De Kristen Stewart (USA France Lettonie 2024)
Avec Imogen Poots (Lidia Yukaanvitch) Thora Bich (Claudia la sœur) James Belushi (l’écrivain Ken Kesey) Michael Epp (Mike) Charles Carrick (Andy Mingo) Tom Sturridge (Devin) Susannah Flood (Dorothy)Anna Wittowsky (Lidia enfant) Kim Gordon (la photographe)
Adapté du best-seller autobiographique de Lidia Yuknavitch La mécanique des fluides
Cannes 2025 Un Certain Regard
Festival Deauville 2025 Prix de la Révélation
Ayant grandi dans un environnement ravagé par la violence et l’alcool, Lidia, une jeune femme, peine à trouver sa voie. Elle parvient à fuir sa famille et entre à l’université, où elle trouve refuge dans la littérature. Peu à peu, les mots lui offrent une liberté inattendue…
Dès le générique les choix cinématographiques de Kristen Stewart crèvent l’écran : éclatement chronologique et fragmentation (morcellement de l’image et arrêt brusque) pellicule 16mm (en lieu et place du numérique car il s’agissait d’entendre battre le cœur de la caméra, donner une texture de mémoire et de laisser au spectateur le soin de combler les vides). Choix en harmonie d’ailleurs avec le roman dont s’inspire la réalisatrice (la mécanique des fluides de Lidia Yukanavitch, laquelle tend à son lecteur « des éclats d’une vie en exigeant que vous les assembliez vous-même »)
Rendre compte d’un chaos intérieur
Alors oui ce premier long métrage frappe par un montage fragmenté syncopé (malgré le découpage en plusieurs chapitres- comme autant de préparations: à la noyade, à l’évasion, au silence, à la réalisation, au désir de réhabilitation soit autant d’étapes dans le processus du deuil-, malgré aussi le recours à la voix off, lesquels plaideraient pour une certaine "chronologie linéaire") ; il frappe aussi et ainsi par l’enchâssement et la déstructuration des points de vue et des périodes de la vie (épousant en cela la manière dont chacun d’entre nous « recompose ses souvenirs et ses traumatismes ») Orphique (souillure originelle et dépassement) poétique (ses couleurs pastels ses gros plans sur la chevelure de Lydia enfant, les vibrations de l’eau et ses abysses, les corps inondés de lumière et de désir, la liste serait longue) sensoriel organique viscéral porté par la fulgurante Imogen Poots il impose le cheminement chaotique du trauma vers une libération par l’écriture ; en mêlant (ou plutôt entremêlant) le réel, la mémoire, l’imaginaire et le fantasme avec une célérité époustouflante (du moins dans les premières parties)
Dans le flux les remous de la conscience que la cinéaste explore, on devine une rage de filmer, sincère, qui pourrait emporter l'adhésion.
Hélas les choix éminemment cinématographiques tournent vite au procédé, au systématisme (arty?) ; et les métaphores de l’eau, de la couleur rouge se diluent trop vite dans les éclaboussures de cette narration si éruptive. L’étirement vire à l’épuisement. Il en va de même de ces très gros plans récurrents sur l’œil ou sur la viscosité du liquide de jouissance onanique, etc ; et parfois la barrière est par trop ténue voire poreuse entre douleur et dolorisme
Colette Lallement-Duchoze
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