10 avril 2024 3 10 /04 /avril /2024 07:07

'De Rodrigo Moreno  (Argentine/Brésil/Luxembourg/ Chili) 2023 (durée 3h10)

 

avec Daniel Elias, Esteban Bigliardi, Margarita Malfino, German de Silva, Laura Paredes, Cecilia Rainero 

 

 

présenté au  festival de Cannes 2023 (section Un Certain Regard)

 

présenté à Rouen  lors du festival à L'Est  du 12 au 17 mars en Compétition d 'Est en Ouest

Román et Morán, deux modestes employés de banque de Buenos Aires, sont piégés par la routine. Morán met en oeuvre un projet fou : voler au coffre une somme équivalente à leurs vies de salaires. Désormais délinquants, leurs destins sont liés. Au gré de leur cavale et des rencontres, chacun à sa manière emprunte une voie nouvelle vers la liberté...

Los delincuentes

Un film étrange audacieux qui mêle habilement  -parfois en les pulvérisant- les codes de certains films de genre : le polar la romance. Un  film où l’onirisme côtoie le réalisme cru, où la poésie transcende l’immanence, où le burlesque et l'humour pactisent avec le sérieux et le grave.  Composé de deux parties il oppose ville (Buenos Aires) et nature quasi idyllique (région de Cordoba); le grouillement les architectures (cf les différents angles de vue pour cerner une forteresse, la banque où sont employés Román et Morán) à la musique du  silence,  à la précieuse rareté des fleurs, à  la majesté d’un cheval , à la somptuosité des étendues (vastes panoramiques) à la vie idyllique dans une nature comme « inviolée » (l’ascension de Morán et les vues en contre plongée n’en seront que plus exemplaires).

Oppositions mais aussi échos : ainsi la banque est présentée d’emblée comme un univers carcéral (gros plans sur les serrures et grillages, et bruitages inhumains) et c’est le même acteur qui interprète le « boss » (banque) et le « caïd » (prison) ; deux employés de banque (le « complice » d’abord réticent assumera le choix imposé) deux sœurs ; un vidéaste cinéaste qui arpente les étendues magiques (et ce très gros plan sur une fleur rouge improbable) double de Rodrigo Moreno?  (peut-être). On  pourrait multiplier les exemples et inscrire ce film dans la production argentine foisonnante (cf  Trenque Lauquen Trenque Lauquen Parties 1 & 2 - Le blog de cinexpressions ) signe d’un incroyable dynamisme  culturel (hélas compromis  par les choix mortifères du nouveau président  ???…)

Certes le découpage peut sembler artificiel (d’autant que le début de la partie II n’est que le prolongement d’une séquence de I) peut-être que le film a été conçu dans la durée ; certes les split-screen d’abord assez singuliers (les bras des deux protagonistes filmés en des décors et circonstances dissembalbles donnent l’impression de se « toucher » ) répétés, ils perdent leur originalité ; les anagrammes (Moran Roman Norma) , doublées par le jeu des initiales du réalisateur (R M)  et certaines interprétations confiées aux mêmes acteurs, mêlent un peu facilement le ludique et le  symbolique et on pourra toujours déplorer l’irréalisme d’une rédemption par la poésie (cf le caïd en prison)

Mais tout cela -broutilles pour esprits chagrins - s’inscrit en fait dans une approche qui fait la part belle aux lectures plurielles (d’où le choix du « double ») de même que la déclamation de la grande salina (Ricardo Zalarayá) irrigue le film de poésie, de même que la pochette du disque Pappos Blues, baladée au rythme du scénario apparemment (ou délibérément) tortueux joue le rôle de talisman ; et ce n’est pas pur hasard si le film se clôt sur  un  hymne à la liberté  

 A ne pas manquer

 

 

Coletet Lallement-Duchoze

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9 avril 2024 2 09 /04 /avril /2024 05:43

d'Ethan Coen (USA 2023)

 

avec  Margaret Qualley, Geraldine Viswanathan, Beanie Feldstein, Joey Slotnick, Matt Demon

Jamie, une jeune femme libre d’esprit essuyant une énième rupture amoureuse, et Marian, son amie pudique et réservée qui souffre de frustration généralisée, sont en quête d’une bouffée d’air frais. Elles se lancent dans un road trip en direction de Tallahassee, mais leur périple va vite se compliquer quand elles croisent la route d’une bande de truands.

