5 avril 2021 1 05 /04 /avril /2021 06:57

de Sherry Hormann (Allemagne Turquie 2019)

avec Amilia Bagriacki  Rauand Taleh  Aram Arami 

 

présenté en compétition au festival international de films de femmes Créteil (du 2 au 11 avril )

 

filmsdefemmes.com

Aynur Sürücü, jeune allemande d’origine turque, est contrainte de quitter l’école à l’âge de 16 ans afin d’épouser un cousin à Istanbul. Enceinte, elle se rebelle et quitte son époux violent. Elle retourne avec son enfant auprès de sa famille à Berlin. Même si cette dernière est persuadée que son évasion a déshonoré la famille, Aynur refuse de laisser ses frères et ses parents dicter ce qu’elle peut et ne peut pas faire. Au lieu de cela, elle essaie de vivre sa propre vie, commence un apprentissage et sort la nuit…

Nur eine Frau

La réalisatrice s’est inspirée d’une histoire vraie (assassinat d'une jeune femme de 23 ans par son propre frère) . Intriguée par ce meurtre  commis en pleine rue à Berlin, en 2005, elle  se documente, lit Ein deutsches Schicksal" de Matthias Deiß et Jo Goll, des rapports, des dossiers. Elle refuse cette simplification qui réduirait ce  "crime d’honneur" à un  "dossier"  et ferait d’Aynur une  " victime".  NON  Aynur est morte, car elle était une femme (nur  eine Frau),  une femme qui a revendiqué le droit de ne pas obéir aux diktats d’une famille de religion musulmane (sunnite). Le droit d’être libre. En ce sens Aynur est une héroïne, A regular woman (nur eine Frau )  lui rend hommage et à travers elle, à toutes ces femmes qui  luttent  (et meurent)  pour leur émancipation

 

Le film commence là, sur le trottoir,  où gît un corps mort recouvert d’un drap blanc maculé de sang. Une voix nous interpelle, c’est celle d’Anyur - et cette voix hors champ commentera le récit . Ce choix d'exposé narratif  -donner la parole à une morte- ne saurait être un  énième procédé de flash back, ni un pastiche de Boulevard du crépuscule, mais Sherry Hormann  le revendique comme une nécessité    "il fallait donner à Aynur la voix qu’elle n’a jamais eue ; faire entendre son point de vue  et cette focalisation   "interne"  sera précieuse pour comprendre ses réticences à déposer plainte, ou pour contrecarrer les assertions  de  ses  frères,  par exemple 

 

Si le récit suit la chronologie des événements depuis 1998 jusque 2005, il est scandé par les énoncés de 4  "commandements", mis en exergue, annonciateurs de chaque partie ; 4 commandements sur les 6 (car aux deux premiers dont ne pas perdre sa virginité avant le mariage, la jeune fille n'a pas dérogé). Chronologie et   "effractions condamnables"  successives!!!

 

Le  crime est méthodique, il a été  planifié; plus la jeune femme se libère d’un carcan, s’émancipe rompt avec une tradition ancestrale et affiche avec détermination ses choix (rechercher un emploi, élever seule son enfant, boire fumer, avoir des relations sexuelles) plus la famille (et particulièrement les frères) se sent humiliée, déshonorée. Allah acquiescera : la « coupable » -celle qui a souillé- doit mourir

 

Mais les procédés: arrêts sur image, ralenti ou accéléré, image pixellisée, insertion textes de présentation (frère n°1 le père etc..) censés imiter certains  "rapports" d’audience (et même certains films dits de "reconstitution") jusqu’à l’insertion de vidéos d’époque et de photos de la vraie Aynur,  risquent d'entacher  l'empathie du spectateur envers le personnage et de  l'agacer par leur systématisme et leur répétitivité (on n'est pas loin de la surenchère démonstrative ).

Dommage!

 

Colette Lallement-Duchoze

 

 

 

 

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