d’Alexandros Avranas. (film allemand, estonien, finlandais, français, grec et suédois 2024)
avec Chulpan Khamatova, Grigoriy Dobrygin, Naomi Lamp, Miroslava Pashutina, Eleni Roussinou
Suède, 2018. Un syndrome mystérieux affecte les enfants réfugiés. Dans l'espoir d'une vie meilleure, Sergei, Natalia et leurs deux filles ont été contraints de fuir leur pays natal. Malgré tous leurs efforts pour s'intégrer et incarner la famille modèle, leur demande d'asile est rejetée. Soudainement, Katja, leur plus jeune fille, s'effondre et tombe dans le coma. Ils vont alors se battre, jusqu'à l'impensable, pour que leur fille puisse se réveiller.
Inspiré de faits réels.
Ce film d’une glaçante sobriété aura à n’en pas douter ses détracteurs. Car pour s’être inspiré de « faits réels » le cinéaste n’en choisit pas moins une forme déshumanisante déstabilisante, -proche de la SF ou de la dystopie-, où les personnages sont comme désincarnés (apparemment sans affect) ils évoluent dans des décors vides aseptisés, des espaces impersonnels aux couleurs froides et ternes (blanc gris beige ) quand ce n’est pas le vert qui recouvre tel un linceul les corps des enfants alignés à l’hôpital ou le point rouge tel un signal , tout cela accentue l’effet clinique revendiqué.
Or, ce parti pris formel n’est-il pas en étroite adéquation avec l’impitoyable ? Réfugiés adultes déclassés, enfants victimes du « syndrome de résignation » -maladie expliquée dans un carton -générique de fin-, parcours kafkaïen, administration pointilleuse vétilleuse et inhumaine. Mais un impitoyable qui n’exclut pas le burlesque (cf les séances « obligatoires » de thérapie où l’on apprend à « sourire » sous l’égide d’une coach au rire forcé…) ou l’humour noir (cf l'épisode en voiture dans un parking -tel simulacre de départ en "vacances"-, où les quatre membres de la famille arborent des lunettes noires -alors que les paupières des filles sont … closes-
Voici face à l’écran une puis deux gamines en socquettes au garde à vous ; le tableau se complète avec l’arrivée de la mère puis du père ; bloc soudé dans un silence minéral regard vide face à la caméra ,c’est le plan d’ouverture il s’élargit avec la visite de deux représentants de l’Office de l’immigration ; pas qui claquent , couvercles que l’on soulève à la cuisine pour s’assurer de la qualité de la nourriture, l'inspection est minutieuse … Bilan positif malgré des ricanements ou des allusions grimaçantes …Mais la demande d’asile sera refusée, pour insuffisance de preuves. Première conséquence : Katia (la seule d’ailleurs à pouvoir témoigner de l’agression subie par le père en Russie), tombe .....dans le coma, nécessité d’une prise en charge par le personnel hospitalier, sevrage affectif. Elle sera cette endormie traitée à coup de médocs. Puis ce sera le tour de la sœur aînée (elle a témoigné …à la place de Katya ; le jury n’est pas dupe…et l’on pense ici à Souleymane -qui apprenait par cœur une version des faits qui lui sont étrangers mais « témoignage » susceptible d’émouvoir )…. A partir du moment où les parents « récupèrent » leurs filles « endormies » tels des bébés à qui l’on va tout (ré)apprendre, le film bascule vers plus d’humanité laquelle triomphera dans la séquence à la piscine !
Un film à ne pas rater
Colette Lallement-Duchoze