Drive-Away Dolls

Une gamine perfore la balustrade et de son œil avide contemple sa voisine se baignant nue dans la piscine (filmée au ralenti la femme va se chausser de bottes rouges alors que le mari réclame à manger….) Flash back ou comment  Marian -Geraldine  Viswnathan-  revit extasiée ses premières attirances pour les femmes,,  avant de « lâcher prise »

Sa compagne Jamie très affranchie, multipliant les aventures (au grand dam de certaines…), incarne la liberté sans entrave. Un groupe de sportives lesbiennes  s’adonnent à des « parties » de fantaisies rythmées par les coups de sifflets; une flic Sukie ( Beanie Feldstein)  -dans une des premières scènes  d’ailleurs sa chair triturée léchée explose de plaisir dans sa flaccidité-  larguée par sa partenaire Jamie va concocter sa  vengeance; elle saura dans l’exercice de ses fonctions mettre KO les deux mâles malfrats, à la recherche de cette mallette contenant des godemichés compromettants …pour l’avenir politique d’un sénateur…républicain...

 

Bienvenue au pays de la femme libérée…lesbienne !

Bienvenue dans ce road trip qui se veut plaisant,  au rythme souvent endiablé, aux situations absurdes , aux dialogues pas toujours subtils et souvent vulgaires, aux jeux de miroir (cf les duos : le couple de malfrats et leurs   méthodes si opposées,  le couple Jamie/ Marian si dissemblable...)

 

Le hic, car il y a un hic -et le nom Ethan Coen est bien évidemment responsable, il est porteur d’un label et implique des attentes !

Les digressions psychédéliques semblent « plaquées » artificiellement, alors qu’elles étaient censées donner le « tempo » en tant que « transitions » entre les étapes de cette « course poursuite » ; le recours aux plans coupes est excessif et nuit à sa prétendue originalité, l’opposition démocrate/républicain (en cette période électorale….) esquissée légère et vulgaire ; mais bien pire l’ensemble souffre d’un manque d’ingéniosité, d’originalité !!

 

Colette Lallement-Duchoze

Drive-Away Dolls
Drive-Away Dolls

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7 avril 2024 7 07 /04 /avril /2024 10:26

Documentaire réalisé par Andrés Peyrot (Panama/France 2023) 

En 1975, Pierre-Dominique Gaisseau, explorateur français, se rend au Panama pour réaliser un film sur la communauté fermée des Kunas, où la femme est sacrée. Or, le projet fait faillite et les Kunas attendent toujours de découvrir leur film.

Dieu est une femme

Tout commence (film + histoires)  par ces images d’archives ; nous voyons Pierre Dominique Gaisseau recevoir en 1962 un Oscar pour son documentaire Le ciel et la boue ; nous apprenons aussi qu’en 1975, il fut l’hôte de la communauté Kuna (peuple d’Amérindiens vivant dans l’archipel de Kuna Yala, le long de la côte caribéenne du pays). Communauté matrilocale qu’il avait filmée (fasciné par son mode vie, ses pratiques cultuelles et son organisation sociale , si éloigné.e. s de sa « civilisation occidentale »)  et à laquelle il avait fait la promesse solennelle de faire connaître « dieu est une femme » Mais rien ne se passa comme prévu…

Andrés Payrot cinéaste suisse d’origine panaméenne se rend en 2010 à Ustupu ; le souvenir de cette promesse est toujours vivant (Dieu est une femme jamais visionné serait attendu comme un film miroir?) Dès lors va débuter une « quête » (retrouver ces bobines) qui se double d’une enquête. Film d’aventures ! Nous serons aux côtés du cinéaste et du poète Arysteides Turpana, âme de cette communauté ;  après sa mort en 2020 le récit serait désormais orphelin de son héraut ? Peut-être,  mais le cinéaste le veut avant tout « collectif » , et surtout débarrassé de ces oripeaux censés épater le  "touriste " (et flatter son regard "ethnocentrique")

