3 juillet 2024 3 03 /07 /juillet /2024 10:32

Documentaire réalisé par JR (USA France 2023) 

Les États-Unis représentent 4,2 % de la population mondiale et 20 % des détenus dans le monde. En octobre 2019, l’artiste JR obtient l’autorisation sans précédent d’intervenir dans l’une des prisons de haute sécurité les plus violentes de Californie : Tehachapi. Certains détenus y purgent des peines à perpétuité pour des crimes commis alors qu’ils n’étaient que mineurs. Objectif: réaliser une fresque avec les détenus 

Tehachapi

Connu pour ses œuvres monumentales (Gaza, Mur Mexique), JR  a travaillé aussi avec Agnès Varda (Visages villages). Pour cet opus il a choisi de contribuer à un « travail de réinsertion » en s’attaquant à la pire des prisons forteresse Tehachapi en Californie (des détenus condamnés à la perpétuité pour des crimes commis alors qu’ils étaient mineurs) Intention louable que de donner la parole à ces condamnés grâce à  un dispositif interactif : ce sera une vaste fresque, celle de leurs visages, collée à même le sol de la cour de la prison et d’un clic on pourra entendre leur histoire enregistrée. Voyez ces détenus participer avec enthousiasme à ce projet (se laisser photographier selon différents angles, préparer la colle dans des seaux, l’étaler sur le ciment) et la vue en plongée (par drone) magnifie la monumentalité  (en écho celle des montagnes collées verticalement comme prolongement du mur)

JR a choisi le format scope et au milieu de l’écran la verticalité du portable, avec de fausses profondeurs de champ ainsi que sa voix off. Le rythme est souvent rapide. Des gros plans sur les visages alternent avec des plans d’ensemble (cour réfectoire) dans ce « documentaire » ( ?) alors que l’environnement désert est condamné aux brûlures du soleil

On pourra être agacé par l’ego surdimensionné du réalisateur- (dès le départ JR insiste sur la genèse et la finalité de « son » projet, puis in situ nous le voyons (démagogique ?) serrer la main de chacun des détenus dont il va faire le portrait) Un documentaire moins sur la « vie » de ces prisonniers, sur leurs conditions d’incarcération,(quelques rares plans suffisent à mettre en évidence la monstruosité de ce lieu) que de leur rapport avec lui, l’artiste, (cf l’échange téléphonique avec Kevin presque en temps réel …)  et partant de leur rapport à l’art dans sa fonction rédemptrice (?) . Visages tout sourires. Et même Kevin (dont la croix gammée tatouée sur le visage sera « effacée » à sa sortie par une chirurgienne…juive…) a parfois la beauté d’un Ange (non exterminateur)

 

Le cinéaste est au centre ; et pas seulement en tant que maître de cérémonie (on a en fait l’impression désagréable d’assister à un making of à sa gloire) mais aussi  en tant que dispensateur de « la bonne parole »   Que ces prisonniers « retrouvent » un semblant d’humanité dans un univers déshumanisant (cf cages dans la torridité ambiante) c’est ce à quoi il aura œuvré. Et les résultats seraient probants : à l’intérieur de la prison, on a constaté une évolution des mentalités, un apaisement des tensions entre les personnels pénitentiaires et les personnes détenues, le développement des connaissances, le travail collectif, et introspectif etc.. A l’extérieur le relais - réseaux sociaux et commentaires, parole donnée aux familles – prouverait si besoin était l’efficacité du projet 

 

Mais quand bien même JR refuse toute mièvrerie tout angélisme l’impression n’en reste pas moins mitigée (celle d’une auto promotion savamment entretenue)

 

Sachons-lui gré toutefois de remettre en cause les choix de certains politiques qui prônant la sécurité à tout prix, privilégient  l'enfermement  l’exclusion et la déshumanisation 

 

Colette Lallement-Duchoze

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