple sera comme amputé…

Une pluie diluvienne un orage s’en viennent scander les dernières semaines…  (déchirure annonciatrice de l'inéluctable !)

 

Une caméra à hauteur des personnages ou au sol et l’on songera à Ozu, une embrasure de fenêtre bleu vert et l’on invoquera Kiarostami, la modernité et ses mécanismes incompréhensibles ou délétères et s’imposera l’humour à la Tati….

 

Mais il y a ce hors champ: violence d’un Etat qui impose sans préavis ses diktats, jusqu'à éradiquer ce havre de paix, l'époux s'en éloigne définitivement au moment même où il quitte l'écran.....  


Dimanches, Un film à ne pas rater ! 

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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2 mai 2025 5 02 /05 /mai /2025 07:12

De Tim Mielants (2024 film belge-américano-irlansdais) 

Avec Cillian Murphy, Clare Dunne, Emily Watson

Titre original Small Things Like These

 

Présenté à la Berlinale 2024

Irlande, 1985. Modeste entrepreneur dans la vente de charbon, Bill Furlong tâche de maintenir à flot son entreprise, et de subvenir aux besoins de sa famille. Un jour, lors d'une livraison au couvent de la ville, il fait une découverte qui le bouleverse. Ce secret longtemps dissimulé va le confronter à son passé et au silence complice d'une communauté vivant dans la peur.

Tu ne mentiras point

Un pick up jaune ( la couleur détonne avec l’ambiance charbonneuse ou bleutée de New Ross en cet hiver1985), un intérieur où tel un sas de décompression le lavabo est régulateur de propreté (Bill Furlong s’y frotte rituellement les mains  "noir anthracite "…comme pour évacuer d’autres noirceurs…??? alors que se reflétant dans la glace le visage va renouer avec des bribes de son enfance…), une famille nombreuse unie,  tel est le quotidien de Bill Furlong (admirablement interprété par Cillian Murphy). En livrant le couvent cet artisan  "charbonnier" a vu l’horreur, a entendu les hurlements de cette jeune fille contrainte ; ainsi au cœur même de sa cité,  sévit une institution religieuse tenue par une main de fer , la sœur Mary (épatante Emily Watson, qui a d’ailleurs obtenu le prix du meilleur second rôle à la Berlinale)  Il a vu,   n’a rien dit,  il est taraudé par le remords, alors que s’impose à sa mémoire l’image de sa propre mère…..

 


Un film  "étrange"  qui a les défauts de ses qualités.

En refusant le questionnement frontal (comme Peter Mullan dans Magdalene sisters ou même Stephen Frears dans  Philomena) le cinéaste belge a choisi la retenue, le non-dit - - il a préféré faire sinuer la caméra dans  une conscience, qui va rester comme à la marge dans le  "silence" -, silence partagé par l’ensemble de la communauté, silence "coupable"  -ce dont rend compte le titre français du film -  se référant aux Commandements  - (et si la toute fin est marquée par un geste de "rédemption"  elle laisse ouvert un autre questionnement…) 
 

Or, à la sobriété, au dépouillement (économie de gestes dans la mise en scène) répond le choix (qui hélas devient très vite procédé) du gros plan fixe (sur le visage de Bill,  sur ses mains entre autres) ; répond aussi une prédilection pour les vitres embuées ou parcellées d’éclats de neige et les cadrages vont précisément impulser l’émergence d’un passé (flash back à répétition parfois intempestifs voire inutiles, ressassement d’une même passivité à x décennies d’intervalle !!) 


En donnant un cachet d’authenticité (tournage sur les lieux mêmes du roman dont il s’est inspiré Ce genre de petites choses de  Claire Keegan 2020) (cf  plans sur les toits,  le clocher,  les ruelles), le film peine à se détacher  d’images  "clichés" --et donc le voyage au bout de soi qui doit correspondre avec une prise de conscience, est entaché dans sa dynamique (on est pris dans un cercle vicieux où le silence provoque la souffrance, où la souffrance cautionne le silence) à cela il conviendrait d’ajouter d’autres "dévergondages " (cf les discours plus ou moins fumeux de la révérende auxquels Bill oppose un mutisme forcené qui n’exclut pas une forme d’approbation…)

et la  lenteur calculée du rythme risque de provoquer l'ennui


Oui le spectateur même "absorbé" par  le visage magnétique de Cillian Murphy est guetté par le bâillement .....

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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26 avril 2025 6 26 /04 /avril /2025 05:58

documentaire de Julie Biro produit par TS Productions et France Télévisions

 

Avant-première mardi 29 avril 2025 à 18h30, cinéma Omnia République, Rouen (76)


Entrée gratuite sur réservation

" 19 ans, Violette Nozière a été condamnée à mort pour parricide. Abusée par son père, sa parole est restée inaudible. Elle a échappé à la guillotine puis est libérée en 1945. Elle s’est mariée, a eu cinq enfants, a reconstruit sa vie en Normandie et s’est battue pour obtenir sa réhabilitation.

Ce film est l’occasion pour eux de faire entendre la parole de Violette.