Ainsi deux récits vont être menés de pair ou de front, le questionnement sur la fonction du documentaire dit « ethnographique » n’en sera que plus percutant. Après avoir assisté (comme en direct à la découverte des bobines puis à leur restauration, à leur transport presque dédaléen) nous serons convoqués au plus près de tous les habitants de l’île pour voir sur cet immense « écran » de fortune ce qu’étaient ces gamines (aujourd’hui adultes) ou leur père (aujourd’hui décédé) accomplir le rite de l’hyménée par une danse rituelle, la communauté dans son ensemble (rites de passage, "tonte" des cheveux certainement douloureuse)

Une « mise en abyme » donc pour un film hybride. Avec l’option de la simultanéité (comme dans des split screen) Juxtaposer dans le même cadre des extraits d’un passé restauré et le moment présent, voilà un exercice d’autant plus périlleux que le commentaire en off s’offusque de l’approche « occidentalisante » et que la proximité du présent d’hier avec celui d’aujourd’hui abuse parfois de surimpressions ou de fondus enchaînés 

Restera gravée la personnalité de cette femme qui tout en commentant l’image de ce qu’elle a été, est comme déifiée, mais sans être idéalisée tout simplement parce que son regard authentique bat en brèche toute tentative de « folklorisation » mal venue…

A voir !

 

Colette Lallement-Duchoze

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6 avril 2024 6 06 /04 /avril /2024 05:54

de Kanu Behl (Inde 2023)

 

avec Mohit AgarwalPriyanka BoseVibha ChhibberRahul RoyAanchal GoswamiRuhani SharmaSonal JhaDevas DixitRajesh AggarwalYashraj Rawal

 

Festival Cannes 2023 Quinzaine des Cinéastes 

Guru, la vingtaine, est fou amoureux d'une de ses collègues de bureau, Mala, avec qui il travaille dans un centre d'appels à Agra. Il habite toujours chez ses parents, au rez-de-chaussée de la maison avec sa mère, tandis que son père vit à l'étage avec sa maîtresse. Quand Guru annonce qu'il va se marier avec Mala, tout bascule. Les frustrations, les fêlures et les haines familiales éclatent au grand jour, symptômes d'une société indienne marquée par le poids des traditions et des multiples tabous

Agra, une famille indienne

Des coulées de gouache très colorées envahissent  l’écran ; un magma telle l’allégorie ou la métaphore d’un esprit dérangé ? Elles reviendront à intervalles réguliers comme pour avertir le spectateur « attention Guru en folie » « attention Guru en détresse »

Mais qui est Guru? Des yeux hagards, des  masturbations furieuses, des rapports sexuels torrides hallucinés fantasmés. Serait-il atteint de priapisme ? Est-il frustré sexuellement ?

"Elle est à moi, la terrasse ! » Tel l’écureuil encagé sur la terrasse miteuse, (le père vit à l’étage avec sa maîtresse, alors que le fils partage avec sa mère le ridicule rez-de-chaussée d'une une maison en ruines, sise dans une ruelle d’Agra) Guru est pris au piège. Celui de sa libido explosive qui lui joue des tours. Celui de frustrations auxquelles rien ne semble remédier ….Mais en se mariant, en épousant Maia (objet de tous ses fantasmes !!! ) il peut prétendre à un espace dédié à l’intime. (ne serait-ce qu’en transformant la terrasse en chambre)  C’est alors qu’entre en scène un autre partenaire incontournable, une société immobilière…

Enfer familial, enfer social, corruption puissance de l’argent tout cela sera traité avec un réalisme assez cru et/ou avec l’humour absurde de la comédie

Ainsi à partir d’un canevas qui lie étroitement spatialité et sexualité, hystérie et oppression sociale et sexuelle, le réalisateur a voulu "emmener le public dans un parcours difficile avec un héros qui, sans le bon vocabulaire et tout en faisant des choses odieuses inacceptables, est la seule personne qui se bat pour la vérité, qui lutte contre l'oppression sexuelle. Je voulais que ce parcours soit presque un message d’’avertissement pour montrer où finissent par mener les journées passées dans l‘obsession du phallus!"

