14 avril 2022 4 14 /04 /avril /2022 11:30

d’Étienne Comar (2021)

avec  Alex Lutz, Agnès Jaoui, Veerle Baetens Marie Berto Hafsia Herzi Fatima Berriah Anna Nadjer 

Luc est un chanteur lyrique renommé. En pleine crise personnelle, il accepte d’animer un atelier de chant dans un centre de détention pour femmes. Il se trouve vite confronté aux tempéraments difficiles des détenues. Entre bonne conscience et quête personnelle, Luc va alors tenter d’offrir à ces femmes un semblant de liberté.

A l'ombre des filles

Pour illustrer une thématique pour le moins éculée (rôle libérateur de l’art en général, du chant en particulier, en milieu carcéral) le réalisateur a choisi le format carré 1,33:1  (4/3) : c'est celui des pochettes de disque (et le film est d'ailleurs traversé de chansons/hommages), c'est aussi celui du portrait (éliminant toute fioriture, il permet de se concentrer sur un visage et il se prête aux gros plans); mais c'est surtout celui de l'enfermement ; or dans le contexte de  à l’ombre des filles, n'y aurait-il  pas redondance? ….Oui quand un très gros plan sur un visage envahit l’écran et que les limites du cadre rappellent les barreaux. Mais quand dans ce même format -très resserré- le cinéaste aligne les 6 visages on a l’impression qu’ils sont « hors cadre », (Magie de l’expérience collective ??)  Et des vues en plongée ou contre plongée (cellules, sas entre deux portes) vont précisément accentuer l’impression d’étouffement malsain (d’autant que nous sommes en été et que le système d’aération est déficient voire inexistant) A cela s’ajoutent les couleurs laiteuses opalines ou carrément blanches de ce centre très « moderne » qui surlignent l’impersonnalité -euphémisme pour inhumanité-  du lieu de détention

 

Le spectateur restera toujours « à l’ombre » de ces femmes. Jamais il n’apprendra les causes de leur enfermement (même si par bribes quelques indices sont distillés çà et là). Car précisément l’enjeu est ailleurs. Et l’alternance entre les séquences à la prison (répétitions, opposition entre la bienveillance de Luc et la méfiance des détenues) et celles en extérieur,  consacrées au  "chanteur",   le prouverait aisément. Luc (Alex Lutz) est quasiment de tous les plans. Et c’est son "trauma"  qui est au cœur du film. Exorciser un mal (avoir précipité la mort de sa mère par négligence) sortir de sa réclusion intérieure, c’est bien la raison pour laquelle il a accepté ce  "job" provisoire. Et avec l’aide de Catherine (Agnès Jaoui) il accédera peut-être à la « lumière » (le tout dernier plan est d’ailleurs révélateur)

Certes on peut déplorer une certaine « platitude » dans  la mise en scène, le choix des « chansons et des airs d’opéra », l’inutilité -ou du moins la longueur- de certaines séquences  (celle du cunnilingus par exemple).  Mais il convient de saluer la prestation d’Alex Lutz (acteur polymorphe) et de ces comédiennes -qui par-delà des réactions épidermiques parviennent à suggérer une complexité intérieure qui jamais ne se démentira

 

Colette Lallement-Duchoze 

 

NB  Faire abstraction des couacs et fausses notes .... car dans ce film (intentions de l'auteur) le plus important est de  "se reconnecter émotionnellement à l'autre et à soi-même"

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13 avril 2022 3 13 /04 /avril /2022 08:54

de Ryūsuke Hamaguchi  (Japon 2021)

avec  Kotone Furukawa, Hyunri, Katsuki Mori, Kiyohiko Shibukawa, Fusako Urabe, Aoba Kawai.

