13 juin 2025 5 13 /06 /juin /2025 13:43

De Hur Jin-Ho (Corée du sud 2024)

 

avec Sul Kyung-Gu (Jae-Wan) Jang Dong-Gun (Jae Kyu) Kim Hee-AE (Yeon Kyeonog) Soo-Hyun (Ji Soo)

Deux frères, un avocat matérialiste et un chirurgien idéaliste, se retrouvent régulièrement avec leurs épouses pour dîner dans un restaurant chic de Séoul. Lorsqu’une affaire criminelle qui les implique explose sur la scène médiatique, leur sens de la morale va être mis à l’épreuve.

A normal family

Une introduction fracassante : scène de rue, altercation entre deux chauffeurs, invectives d’une violence inouïe (encore que…sous d’autres cieux…) et passage à l’acte, l’un des conducteurs écrase volontairement l’autre qui le menaçait de briser le pare-brise : mort brutale, fille/ gamine gravement blessée-, mère désemparée.

Scène de déflagration qui va  encoder le film ?

Oui nous irons de rebondissements en rebondissements, dont la cruauté affecte propos et agissements, avec des retournements notoires dans les prises de position… (en écho à cette séquence liminaire répondra d’ailleurs la toute dernière scène).

Mais d’un point de vue purement narratif le prologue va mettre au premier plan le rôle éminent de deux frères (ennemis…), l’un avocat véreux, âpre au gain  défend le chauffard tueur (arguments fallacieux au cynisme implacable); l’autre chirurgien « idéaliste » met tout en œuvre pour  "sauver" la gamine…Entre les deux une mère sénile et ingrate. Eux-mêmes parents de jeunes désorientés (le fils du chirurgien est victime de harcèlement au lycée, la fille de l’avocat conspue sa belle-mère et considère son père comme un "tiroir-caisse") Une famille normale…. (la toute dernière image après le générique de fin,  image qu’auront ratée les spectateurs pressés de quitter la salle,  remet à l’endroit ce qui aurait dû être mais qui restera cliché pour les générations à venir, le film s’étant ingénié à craqueler puis faire voler en éclats un vernis de façade, sourires de gens liés par le sang…)  Famille(s)  je vous hais !

La mise en scène est léchée avec ses longs plans fixes, ses découpages tranchants, ses décors froids et glacés . Les dîners rituels (fil rouge du roman du Néerlandais Herman Koch dont s’inspire le cinéaste coréen) dans l’espace aseptisé d’un restaurant ultra chic de Séoul tournent vite au pugilat ; paroles comminatoires arguments spécieux; et quand les enfants sont impliqués dans le meurtre d’un SDF les parents affrontent leurs démons intérieurs ; entraînant le spectateur dans la valse des "bons et mauvais sentiments" . L’astuce du cinéaste est d’avoir d’abord insisté sur les faux airs de famille (hypocrisie dévastatrice de l’intérieur) avant d’impliquer les mêmes protagonistes face à des choix qui opposent morale justice et liens du sang

Las ! après le basculement - changements de prises de position-  le film patauge s’embourbe dans l’accumulation de  "clichés" (sur la rédemption la culpabilité le pardon la violence) et l’on en vient à proférer des "menaces de mort" (je te tuerai si… dit explicitement l’épouse à son mari, le  chirurgien, puis ce  même  chirurgien à son frère…)

Reste le portrait glaçant d’une jeunesse qui loin d’être déboussolée (comme le pense la génération des aînés) incarne décomplexée, une dérive morale Non ce ne sont pas les délinquants (stéréotypes attendus), mais à la fois les produits d’un environnement privilégié ultra sécurisé et  les acteurs d’une sauvagerie inexplicable…   Dans mon pays, les enfants et les adultes ne se parlent plus beaucoup, Mais c’est la faute des adultes. Ils ne voient pas les enfants comme des personnes à part entière ; les adultes, les parents, sont persuadés d’avoir toujours raison puisqu’ils ont l’expérience. Les enfants, eux, sont éduqués en grande partie par YouTube par eux-mêmes 

Oui derrière les clichés (dans les deux sens du terme) d'une  normal family se cachent  des monstres.

Constat philosophique qui s’enrichit d’une approche plus sociétale.

Constat politique qui hélas dépasse les frontières (hiérarchisation des individus ; pouvoir macabre de l’argent-roi)

En tout être sommeille un chauffard …barbare ! était-ce  la "leçon" du prologue ???

 

Colette Lallement-Duchoze

Partager cet article
Repost0

commentaires

Mode d'emploi

Ce blog est destiné à collecter nos ressentis de spectateurs, à partager nos impressions sur les films (surtout ceux classés Art et Essai).

Envoyez vos articles ou vos réactions à: artessai-rouen@orange.fr.

Retrouvez aussi Cinexpressions sur Facebook

 

 

Recherche