Pari réussi ? certes du point de vue scénaristique la rencontre inattendue avec Priti une femme plus âgée, et le « mariage » de deux incomplétudes semblent « résoudre » la « douloureuse » équation inaugurale ; certes la satire du patriarcat et la dénonciation des interdits sont à la fois audacieuses (le sexe dans tous ses états) comiques et savoureuses

Mais que de longueurs ! que de répétitions !

Elles altèrent le simple plaisir de regarder, elles empêchent l’adhésion   -

-les invraisemblances quant à elles  ne sauraient choquer dans une allégorie !

 

 

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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4 avril 2024 4 04 /04 /avril /2024 08:09

Documentaire réalisé par Sébastien Lifshitz (2023)

 

Présenté à Angoulême festival film francophone  (2023)

 

Festival des Arcs 15ème édition 

« Bienvenue dans ma vie », cette phrase, Sylvie Hofmann la répète à longueur de journée ou presque. Sylvie est cadre infirmière depuis 40 ans à l’hôpital nord de Marseille. Sa vie, c’est courir. Entre les patients, sa mère, son mari et sa fille, elle consacre ses journées aux autres depuis toujours. Et si elle décidait de penser un peu à elle ? De partir à la retraite ? En a-t-elle le droit, mais surtout en a-t-elle vraiment envie ?

 

Madame Hofmann

Des plans de rues urbaines, désertées par l’homme

Puis nous voici au cœur d’une unité de soins de l’hôpital nord de Marseille où Sylvie Hofmann, peine à planifier son agenda (le personnel testé positif ne peut être remplacé, tout comme l’hôpital ne peut héberger de nouveaux patients)

Elle-même sent son « corps » la lâcher (surdité soudaine)

Elle-même après 40 ans de service va bientôt partir en retraite.

 

Et voici que les premières séquences (muettes ou marquées par une forme de désespoir) résonnent de façon singulière ; et si la mort apparente de la ville (due au confinement) était la préfiguration d’autres morts (inévitables ?) celles de ces patients, victimes de tumeurs cancéreuses malignes, celle du corps hospitalier -dont le documentaire met en exergue tous les symptômes, (à la surdité de Sylvie répondrait celle d’un hôpital qui devrait gérer l’incurie des pouvoirs politiques ??) celle de sa mère (dont le franc parler aux paradigmes judéo-chrétiens est truculent) mère sujette à des cancers à répétition, porteuse de ce gène mortifère…dont a hérité la fille

Sensation douloureuse d’abandon -et de solitude !

 

Et pourtant ! Le réalisateur a su saisir l’instant, son frémissement et toutes ses vibrations. Le visage de Sylvie (souvent filmé de très près au volant de sa voiture comme dans l’espace  de soins palliatifs dont elle est responsable avec son équipe, par exemple) illumine de sa blondeur de son éclat azuréen de son sourire.

Hymne à la vie ?

 

En alternant vie privée et vie professionnelle, blancheur de l’hôpital et luminosité de la plage, plans d’ensemble et plans rapprochés, scènes de liesse (avec un côté délicieusement potache pour fêter le départ à la retraite par exemple ) et face à face plus douloureux, Sébastien Lifshitz capte une personnalité, celle d’une louve, d’une maîtresse femme, donne l’éclat du diamant à son sourire à son regard, sans verser dans l’hagiographie ni la sensiblerie (quand bien même l’émotion est là à fleur de peau) et l’aveu d’une prochaine mutilation pour contrecarrer une prédisposition inscrite dans les gènes résonne comme le cri d’une parturiente

 

Oui l’hôpital public est en danger et ses mutations, ses abandons, Sylvie les recense en toute lucidité tout comme elle a la conscience aiguë de ce que désormais elle devra construire (avec ses proches, avec elle-même)

 

Vu de dos le corps de Sylvie s’éloigne progressivement de la plage et de la caméra ; il va se fondre dans le flux d’une eau lustrale. Hyménée avec la mer et le soleil ?