Le silence de Violette

 

 

Complément  d' info 

 

Violette Nozière ou les silences de l’inceste par  Anaïs Albert
https://journals.openedition.org/elh/2946

 

 

 

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25 avril 2025 5 25 /04 /avril /2025 09:20

De César Diaz  (Guatemala Belgique 2024)

 

avec Bérénice Béjo (Maria/ Julia) , Mattheo Labbe (Marco), Leonardo Ortizgris (Miguel) Julieta Egurrola (la grand-mère ) 

 

Musique Rémi Boubal, 

 

Présenté en première mondiale au Festival de Locarno

1986. Maria, militante révolutionnaire guatémaltèque, est depuis des années exilée à Mexico où elle poursuit son action politique. Alors que son fils de 10 ans vient vivre avec elle, elle devra faire un choix cornélien entre son rôle de mère ou celui d'activiste

Mexico 86

Un prologue très prometteur et par le contenu et par la forme. Guatemala 1976. César Diaz mêle images d’archives en noir et blanc (des militaires paradant de leur superbe et de leur  cruauté ) et images en couleurs de la fiction -répression arbitraire et violente : Maria serrant contre elle son bébé assiste hébétée à l’exécution de son compagnon, achevé d'une balle, à même le sol ; traquée elle se réfugie chez sa mère mais doit s’enfuir, seule…au Mexique .Le bébé sera élevé par la grand-mère. Une succession rapide de plans pour illustrer une  triple séparation (compagnon, enfant, pays). Rythme aussi fébrile  que les pas de la mère (Bérénice Béjo filmée de dos) qu’accompagne le leitmotiv musical (Rémi Boubal) alors que l’effroi se lit sur le visage quand celui-ci est filmé en gros plan. Séparation (s) et déchirement. Déflagration émotionnelle!

 

Peut-on concilier le rôle de mère et celui de militante ? Garder son fils auprès de soi, quitte à le mettre en danger de mort, ou l’envoyer à Cuba, loin de soi mais en sécurité ?  C’est l’enjeu de ce film que le réalisateur dédie à sa propre mère  (a mi madre s’affiche en bas de l’écran avant le générique de fin) ayant lui-même vécu, enfant, cette tragédie 

Nous sommes en 1986. C’est l’année de la coupe du monde au Mexique et la presse internationale s’est déplacée pour couvrir l’événement alors que le pays voisin est martyrisé par la dictature, on n'en parlera pas… Maria/Julia doit convaincre le directeur du journal pour lequel elle travaille comme correctrice, d’insérer dans ses pages un document dénonçant abjections, tortures de la dictature de la junte au Guatemala. 1986 Marco a rejoint sa mère (la grand-mère atteinte d’un cancer est rentrée au pays et ne peut plus assurer son éducation) 

Réaliser un thriller à connotation familiale, tel est le choix de César Diaz (cinéaste belge né en 1978 au Guatemala) Le hic est que l’ambivalence revendiquée est loin d’être convaincante et ne saurait entraîner l’adhésion du spectateur. D’une part si tous les "aspects" (attendus)  de la traque, de la (sur)vie en clandestinité, de l’engagement activiste (changement de vêtements de look de lieu d’habitation, rendez-vous insolites, échange de documents, chargement d’armes) sont bien présents, ils semblent plaqués, renvoient à des clichés (même la course poursuite en voiture) avec une insistance assez complaisante sur les « changements » de perruques (cf ce plan quasi inutile sur les effets de miroir) Un thriller assez convenu dans sa facture. 
D’autre part les séquences plus « intimes » (dont les face-à-face mère/enfant) censées jouer le rôle de  "contrepoint" aux dangers de la "traque"  de l’espionnage, échappent au principe de « vraisemblance » ou à celui « de réalité » quand bien même César Diaz a opté pour un apprivoisement réciproque mère et enfant. Bien plus elles s’inscrivent dans une volonté d'accentuer l’isolement et la fragilité de Maria. Marco, 10 ans, en vient progressivement à dénigrer sa mère, hanté par les récits de torture (ces ongles que l’on arrache aux enfants pour leur soutirer des infos, des aveux) et préfère intégrer une "ruche" à Cuba. La mère elle-même lors de la course poursuite recroquevillée à l’arrière du véhicule, a braqué son arme sur le front de son fils….En un dixième de seconde elle a résolu son choix « cornélien ». Mais c’est bien le dernier plan fixe prolongé sur son visage (Marco va quitter le Mexique avec Armando le supérieur dans la hiérarchie de l’organisation) qui érige l’engagement en valeur suprême - avec la perspective d’un "never more" ??? d’une séparation définitive ?

 

Néanmoins, se lit dans les « interstices » une critique : celle de tout système patriarcal : la femme peut être activiste risquer sa vie mais elle doit rester …soumise. Et Bérénice Béjo -qui est de tous les plans- filmée souvent de dos (nuque qui envahit l’écran) incarne cette solitude, ce mélange de force et de vulnérabilité (d’autant que Maria devait  "défendre" son fils à la fois face à la résistance et face à la dictature…)

On saluera aussi le travail de mémoire nécessaire (engagement des femmes opposées à la junte au Guatemala pendant la dictature et après…)

 

Colette Lallement-Duchoze

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