d'Olivier Assayas (France, Brésil)
avec Penélope Cruz, Edgar Ramirez, G. Garcia Bernal
La Havane, début 1990. Alors que la guerre froide touche à sa fin, le département du contre-espionnage cubain envoie cinq hommes surveiller un groupe anti-castriste basé en Floride. à Miami, responsables d'attentats sur l’île. Cuban Network est l'histoire vraie de ces espions qui ont accompli leur travail en territoire ennemi
Pour démêler les arcanes de la géopolitique, le cinéaste Olivier Assayas mêle étroitement deux genres narratifs : celui de l’espionnage, du contre espionnage (auquel il emprunte les codes ou les revisite) et celui de l’"intrigue" sentimentale, (en célébrant l'amour qui unit Olga et son mari R Gonzales). Mais ce faisant, il est loin d’emporter l’adhésion du spectateur (même si on regarde avec un intérêt certain et sans trop s’ennuyer, son nouveau film Cuban Network)
Pourquoi ?
Certes, les mouvements de caméra dans la tourmente, les vues aériennes sur La Havane, le tempo qui fait alterner rythme soutenu et "pauses", les changements de point de vue, les jeux de lumière de clair-obscur, la récurrence de l’élément liquide (lieu de tous les trafics dont certains mortifères) tout cela est éminemment cinéphilique (et cinégénique)
Mais à l’instar du sujet aux multiples ramifications, (de la constitution du réseau, de ses actions avec rebondissements inattendus, jusqu’à l’emprisonnement et au procès), la construction du film obéit à une structure qui complexifie les "données". Comme Olga (Penelope Cruz), nous sommes tentés de croire dans un premier temps que son mari R Gonzales (Edgar Ramirez) est un « traître » quand il s’empare d’un avion et rejoint d’autres Cubains « exilés » anti-castristes, en Floride. Puis annoncé par un encart, voici un flash-back qui nous ramène 4 ans en arrière, et qui doctement explique (voix off) la genèse du réseau des 5, puis ce sera le retour au présent, éclairé désormais d’un jour nouveau... Et Olga de soupirer j''ai besoin de temps... De La Havane à Miami, de Miami aux pays d’Amérique centrale, de trahisons (ou prétendues telles) en révélations, d'escroqueries et mensonges en manipulations et corruptions, d’attentats sur le sol de Cuba en contre-attentats, du discours de Clinton à celui de Fidel Castro, d’accélérés en ralentis, des intérieurs feutrés américains à ceux délabrés de l’île, du rôle hypocrite du FBI à celui de dissidents, tout dans ce film souffre d’une carence : une "dimension réflexive" fait cruellement défaut (alors même, et c’est le paradoxe, que le cinéaste tente de tout expliquer, "scolairement" d’ailleurs…)
L’affiche aurait dû nous alerter : au tout premier plan le "couple": couple- acteurs "bankable" ou couple embarqué dans le flux de l’Histoire ?
Colette Lallement-Duchoze