 

 

Ce documentaire dédié à Sylvie comme le recommandait Sébastien Lifshitz présent lors de l’avant-première mardi 2 avril, sortira en salles le 10

 

A ne pas rater

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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3 avril 2024 3 03 /04 /avril /2024 15:12

De Karim Ainouz  (USA /G-B 2023)

 

Avec Jude Law, Alicia Vikander, Sam Riley, Eddie marsan, Simon Russell Beale, Amr Waked, Erin Doherty  

 

 

Présenté en compétition officielle Cannes 2023

Catherine Parr est la sixième femme du roi Henri VIII, dont les précédentes épouses ont été soit répudiées, soit décapitées (une seule étant décédée suite à une maladie). Avec l’aide de ses dames de compagnie, elle tente de déjouer les pièges que lui tendent l'évêque la cour et le roi...

Le Jeu de la Reine (Firebrand)

L'Histoire nous dit peu de choses, elle raconte surtout les hommes et la guerre » (prologue)

Karim Ainouz va « raconter les femmes » et particulièrement Catherine Parr, en tant que Régente, épouse, « mère »,  érudite et cultivée,  en ces derniers moments de la royauté d’Henry VIII ; tout en adoptant le point de vue de la future Elisabeth 1ère (voix off relayant ses écrits)

A la barbarie de cet homme qui sadique prend plaisir à humilier intimider, Catherine feint de se « soumettre » La jambe malade exhibée avec complaisance (gros plans sur les purulences béantes) devient très vite la métaphore de l’énorme pénis. Car tout est énorme chez ce géant de la cruauté dont la stature peut envahir tout l’écran et ses grognements sont ceux d’un porc qu’on égorge (Jude Law est méconnaissable)

 

Catherine nommée Régente en l’absence de son mari guerroyant en France, saura déjouer l’attention de ses escortes en rendant visite à son amie protestante calviniste Anne Askew, tout comme elle sera la « mère » et « complice » des enfants issus d’autres mariages, (le prince Edouard les princesses Marie et Elisabeth)  tout comme elle s’ingéniera à influencer les conseillers du roi (c’était hélas ! sans compter sur leur vilénie leur trahison leur félonie leur soif de pouvoir).

Si l’Histoire a délibérément occulté cette figure féminine (à la différence d’Anne Boleyn par exemple) Karim Ainouz la réhabilite - avec la contemporanéité du mouvement MeToo,  pourra-t-on objecter

Toujours est-il qu’à travers elle, il célèbre le pouvoir de la femme, la force de la sororité. En les intégrant au sein d’un film d’époque (dont la reconstitution sera remarquée car très documentée, tant au niveau des costumes des ambiances que du mobilier) il cherche à en déjouer les « codes » (les rares échappées en extérieur renvoient au gothique et/ou romantique alors que le choix d’une musique rock pour le final tout comme celui d’une photo qui refuse « la froideur grandiose de la monarchie » tranchent avec ce que l’on attend d’un « film en costumes » ; quant aux scènes de danses, de chants,  elles ponctuent  l’intrigue ; loin d’être « plaquées » sur , loin d’être pures décorations elles participent au récit (rôle narratif) et à l’action (rôle dramatique)

 

On pourra toujours déplorer le côté crade (c’est un choix délibéré) les excès, une forme de complaisance (Catherine essayant vainement de stopper sa fausse couche ; le visage du prélat anglican ciselé telle une eau-forte ; le roi entonnant un air telle une popstar etc)

 

 

Un film surprenant que je vous recommande

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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2 avril 2024 2 02 /04 /avril /2024 08:52

"Repousser les frontières défier les stéréotypes et mettre en lumière la riche diversité de la vie queer à travers le monde 

