20 novembre 2018 2 20 /11 /novembre /2018 10:43

Documentaire réalisé par Leonor Teles    Portugal

présenté en compétition internationale au Cinéma du réel 2018

 

Un an dans la vie du pêcheur lisboète Albertino Lobo, entouré de sa femme Dalia et de ses filles, dont l'aînée s’apprête à se marier. La fin d'un cycle de vie, à hauteur de barque et de regard.

Terra Franca

Un pêcheur cadré en plan américain, telle une figure de proue, sur son bateau, un fleuve -le Tage-, un pont, un rivage semi urbain, ce plan récurrent qui semble rythmer le film, suggère plus qu’il ne montre (que regarde cet homme dans un lointain pourtant si proche ?- Alors qu’il semble faire corps avec l’élément liquide  qu’appréhende-t-il?).

Le passage d’un train, des voies poussiéreuses, une morne tranquillité, c’est l’environnement sur terre. Un bar où travaille Dalia l’épouse. Une petite maison où la famille réunie (les parents leurs filles Laura et Lucia le gendre Tiago la petite fille Alice) entre deux plats ou deux verres discute d’un aspirateur très sophistiqué, des préparatifs de la noce (c’est que l’aînée va bientôt se marier…) Un village entier dans la lumière nocturne de la fête.

C’est cette apparente banalité du quotidien que filme avec beaucoup d’empathie, en plans fixes, et dans un format 4/3, la documentariste Leonor Teles.

 

Nous sommes à Vila Franca de Xira. (commune située dans le Grand Lisbonne)

La réalisatrice procède par touches successives et  passe du portrait d’un homme à celui d’une famille, alors que se dessine en creux la dureté du monde Ils affament les gens dira à un moment Albertino ; son métier de pêcheur est en voie de disparition. On lui a saisi son matériel car la zone de pêche est désormais réserve naturelle et il faut des autorisations pour jeter les filets. Attaché à la famille (même s’il affirme pince-sans-rire qu’après 5 ans un couple...ce à quoi Dalia lui rétorque et pourtant ça fait 3 décennies que ... Lui " le pire vient après le mariage, hein Dalia" Elle "et le meilleur...")  Attaché aux liens sacrés du mariage (les préparatifs de la noce, puis la cérémonie elle-même le prouveraient aisément). Homme ancré dans son temps mais nostalgique d’une autre époque  ? (en tout cas conscient qu'une ère est révolue.)  Lui le taiseux forme avec sa femme -habituée par son métier à communiquer- et ses filles -qui ont opté pour la modernité- un saisissant contraste .. Mais la chronique de Leonor Teles jamais ne verse  dans le drame social et la répétitivité des gestes ou des situations jamais ne  provoque quelque ennui (conversations pimentées d'humour et de rires, regards si éloquents dans leur mobilité silencieuse)

 

Le fleuve ne symbolise-t-il pas une mouvance inéluctable, le flux inexorable ? (Inutile de verser dans la philosophie héraclitéenne pour  répondre à la question; les photos que l'on voit dans le générique de fin illustrent  en un saisissant raccourci les différentes étapes de ce qui a été la vie....leur vie)

Des plans somptueux sur sa majesté inviolable, une lumière qui fait vibrer les variations de paysages au gré des heures et des saisons; l'espace  que filme Leonor Teles est devenu un personnage à part entière ; et dans un tel « cadre » son portrait de famille, s’en trouve  magnifié …

 

Un documentaire à ne pas rater !

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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