De Quentin Dupieux (2023)
avec Anaïs Demoustier : Judith, la journaliste Édouard Baer : Salvador Dalí Jonathan Cohen : Salvador Dalí Gilles Lellouche : Salvador Dalí Pio Marmaï : Salvador Dalí Didier Flamand : Salvador Dalí âgé Romain Duris : Jérôme, le producteur Agnès Hurstel : Lucie, l'assistante Marie Bunel : l'acheteuse du tableau Nicolas Carpentier : le commissaire-priseur Jérôme Niel : le modèle à la canne Marc Fraize : le modèle au mouchoir Hakim Jemili :Jean-Marie Winling : le journaliste Tom Dingler : François Laurent Nicolas
Thomas Bangalter compositeur
Projeté à Venise hors compétition
Présenté en avant-première dans le cadre Festival Cinéma Télérama (Omnia dimanche 21/01/2024)
Sortie en salles le 7 février 2024
Une journaliste française rencontre Salvador Dali à plusieurs reprises pour un projet de documentaire...
Un plan fixe prolongé sur un piano à queue en plein air, avec son tuyau d'arrosage son arbuste et sa sculpture ( à la Chirico? à la Magritte?) Bienvenue dans l'univers pictural de Dali et sa Fontaine nécrophilique coulant d'un piano à queue . Le même plan en écho au final (ou presque car il y aura plusieurs fins, comme dans certains films de Buñuel ). Entre les deux une immersion dans l'univers mental du peintre !
Surréaliste la tonalité d'ensemble ? Certes, à condition que le terme ne soit pas pris au sens strict d'"automatisme psychique" que lui donnait André Breton ... Surréalisme des décors (maison reconstituée au bord de la Méditerranée) des situations des dialogues, mélange rêve et réel. Quentin Dupieux multiplie en outre les "effets" gigogne comme un déploiement ad infinitum et ad libitum de mises en abyme, avec reprises comiques et facétieuses; un procédé d'emboîtements qui rappelle sans conteste Buñuel . Confier l'interprétation à plusieurs acteurs (cf les "a" du titre) ne relève-t-il pas de la perturbation du "fameux principe d'identité" (contre identité, subversion du sujet) plus que de la volonté d'illustrer les multiples facettes du peintre? . Et la vision récurrente de Dali en vieillard infirme ne serait-elle pas l'équivalent des cadavres exquis si chers aux surréalistes?
Omniprésentes donc (quel que soit l'interprète) l'extravagance l'arrogance et la mégalomanie du peintre et penseur. Avec les "célèbres accessoires" -moustache torsadée en 10h10, manteau pelisse, canne, Rolls Royce, deux cadrans, montres molles; avec aussi et surtout dans la diction ce roulement outrancier des "r" et un débit assez lent (marteler certains phonèmes, les étirer tout comme les 6 "a" du titre) . A noter que les prestations d'Edouard Baer et Jonathan Cohen sont de loin les plus convaincantes...
La première séquence où la journaliste, et son précieux calepin, attend fébrile le "Génie" qu'elle doit interviewer restera dans les annales: avec cet effet au montage d'un couloir d'hôtel qui n'en finit pas de finir ....De même le rêve raconté par le prêtre n'en finirait pas de finir ...s'il n'était relayé par son "interprétation picturale" signée Dali et recopiée ad nauseam...(si le cinéaste épingle le marché de l'art, il se moque aussi du snobisme de clients fortunés)
Prolifique Quentin Dupieux l'est assurément (Yannick sorti en 2023 suivait de peu Fumer fait tousser) tout comme Dali était ...prolixe.
Il est peut-être "entré en connexion avec la conscience cosmique de Dali" mais son "faux" biopic certes hyper référencé, divertissant, parfois hilarant n'en laisse(ra) pas moins une impression mitigée (essoufflement, attentes déçues...)
Je vous laisse juge
Colette Lallement-Duchoze