4 septembre 2023 1 04 /09 /septembre /2023 07:08

de Tina Satter (2023 USA) 

 

avec Sydney Sweeney, Josh Hamilton, Marchant Davis

Le 3 juin 2017, Reality Winner, vingt-cinq ans, est interrogée par deux agents du FBI à son domicile. Cette conversation d’apparence banale parfois surréaliste, dont chaque dialogue est tiré de l’authentique transcription de l’interrogatoire, brosse le portrait complexe d’une milléniale américaine, vétérane de l’US Air Force, professeure de yoga, qui aime les animaux, les voyages et partager des photos sur les réseaux sociaux. Pourquoi le FBI s’intéresse-t-il à elle ? Qui est vraiment Reality ?

Reality

Une tension qui naît d’un dispositif resserré, de la menace insidieuse des deux agents du FBI (apparent paternalisme, excessive bonhomie), des plans fixes -dont certains larges -dans l’exigüité du lieu clos qu’est ce " cagibi " Un huis clos glacial;  ô combien efficace !

 

Dès le début le spectateur est prévenu : le film donne à voir et entendre ce qui a été réellement enregistré lors de la perquisition chez Reality Winner, cette jeune femme coupable d'avoir osé divulguer une vérité que la NSA (National Security Agency) a considérée comme une violation de document classifié, de l'espionnage (ingérences russes dans l’élection présidentielle américaine de 2016)

L’événement est reconstitué comme en temps réel -les encarts "25 minutes après le début de l’enregistrement," 105 minutes semblent le prouver-.  La caméra est peu mobile mais suffisamment pour capter regards hésitations gestes (l’actrice Sydney Sweeney, est impériale dans le rendu des  "états d’âme"  de Reality Winner -dont le portrait apparaît  à l’écran quand l'image -la représentation du réel- .vient corroborer les "faits  avoués"

Une tension habilement graduée qui fait basculer l’interrogatoire dans une sorte de thriller politique.

D’abord filmé en extérieur (Reality est interpellée au volant de son Espace) puis dans une pièce "abandonnée" de sa maison de banlieue (la chatte, elle, est tapie sous le lit de la chambre puis sera tenue en laisse, clin d’œil appuyé au statut réservé à sa maîtresse ?…) ; d’autres agents du FBI auront pour mission de tout passer au crible dans les pièces meublées et aménagées) Le trio -deux agents et Reality- (la réalisatrice varie les angles de vue, use de plans rapprochés ou plus serrés) évolue dans ce climat  " étrange" Et l’interrogatoire qui mêle questions de confort (boisson,  pauses) et questionnaire sur la maitrise des langues orientales, les accréditations, le rapport aux armes, les ambitions de carrière militaire, progressivement prend les allures d’un thriller. Un thriller inquiétant à l’instar de ces murs qui "emprisonnent"  ou qui jouent le rôle de caisse de résonance, de cette pièce vide qui par métaphore devient espace mental. Inquiétant quand l’écran se lacère, que les personnages disparaissent provisoirement  (recours à ces glitchs quand bien même ce procédé peut sembler superflu). La technique de l’encerclement,  pratique bien rodée, la reddition puis le relais par une médiatisation outrancièrement furibonde, tout cela prouverait (s’il était nécessaire) que la réalisatrice décline les différents sens du terme « reality »

 

Reality est le prénom de la jeune femme, lanceuse d’alerte condamnée sous la présidence de Trump.

C’est à un  "principe de réalité"  qu’obéirait le film dans la scrupuleuse  "transcription" de l’interrogatoire ? (qui d'ailleurs apparaît à l'écran)

Reality va découvrir au cours de cette "enquête" l’existence d’un monde où chaque pas chaque mot est enregistré (les agents se contentaient en fait  de questions oratoires, ils connaissent toutes les réponses et prennent un plaisir sadique à retarder l’issue). Et dans ce monde de surveillance généralisée, le concept de "démocratie"  varie selon les idéologies (Reality aura beau revendiquer son  "patriotisme" … motivée par le souci du  "bien commun" , elle est condamnée par ceux-là même qui le revendiquent ce "bien commun" !!!! )

Quels critères pour différencier " réel"  et "illusion,"  "juste" et  " arbitraire "????

 

Sydney Sweeney, après la fouille corporelle de rigueur, les mains entravées, salue de ses grands yeux mélancoliques son chien ….encagé lui aussi.. !!

 

 

Un film à voir de toute urgence !

 

 

Colette Lallement-Duchoze

 

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Mode d'emploi

Ce blog est destiné à collecter nos ressentis de spectateurs, à partager nos impressions sur les films (surtout ceux classés Art et Essai).

Envoyez vos articles ou vos réactions à: artessai-rouen@orange.fr.

Retrouvez aussi Cinexpressions sur Facebook

 

 

Recherche