25 janvier 2024 4 25 /01 /janvier /2024 06:22

De Satyajit Ray (Inde 1956) Version restaurée 

 

 

avec ,  Karuna Bannerjee,  Samaran Ghosal , Kanu Bannerjee,  Santi Gupta,  Ramani Sengupta,  Ranibala Sudipta,  Roy Ajay Mitra, Charuprakash Ghosh

 

Venise, Lion d'Or du meilleur film, 1957

Argument:  Harihar Ray est venu s'installer avec sa femme, Sarbojaya, et Apu, son fils, à Bénarès, la ville sainte de l'hindouisme. Il gagne désormais sa vie en lisant des textes sacrés. Suite à son décès inattendu la mère décide alors de retourner vivre à la campagne. Devenu un élève brillant, Apu décroche une bourse et part étudier à Calcutta, laissant sa mère déchirée par le chagrin...

La trilogie d'Apu: L'invaincu

Deuxième volet de la trilogie d’Apu

A l’opposé du premier (marqué par l’unité de lieu, le nombre restreint de personnages et le sentiment d’intemporalité) L’invaincu suit le parcours d’Apu dans Bénarès la grouillante, puis à la campagne chez le grand-oncle et à Calcutta, soit de l’école de la rue à l’université, itinéraire marqué par le questionnement sur une société en mutation. Apu s’ouvre au monde avec un mélange d’émerveillement de douleur et de résignation, résignation dont rend compte  le tout dernier plan.  

  Et quand bien même la mère après le décès de son époux préfère revenir à la campagne,  le réalisateur  à aucun moment, ne fait le choix du manichéisme facile qui opposerait le traditionalisme de la campagne à la modernité des grandes métropoles ; ruralité et modernité sont les deux faces d’un tout. 

 

Grâce aux ellipses narratives (procédé qui avait prévalu aussi dans le premier volet) Satyajit Ray peut multiplier époques, rencontres et thématiques. (Exploitation au travail, prégnance de la religion, amitié, émancipation par le savoir, un savoir concrétisé par la remise de prix, des livres comme autant de portes ouvertes et  par un globe terrestre) 

Le train que découvraient émerveillés Apu enfant et sa sœur Durga est certes synonyme de « progrès » -et de fait il permet à l’adolescent de se rendre à Calcutta pour ses études supérieures. Ce même train qui assure les va-et-vient entre deux mondes (la campagne et la ville) soit ce qui relie Apu à sa mère,  symbolise simultanément l’isolement (à chacun de ses passages la mère ressent plus douloureusement l’absence du fils jusqu’à être victime d’hallucination auditive et à se morfondre dans une attente frappée d'inanité…)

Dans un premier temps le cinéaste fait la part belle au père (souvent absent en I) nous le voyons (du moins à travers le regard d’Apu) lire les textes sacrés sur les bords du Gange (c’est son « gagne-pain » , ce qu’illustre un  très gros plan sur les pièces de monnaie données par l’assistance subjuguée par sa voix) nous le suivons de dos  grimpant les marches --et les panoramiques sur les ghats sont tout simplement vertigineux-   portant  religieusement l’eau purificatrice ( ?). Le parcours de la mère (une mère courage, omniprésente, comme dans le premier volet) sera diamétralement opposé à celui du fils (la réussite de ce dernier contrastant avec le chagrin dû à son éloignement)

Sur les toits voici une communauté de pigeons (plan d’ouverture après un générique qui défilait en même temps que le train filait vers Bénarès) D’abord agglutinés ils vont cisailler le ciel en le striant de leur débandade au moment même où le père meurt.

En parallèle voici une myriade de lucioles qui semblent matérialiser l'éparpillement de l’âme dans le noir empyrée,  âme de la mère inconsolée.

Deux instants d’éternité.  Et la musique de Ravi Shankar à la  puissance suggestive, envoûtante  !  

A ne pas rater (séances jeudi 13h40, samedi 19h30, dimanche 17h , lundi 16h ) quand bien même ce volet n’aurait pas la force émotionnelle du  premier !

 

Colette Lallement-Duchoze

La trilogie d'Apu: L'invaincu
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