Des comédies légères aux drames émotionnels, chaque film est une invitation à partager à comprendre et à célébrer nos différences 

L'objectif de ce festival est certes de mettre en avant la richesse et la diversité des œuvres cinématographiques qui abordent les thématiques LGBTQIA+ mais c'est aussi un espace de rencontres et de partages, où les membres de la communauté et leurs alliés peuvent se rassembler pour célébrer qui ils sont sans jugement ni préjugé

Bienvenue à Ciné Friendly où chaque image raconte une histoire, et chaque histoire façonne notre monde"

Stéphane Merlet  président de Pix'M et coordinateur de la 7ème édition de Ciné Friendly

 

Festival Ciné Friendly 7ème édition (du jeudi 11 au samedi 13 avril 2024)

Ciné Friendly se déroulera au cinéma Omnia République 28 rue de la République 76000

 

PROGRAMMATION

 

 

Jeudi 11 avril

  • 19h30 L'UNE ET L'AUTRE (VOST) de Shamim Sarif + avec discours d'ouverture
  • 21h50 NORWEGIAN DREAM (VOST) de Leiv Igor Devold

Vendredi 12 avril

  • 19h15 Avant Première AMAL - un esprit libre de Jawad Rhalib - Belgique/France + échange avec le réalisateur + Munaé (Nicolas COUTANT & Laura BERNARD)
  • 22h00 Avant Première LEON (VOST) de Andi Nachon & Papu Curotto - Argentine

Samedi 13 avril

  • 11h15 Avant Première ALMAMULA (VOST) de Juan Sebastian Torales - Argentine + échange avec le réalisateur

 

  • 13h50 Avant Première LES TORTUES de David Lambert - Belgique/Canada

 

  • 15h40 IN BED (VOST) int. - 12 ans de Nitzan Gilady - Israël + échange avec l'association Enipse sur le Chemsex et sous réserve la présence du réalisateur

 

  • 17h50 Avant Première THE SUMMER WITH CARMEN (VOST)  (int. - 12 ans) de Zacharias Mavroeidis - Grèce

 

  •  21h00 soirée de clôture L'ARCHE DE NOÉ de Bryan Marciano - France + annonce du Prix du public + débat animé par des bénévoles de la délégation territoriale du Grand Rouen de la Fondation Le Refuge. (Mickaël MARLE & Laurent CAILLAUD)

 

A partir de 22h  rdv au MILK BAR (1 bis rue du Père Adam 76000 Rouen) 

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1 avril 2024 1 01 /04 /avril /2024 09:11

de Thea  Sharrock (2023 G-B)

 

avec Olivia Colman, Jessie Buckley, Anjana Vasan

Littlehampton, 1920. Lorsque Edith Swan commence à recevoir des lettres anonymes truffées d'injures, Rose Gooding, sa voisine irlandaise à l’esprit libre et au langage fleuri, est rapidement accusée des crimes. Toute la petite ville, concernée par cette affaire, s’en mêle. L'officière de police Gladys Moss, rapidement suivie par les femmes de la ville, mène alors sa propre enquête : elles soupçonnent que quelque chose cloche et que Rose pourrait ne pas être la véritable coupable, victime des mœurs abusives de son époque

Scandaleusement vôtre

Comédie légère et grinçante, oui ; délurée, non ; car les salacités, les grossièretés, écrites par un « corbeau » si elles amusent au début -(d’autant plus qu’elles choquent tous ceux qui sont étriqués corsetés dans les principes de la bien-pensance et les préceptes de la religion)- perdent leur mordant irrévérencieux à force de répétitions. Dont acte.

 

L’intérêt de cette comédie ? Il est à chercher moins dans l’enquête et ses « faux » rebondissements que dans l’interprétation des deux actrices ; Olivia Colman en vieille fille bigote hypocrite et Jessie Buckley en Irlandaise libre gouailleuse. Edith et Rose. Deux voisines qui partagent -leurs maisons sont mitoyennes- bassine à linge et toilettes ; un mur très mince les sépare (absence d’insonorisation…) ; elles furent amies (cf le premier tiers du film et la « confession » d’Edith) mais un autre « mur » s’est dressé…

 

Nous sommes en 1920, perdurent les souvenirs traumatisants de la guerre.

