court métrage de Josza Anjembe (2019)
avec Alassane Diong, Yoann Zimmer
en lice pour les Césars 2021 Baltringue est disponible gratuitement pendant une durée limitée sur le site de Têtu
à quelques jours de sa sortie de prison Issa, vingt ans, fait la rencontre d'un nouveau détenu Gaëtan
Le titre, un terme d'injure souvent homophobe, est révélateur
L'injure stigmatise et ce faisant devient elle-même stigmate (c'est l'enjeu de ce court métrage)
Certes la réalisatrice nous immerge dans le milieu carcéral: le film s'ouvre d'ailleurs sur une séquence d'apprentissage où Issa travaille en atelier, et quelques plans furtifs -profondeur de champ dans un espace que délimitent les murs qui emprisonnent, étagères de livres dans cette bibliothèque où Gaëtan se délecte dans la lecture de René Char, corps ruisselants sous la douche - MAIS l'oeil de la caméra, qui souvent se confond avec le regard d'Issa (caméra subjective), introduit le spectateur dans l'univers intérieur du détenu et son enfermement "mental"
Lui-même est de tous les plans : très gros plans sur son visage où les yeux dans leur douloureux silence disent un mal-être. Oui il est attiré par Gaëtan et cette attirance ne saurait pactiser avec la trivialité (celle du caïd qui lui enjoint de le "sucer") Oui c'est un être tourmenté : il sait que l'homosexualité en milieu carcéral est violemment réprimée par les co-détenus machistes hétéronormés....
Josza Anjembe explore avec justesse, délicatesse et réalisme aussi , ce qu'est l'enfermement, social certes, mais surtout mental, ce que confirme le recours aux ellipses (le mutisme et le regard sont des langages à part entière qui suppléent au minimalisme des paroles)
Ce film sur "l'homophobie intériorisée, l'enfermement, l'amour" (propos de la réalisatrice) est porté par deux acteurs talentueux Alassane Diong et Yoann Zimmer
La séquence finale (celle d'un sacrifice provoqué et consenti: Issa, victime expiatoire ) exhausse le court métrage au rang de tragédie!
à voir ! Absolument!
Colette Lallement-Duchoze