22 février 2025 6 22 /02 /février /2025 04:35

De Rúnar Rúnarsson (Islande 2024)

 

avec Elín Sif Halldórsdóttir (Una) Katla Njálsdóttir (Klara)  Mikael Kaaber (Gunni) Ágúst Örn B. Wigum (Basse) Gunnar Hrafn Kristjánsdóttir (Siggi) Baldur Einarsson (Diddi)

 

 

Festival Cannes 2024 Un Certain Regard

Le jour se lève sur une longue journée d’été en Islande. D’un coucher de soleil à l’autre, Una, une jeune étudiante en art, rencontre l’amour, l’amitié, le chagrin et la beauté...

When the light breaks

Un film sur l’intime : la confrontation avec la mort, la douleur de la perte ; un chagrin personnel (une promesse qui s’éteint avec la disparition de l’être aimé) mais qui doit être vécu en retrait (Una n’était pas la compagne officielle de Diddi) jusqu’à s’effacer devant la douleur collective (celle de ces étudiants, de ces jeunes gens, dont Klara, dévasté.es par une tragédie incompréhensible mais qui continueront à célébrer la vie, d’où l’alternance entre scènes d’absolue tristesse (des larmes perlent sur tous les visages) et de grande liesse (rires et boissons) et c’est bien par le langage corporel que le cinéaste appréhende le trauma dans sa complexité


La ténuité scénaristique apparente est largement "compensée" par une approche formelle singulière.

Le film obéit à une  construction circulaire : il s’ouvre sur un coucher de soleil et se clôt sur le même  "motif"  le lendemain,  avec ces variantes - un couple vu de dos (cf l'affiche) , l'autre  vu de face-  le soleil  au  "sang qui se fige" dans l’océan  et  des éclats de lumière scintillant sur  deux corps. Voici en outre deux couples lovés quasiment dans la même position, et deux séquences dans la campagne islandaise avec des trouées lumineuses dans  le ciel avant l’embrasement dans le tunnel (prologue) ou ces étincelles rougeoyantes dans le vert sombre (précédant  la dernière séquence), deux accompagnements musicaux cordes et voix artificielle (?) de femme  

(https://www.youtube.com/watch?v=nQG6qLpo9Nc  )
 

Le cinéaste affiche un goût prononcé pour les reflets (vitres, miroirs, dédoublements spéculaires) en accord d’ailleurs avec l’interprétation odi et amo du compositeur Jóhann Jóhannsson, avec la dualité (douleur fulgurante et liesse) et avec le portrait en creux de Diddi (amant de deux femmes, ado attardé déifié par ses camarades qu’il entraînait dans les "performances")


Et parmi les "performances" il convient de signaler  l'"apprentissage du vol"  que précisément Una va transmettre à Klara. Ne serait-ce pas l’acmé du film,  préfigurant d'ailleurs la séquence finale -où triomphe la sororité? (Una après avoir accepté l’effacement, remplace Diddi dans le rôle d’initiateur) et d’un point de vue formel c’est assurément la rencontre audacieuse entre une impressionnante contre-plongée (façade de l’église) et un léger mouvement horizontal (oui Klara s’est momentanément affranchie des lois de la pesanteur …)
 

Ajoutons la sublime interprétation de Elin Sif Halldórsdóttir -au look à la Jean Seberg - que la caméra de Rúnar Rúnarsson  magnifie par les gros plans
 

 

Mais le primat accordé aux façades de verres, aux effets spéculaires -accentué d’ailleurs par la fixité des plans et le silence- car l’essentiel est souvent dans le non-dit- ce jeu d’écho entre soi et l’autre, entre soi et l’image de soi vire au procédé, ou du moins est-il perçu comme tel - métaphore par trop insistante dans ce glissement de l'esthétique vers l' esthétisant!  

Dommage

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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