Documentaire réalisé par Fenton Bailey et Randy Barbato (USA, Allemagne)
Robert Mapplethorpe, photographe américain mort du sida à 42 ans en 1989, avait dit-on le côté libertin d’Arthur Rimbaud, la poésie de Jean Genet et l’intérêt pour le corps sculptural de Michel-Ange
Le sénateur qui éructe en conspuant la morbidité de ses photos et qui veut interdire une rétrospective n’était pas de cet avis… C’est sur cette séquence que s’ouvre le biopic (soit juste après la mort du photographe)
De facture classique, ce documentaire suit le parcours de Robert Mapplethorpe (depuis l’enfance dans une famille catholique du Queens, puis l’époque du Chelsea Hotel avec Patti Smith jusqu’à la dernière soirée qu’il organisera dans un dévergondage de luxe). Chaque étape est commentée (avec force détails dont certains assez truculents) par nombre de personnes interviewées : la soeur et le frère, les amis, les amants, les galeristes, etc.
Certains ne cachent pas une certaine gêne notamment devant l'autoportrait avec un fouet enfoncé dans l'anus, d'autres insistent sur sa soif de reconnaissance, sur son opportunisme, sur sa provocation ou sa jalousie (avec Andy Wahrol par exemple) mais tous reconnaissent sa liberté artistique et sexuelle face à l'intolérance et l'homophobie et ne remettent nullement en cause son talent (une scène -trop rapide- le montre en train de chercher cet instant de fulgurance, quand il impose tel ou tel geste, tel ou tel mouvement à peine perceptible, à ses modèles )
Et à travers ce "portrait" c'est toute une époque qui revit: celle des lieux underground notamment (le club gay Mineshaft, qui par la suite.sera fermé ..)
Il "photographiait les fleurs comme des bites et les bites comme des fleurs" C'est avec la banane, bite revolver, qu'il a fait sauter un verrou. " Le sexe est magique; si vous le canalisez bien il y a plus d'énergie dans le sexe que dans l'art" affirmait-il.
Non pas un pornographe -le porno cherchant à provoquer l'excitation- mais un "artiste" qui veut montrer la "perfection de l'acte sexuel, la sensualité"
Photo-érotisme plus que porno donc !
Cela étant, ce biopic très documenté (certaines interviews d'archives inédites sont rendues publiques pour la toute première fois, dit le dépliant) est loin d'être aussi "sulfureux" que le fut Robert Mapplethorpe et dans sa vie et dans son oeuvre! Il serait même soft par rapport à Larry Clarke. Et la multiplicité et le défilement rapide des points de vue, censés garantir l'authenticité des faits rapportés, nuisent trop souvent à l'écoute d'une autre présence celle qui émane majestueuse de tous ces clichés (en couleur ou en noir et blanc)
Colette Lallement-Duchoze