C’est surtout le triomphe du machisme, d’un obscène patriarcat . Si  le père d'Edith règne en dictateur éhonté sur son foyer, l’officière de police futée Gladys Moss  (excellente Anjana Vasan) cherche à s'affranchir  du joug de ses collègues autoritaires imbus de leur pouvoir de…mâles…) et c’est bien grâce à un élan de sororité qu’adviendra la vérité…La coalition des  "suffragettes"  renvoie à un autre combat  (même s’il est traité avec désinvolture). .A cela s’ajoutent des relents de racisme, à l’encontre de l’Irlandaise qui élève seule sa fille, qui préfère les pubs à la grand-messe, qui affiche assume ses choix de vie  Racisme et  schisme ??

 

Lttlehampton?  Voici un décor central,  telle une scène de théâtre -avec entrées et sorties des « acteurs » (rares  escapades  vers le littoral);  les couleurs -jaune orangé, tons clairs- sont censées dispenser une certaine chaleur humaine alors que les intérieurs (maison d’Edith) par contraste sont plus froids mais en harmonie avec l’austérité des personnages qui les habitent

Plans conçus telles des vignettes de BD, caricatures, rythme souvent rapide, contrastes, minauderies et rictus en gros plans, comique de mots, de situation et de caractère, oui tout cela s’inscrit dans le genre de la comédie

 

 Mais il manque un  "je ne sais quoi"  -et simultanément il y a un trop plein (redondances redites étirements inutiles)-, autant d'entraves à  une franche  adhésion

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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31 mars 2024 7 31 /03 /mars /2024 06:24

De Sean Price Williams (USA 2023)

 

avec Talia Ryder (Lilian) Earl Cave (Caleb) Simon Rex (Lawrence) Ayo Edebiri (Molly)

 

 

Festival de Cannes 2023 Quinzaine des cinéastes 

Lillian, jeune lycéenne, fugue durant un voyage scolaire. Au fil de ses rencontres, elle découvre un monde insoupçonné. Les fractures des États-Unis, filmées comme un conte de fées ou une variation d’"Alice au pays des merveilles".

The Sweet East

Premier long métrage de Sean Price Williams, ce film nous immerge dans une Amérique assez particulière. Du Maryland au Vermont, en passant par New York  nous allons croiser  avec Lilian  la route de certains marginaux -des suprémacistes, des cinéastes indés genre bobos, des islamistes, (ou pour le formuler autrement des activistes, des conspirationnistes, des artistes, des  fanatiques) 

Chaque rencontre est précédée par une annonce à la calligraphie singulière comme une invitation à feuilleter, en les tournant, les pages d’un livre des « merveilles » (ou des horreurs).

Chaque rencontre est l’objet d’une séquence avec ses couleurs, ses ambiances (réaliste romantique gore hallucinée ) ses tenues vestimentaires, ses discours ou propos spécifiques (cf le duo de cinéastes) (et Simon Rex interprétant un "abstinent torturé" sous l'oeil goguenard de la lycéenne est assez comique...)

Lilian elle-même se "métamorphose" en s’adaptant (tout en gardant un regard " naïf" ?)  the sweet east , voyage initiatique ??

Un tunnel , passage d’un univers à un autre- ? le clin d’œil à Lewis Carroll est évident ; de même que les occurrences Edgar Poe ne sont pas gratuites, de même que certains décors sont censés illustrer des effets hallucinogènes  

 

 "OVNI à la croisée des genres" ?  et de fait le cinéaste a privilégié l’assemblage d’éléments discordants dissonants toujours disparates, tout en épinglant les "extrêmes"

Mais force est de reconnaître que dans ce road movie les clins d’œil sont plus évidents pour un public américain (la scène de braquage et le Pizzagate par exemple) et que le film souffre d’un systématisme facile et déplaisant (le déroulé frappe déjà par son classicisme et les raccords entre les séquences sont souvent factices)

 

Cela étant, The Sweet East  n’en est pas moins la  fresque assez "foutraque" d’une certaine Amérique et  l'actrice Talia Ryder,- qui est de tous les plans,-, interprète avec brio une  Alice  insoupçonnée !!!

