14 avril 2024 7 14 /04 /avril /2024 07:02

De Jawad  Rhalib   (Belgique 2023)

 

avec Lubna Azabal, Fabrizio Rongione, Catherine Salée, Kenza Benbouchta Ethelle Gonzales-Lardued, Johan Heldenberg, Babetida Sadjo, Mehdy Khachachi

 

 

Prix du Public, CitéCiné, le Festival International du Film Politique de Carcassonne –

Prix du Public, Festival Palm Springs - Best of Fest 2024

Présenté en avant-première à Rouen, lors du  festival Ciné Friendly  vendredi 11 avril en présence du réalisateur 

 

 

Sortie en salles mercredi 17

Argument: Amal, enseignante dans un lycée à Bruxelles, encourage ses élèves à s’exprimer librement. Avec ses méthodes pédagogiques audacieuses et son enthousiasme, elle va bouleverser leur vie. Jusqu’à en choquer certains. Peu à peu Amal va se sentir harcelée, menacée

Amal,  un esprit libre

Non ce film n’est pas une diatribe contre la communauté musulmane. Le titre n’est-il pas suffisamment éloquent ? Amal ou le portrait d’’une enseignante (admirablement interprétée par la talentueuse Lubna Azabal) qui contre vents et marées revendique sa passion pour la liberté d’expression,  milite pour la sauvegarder (le choix du poète musulman Abu Nuwàs-libertin et bi- du VIII° siècle n’est pas anodin). Oui , l’école est et doit rester ce lieu privilégié où s’épanouit l’esprit critique (et non de critique) loin des idéologies sectaires (dont le radicalisme musulman) Allah n’a pas sa place dans une salle de classe ; affirme péremptoire l’enseignante. OR quid de la laïcité dans les écoles belges ? (nous l’apprendrons par le générique de fin…)

Courageux le réalisateur Jawal Rhalib a su mettre les « mots »  sur les « maux » loin des stéréotypes (attendus et clivants)

La scène d’ouverture est à couper le souffle ; en écho lui répondra la toute dernière, dure acérée tel un couperet. Entre les deux le « parcours » de deux victimes « sacrificatoires ». (on a tous en mémoire la tragédie de Samuel Paty) Voici en plan très rapproché une jeune fille vue de profil qui vient d’être tabassée (meurtrissures bleutées arcades sourcilières sanguinolente) la cloison des toilettes encaisse ses cris, les frappements de ses mains comme une caisse de résonance ; puis un gros plan sur son tatouage « memento mori » (« souviens-toi que tu vas mourir » mais la traduction littérale souviens-toi que tu es en train de mourir serait-elle prélude à… ?). De quoi Monia est-elle le « nom » ou le « non », pour être ainsi harcelée jusqu’au « châtiment» par les « siens » ? (Modernité tenues vestimentaires tatouages, et surtout ... homosexualité ?)

Amal -esprit libre car libéré du carcan de l’intolérance- va s’employer à « gérer » la sauvagerie de la discorde, (par une méthode qui rappelle la maïeutique), évacuer coûte que coûte les effluves délétères voire morbides qui polluent l’ambiance où l’imam (interprété par Fabrizio Rongione) exerce une influence néfaste, insidieuse en dehors de tout contrôle, où certains parents s’immiscent dans la vie scolaire en exigeant le respect de leur loi dans le choix des auteurs inscrits au programme, où l’administration prône avant tout la sécurité » (argument qui sert à maquiller la lâcheté) ambiance où la puissance virale des réseaux sociaux et la haine diffusée (et diffuse) peuvent décider du sort d’une « victime » (justice immanente et charia). Amal est …. seule, dans ce parcours de combattant dont le film restitue les étapes, telle une tragédie à l'antique ( avec son chœur et son coryphée, avec sa structure  de l’exposition au dénouement-), étapes souvent lisibles sur le visage de Lubna Azabal, qui d’un regard d’un battement de cil d’un sourire, de lèvres closes comme suturées exprime  bienveillance ironie, détermination  ou au contraire exaspération, affolement

La bande-son coupée au plus fort d’une empoignade en classe et voici qu’à la violence verbale se substitue celle des gestes ou des grimaces de visages déformés, comme autant de stigmates de la haine ; avant que ne retentisse l’injonction « silence » proférée avec fermeté par l’enseignante, un moment décontenancée par l’explosion. C’était comme l’acmé de la « tragédie »

Le film tourné essentiellement à l’intérieur de l’établissement -salle de classe salle de réunion- ou dans l’appartement d’Amal- ,plonge le spectateur in situ, in media res (un seul plan en large panoramique sur la ville). La caméra immersive l’invite ainsi à n’être pas seulement « regardeur »

Un film coup de poing à ne pas rater ! 

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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