7 avril 2024 7 07 /04 /avril /2024 10:26

Documentaire réalisé par Andrés Peyrot (Panama/France 2023) 

En 1975, Pierre-Dominique Gaisseau, explorateur français, se rend au Panama pour réaliser un film sur la communauté fermée des Kunas, où la femme est sacrée. Or, le projet fait faillite et les Kunas attendent toujours de découvrir leur film.

Dieu est une femme

Tout commence (film + histoires)  par ces images d’archives ; nous voyons Pierre Dominique Gaisseau recevoir en 1962 un Oscar pour son documentaire Le ciel et la boue ; nous apprenons aussi qu’en 1975, il fut l’hôte de la communauté Kuna (peuple d’Amérindiens vivant dans l’archipel de Kuna Yala, le long de la côte caribéenne du pays). Communauté matrilocale qu’il avait filmée (fasciné par son mode vie, ses pratiques cultuelles et son organisation sociale , si éloigné.e. s de sa « civilisation occidentale »)  et à laquelle il avait fait la promesse solennelle de faire connaître « dieu est une femme » Mais rien ne se passa comme prévu…

Andrés Payrot cinéaste suisse d’origine panaméenne se rend en 2010 à Ustupu ; le souvenir de cette promesse est toujours vivant (Dieu est une femme jamais visionné serait attendu comme un film miroir?) Dès lors va débuter une « quête » (retrouver ces bobines) qui se double d’une enquête. Film d’aventures ! Nous serons aux côtés du cinéaste et du poète Arysteides Turpana, âme de cette communauté ;  après sa mort en 2020 le récit serait désormais orphelin de son héraut ? Peut-être,  mais le cinéaste le veut avant tout « collectif » , et surtout débarrassé de ces oripeaux censés épater le  "touriste " (et flatter son regard "ethnocentrique")

Ainsi deux récits vont être menés de pair ou de front, le questionnement sur la fonction du documentaire dit « ethnographique » n’en sera que plus percutant. Après avoir assisté (comme en direct à la découverte des bobines puis à leur restauration, à leur transport presque dédaléen) nous serons convoqués au plus près de tous les habitants de l’île pour voir sur cet immense « écran » de fortune ce qu’étaient ces gamines (aujourd’hui adultes) ou leur père (aujourd’hui décédé) accomplir le rite de l’hyménée par une danse rituelle, la communauté dans son ensemble (rites de passage, "tonte" des cheveux certainement douloureuse)

Une « mise en abyme » donc pour un film hybride. Avec l’option de la simultanéité (comme dans des split screen) Juxtaposer dans le même cadre des extraits d’un passé restauré et le moment présent, voilà un exercice d’autant plus périlleux que le commentaire en off s’offusque de l’approche « occidentalisante » et que la proximité du présent d’hier avec celui d’aujourd’hui abuse parfois de surimpressions ou de fondus enchaînés 

Restera gravée la personnalité de cette femme qui tout en commentant l’image de ce qu’elle a été, est comme déifiée, mais sans être idéalisée tout simplement parce que son regard authentique bat en brèche toute tentative de « folklorisation » mal venue…

A voir !

 

Colette Lallement-Duchoze

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