Documentaire réalisé par Karim AÏnouz (2021 Brésil/France/Argentine)
// Image : Juan Sarmiento G. // Son : Björn Wiese, Laure Arto // Montage : Ricardo Saraiva // Musique originale : Benedikt Schiefer
- 2021 Festival de Cannes Sélection officielle - Séances spéciales
- 2021 FIFAM festival international du film d'Amiens Grand prix catégorie long métrage documentaire & prix étudiant
Janvier 2019. Le cinéaste Karim Aïnouz décide d'entreprendre son tout premier voyage en Algérie. Accompagné de sa caméra et du souvenir de sa mère Iracema, il livre ici un récit détaillé du voyage vers la terre natale de son père ; de la traversée de la mer à son arrivée dans les montagnes de l'Atlas en Kabylie jusqu'à son retour, entremêlant présent, passé et futur.
La mer s’agite, un nouveau départ. Je voyage pour toi, je voyage pour finir ce que tu as commencé. Je pars aussi pour trouver enfin mon Ithaque, mes origines, un sens à mon existence. Pour trouver ce que tu n’as jamais pu avoir. La mer m’emporte, presque malgré moi.
Cartographie du souvenir, lettre d’amour à la mère Iracema Brésilienne qui aura élevé seule son fils, (récit intime à la première personne, en voix off, qui poursuit autant l’être aimé par-delà la mort que le spectateur et que l’auteur lui-même) interrogations sur l’identité (qu’illustre l’apparent oxymore du titre) mais aussi questionnement(s) sur deux cultures dont l’Histoire souvent chaotique a bafoué saccagé les règles de la démocratie
Oui Marin des montagnes (sorte de « retour aux sources ») est tout cela à la fois
Et d’un point de vue purement formel le cinéaste multiplie en les exploitant les spécificités du 7ème art : ralentis ou accélérés, enchâssement de récits ou légendes, insertion d’extraits de films ou de photos, vibrations colorées, incrustations, changements de perspective, profondeur de champ et arrêts sur images, surimpressions,
Déconstruction et reconstruction, deux forces animent ce « voyage » (le premier qu’il effectue en Algérie), un voyage essentiellement « poétique » : avoir préféré le bateau à l’avion c’est prendre le temps de construire les « ponts » entre les deux cultures, s’adresser à la mère défunte comme à l’aimée c’est entreprendre pour elle, avec elle, dans le sillage de son ombre tutélaire, un voyage qu’elle aurait dû( ?) ou pu ( ?) faire avec le fils
Rappelons que Brésilien par sa mère et Kabyle par son père Karim Aïnouz (dont nous avions tant apprécié La vie invisible d’Euridice Gusmao mais aussi plus récemment le (très) controversé Jeu de la reine) aura su mêler (souvent habilement) intimité et Histoire. Creuser les origines de deux cultures, n’est-ce pas creuser les siennes ?
Et loin de certains clichés -sur Alger la blanche par exemple- peut s’imposer le rouge de l’embrasement…
Ecoutons Karim Aïnouz
Pour Marin des Montagnes, j’ai voulu prendre les risques que la maturité et l’expérience m’autorisent - avant tout un risque artistique en me distançant de ce que je connais, en ouvrant le projet à l’inattendu, en laissant le hasard, qui est après tout mon droit de naissance, m’amener à découvrir des choses que je n’aurais pas pu savoir au début de mon voyage. Ce film nous invite à tendre la main, à croire en l’inattendu, à nous souvenir d’avoir l’espoir et la foi en nos compatriotes qui vivent sur la planète. Peu importe la distance ou la différence que nous pensons avoir, nous sommes tous, en fait, intimement liés.
A ne pas rater!
(attention horaires Omnia Rouen jeudi 18h10, vendredi 20h20, samedi 16h, dimanche 14h, lundi 18h10, et mardi 11h )
Colette Lallement-Duchoze