 

A voir! 

 

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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29 mars 2024 5 29 /03 /mars /2024 10:34

de Gábor Reisz   (Hongrie 2023)

 

avec Gáspár Adonyi-Walsh : Abel Trem,  István Znamenák  György András Rusznák : Jakab Rebeka Hatházi  Erika Krisztina Urbanovits : Judit, épouse de György Lilla Kizlinger : Janka Eliza Sodró : Dorka, épouse de Jakab Dániel Király  : Balázska, collègue de György Gergely Kocsis : Marci, le proviseur Tamás Fodor : Elemér Hargitay, révolutionnaire en 1956

 

Festival de cinéma européen des Arcs 2023 : Meilleur acteur pour Gáspár Adonyi-Walsh Prix Cineuropa

Mostra de Venise 2023 – section « Orizzonti » : prix Orizzonti du meilleur film

À la fin de l'année scolaire à Budapest, Abel est recalé à son oral d'histoire. Il dissimule à ses parents les raisons de son échec et va déclencher alors, malgré lui, un scandale politico-médiatique.

L'affaire Abel Trem

Professeur injustement accusé : une thématique récurrente dans la production cinématographique (cf la salle des profs, Pas de vagues) ?. Avec l’affaire Abel Trem c’est un lycéen qui est le personnage principal ainsi que le pays dans son entièreté la Hongrie contemporaine, avec son clivage nationalisme/ progressisme, les antagonismes autour du patriotisme qu’illustre le port d’une cocarde (symbole de la révolution de 1848 contre les Habsbourg commémorée le 15 août), objet de dissension, d’accusation. Et par-delà le portrait d’un adolescent, c’est celui d’une société avec ses effluves délétères, les fléaux drastiques de son administration, le mécanisme bien rodé de fabrication de fake news, et sa jeunesse trimbalée malgré elle dans ce maelstrom -mais dont la dernière séquence exalte l’appétence de vivre - la tenue de bain ou la volonté de se débarrasser de tout ce qui a corseté ligoté ( ??)

Présenté telle une décade (annoncé par un encart, tel jour est consacré à tel protagoniste - exception faite du dimanche où « il ne se passe rien »-),  ponctué par la récurrence d'un thème musical, le film alterne les 3 points de vue (élève, professeur, père, auxquels s’ajoutera celui d’une journaliste) ou les confronte n’excluant pas quelques chemins de traverse (ou digressions) ; il s’abstient -ou du moins fait semblant -- de prendre parti (mettre à plat les faits, les lâchetés ou les ambitions de chacun).et c’est bien une mise à nu, tel un état  des lieux,  qui nous est  "donnée à voir" 

D’abord limité à l’école le thème (amour, examens, relations familiales) s’élargit en devenant  politique : tout comme la vignette initiale est devenue cadre, alors que le format choisi 4,3 enferme dans un système tous les effets collatéraux. Et le colportage, le bouche à oreille, qui relève du comique dans la réaction en chaîne (père, médecin, chauffeur, coiffeuse, voisine), se métamorphose en drame: un mensonge initial soudainement amplifié et c’est le « scandale politico-médiatique » dans la Hongrie de Viktor Orban

Improvisation, parfois, volonté de s’en tenir à la lumière naturelle, recours systématique au travelling latéral (en lieu et place du champ contre champ) caméra portée, tout cela fleure la dogma 95 . Ce que confirme le réalisateur « avec mon directeur de la photographie Kristóf Becsey, nous avons choisi une approche de type Dogma : de la lumière naturelle, pas de mouvements de caméra, des décors aussi réels que possible, une petite équipe. C’était une question de budget, mais aussi parce que j’aime vraiment ce style 

Malgré tous les malgré l’affaire Abel Trem est un film que je vous recommande 

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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