De Johanna Pyykkô (franco-norvégien 2024)
Avec Camilla Godo Krohn, Radoslav Vladimirov, Maya Amina Moustache Thuv
Festival Angers Premiers Plans 2024
Ebba, jeune femme solitaire de 18 ans, travaille dans le port d'Oslo. Un soir, elle découvre à terre un homme d'une grande beauté, blessé à la tête. Profitant de son amnésie, elle lui fait croire qu'ils sont amants et leur construit un univers bâti sur le mensonge. Mais progressivement, Ebba comprend que les pires tromperies ne viennent peut-être pas d'elle…
Ebba ou l’effacement ? C’est ce que révèlent les premiers plans (quand bien même se croyant regardée elle cache furtivement sa ….cleptomanie) .Ebba ou comment rêver une autre vie ? c’est ce à quoi est convié le spectateur quand la jeune fille tout sourire répond à des questions « virtuelles » de la terrasse de cette maison qu’elle doit garder en l’absence des propriétaires. Ebba la manipulatrice ? Quand (ah l’aubaine !) elle profite de l’amnésie de cet homme blessé rencontré par hasard pour lui inventer une histoire, qui sera aussi la sienne. Le spectateur est invité à pénétrer dans ce théâtre « d’ombres et de chimères » théâtre que renforce le huis clos de la maison.
Mensonge et fantasme, mensonge et paranoïa, mensonge et maladie mentale, mensonge et mythomanie, mensonge et monomanie la réalisatrice en décline toutes les formes, les met en situation tels des cas de figure, et la jeune actrice Camilla Godo Krohn (c’est son premier rôle) les incarne à la perfection (à tel point que par moments la frontière entre le réel et le fantasmé ou l’onirisme est aussi poreuse pour elle que pour le public; l’ambiguïté de la séquence finale le prouverait aisément (à quelques détails près….) et inciterait, à « revoir » a posteriori la totalité -sous un autre angle- depuis ses prémisses
Le mensonge comme seul moyen de survie ? Survivre à la honte de l’effacement, de l’invisibilité ? (et en ce cas uniquement le film aurait une connotation politique ce que révèle l’oxymore -ou presque- du titre)
La différence entre « rêver sa vie » et « vivre ses rêves » est parfois et délibérément ténue dans ce film présenté au festival d’Angers (Premiers plans janvier 2024) ; certes l’émergence du sous-sol (où Ebba est locataire) vers une appropriation des lieux est évidente (symbolique ascension?) : elle va de pair avec la main mise sur une psyché (celle d’un Bulgare qui ne serait pas exempt de tout soupçon, du moins si on se fie aux préjugés qui font florès sur la Bulgarie et ses habitants…ce dont Ebba semble persuadée !!), elle joue en outre le rôle de fil narratif, assure la « dramatisation »; en revanche il n’est pas sûr que le spectateur soit convaincu par tant de coups tordus déployés…
L’intérêt bien vite hélas ! se dissipe (et l’ennui guette !!)
Colette Lallement-Duchoze