 

 

 

Un triangle amoureux inattendu, une tentative de séduction qui tourne mal et une rencontre née d'un malentendu. La trajectoire de trois femmes qui vont devoir faire un choix…

Contes du hasard et autres fantaisies

 

Voici comme le signale le titre des variations (au nombre de 3  Magie, La porte ouverte, Encore une fois) sur la question du hasard et de la coïncidence au sein d’intrigues amoureuses 

Si la seconde (la porte ouverte) joue avec des ruptures temporelles annoncées par des encarts,  la première et la troisième semblent imposer une unité de temps. Mais les trois en reliant le présent à un passé plus ou moins proche (deux ans en I,  six ans auparavant et 5 ans plus tard en II, et 20 ans en III) mettent en évidence l’indéniable efficience du passé sur les choix que l’on va opérer au présent ; cette force implacable du temps ne renvoie-t-elle pas précisément à Rohmer ?

Un autre héritage du cinéaste français est bien évidemment l’importance du texte ! En I la longue séquence à l’intérieur d’un taxi où Tsugumi confie à Meiko les bouleversements dus à une rencontre amoureuse -ignorant que la mutine Meiko est précisément…(ne pas spoiler)- va être le « déclencheur » d’un revirement inattendu (illustré concrètement par la brusque demande de Meiko au chauffeur de faire demi-tour ; de même en III la descente d’escalator sera suivie d’une remontée rapide, répétée deux fois; et les vues aériennes sur les boucles et échangeurs signes d’un trafic intense peuvent illustrer par métaphore trajectoires, revirements).

Dans les trois contes le texte sera « révélateur » d’une « coïncidence » troublante (et en ce sens  le film semble professer une conception de l’existence et partant une philosophie de la vie qui peuvent intriguer. Montrer la coïncidence, c’est une façon d’affirmer que la rareté est l’essence même du monde, plus que la réalité elle-même. affirme le cinéaste )

Le texte -informatif- n’est pas seulement un déclencheur il peut jouer le rôle de métalangage : en II la longue séquence où Nao -alors qu’elle est animée par un souci de vengeance- lit face à Segawa son ex professeur de littérature un extrait érotique de son roman (Segawa est désormais un romancier reconnu) fait se chevaucher trois niveaux de langage (dont celui de la puissance de la littérature par rapport au réel  et plus tard celui de la psychanalyse); au final le « hasard » aura raison de « tous les fils narratifs » tissés jusque-là et il suffira d’un acte manqué pour tout bouleverser, changer définitivement le cours de deux vies…

 

Le réalisateur donne à la femme un pouvoir à la fois démiurgique -elle semble être la seule à maîtriser les « enjeux » - et démoniaque – ses duplicités assumées- (à signaler toutefois que ces dernières sont largement contrebalancées par une étonnante « sincérité » qui s’exerce au sein même de la « manipulation »). En III c’est le face à face troublant entre celle que l’on croit reconnaître, celle qui jouera le rôle,  et il libérera -à la faveur de « quiproquos »- des secrets enfouis…

 

Surtout ne pas comparer Contes du hasard et autres fantaisies à Drive My Car" ce qui ne plaiderait pas en sa faveur. Très dialogué très littéraire à la photo (presque toujours) laiteuse aux plans séquences très longs, un exercice d’artificialité ? Peut-être !

Mais ce sont trois contes, traités comme trois sketches (dans la veine des « contes moraux » ?) réalisés avant le fulgurant « drive my car ». Trois contes où les personnages (essentiellement féminins) vont « retrouver » par le langage « une vibration perdue ».

 

Le film ne peut que séduire !

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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9 avril 2022 6 09 /04 /avril /2022 06:07

documentaire de  Pierre Schlesser (Suisse 2021) 32'

 

Visions du réel 2021

Mentions spéciales du jury labo et du jury du prix documentaire festival international du court métrage Clermont Ferrand février 2022

 

à voir sur Tënk

L'Huile et le Fer - Tënk (on-tenk.com)

A travers la figure de son père décédé dans un accident du travail  -commune de Dieuze en Moselle, Pierre évoque son coin de campagne où l'on reçoit le labeur en héritage et n'oublie jamais la petite "musique de son enfance", celle des arbres coupés à la tronçonneuse, celle des machines outils sur le métal, celle des usines. Ce film met en évidence les gestes répétés, il veut évoquer le rapport de la dévotion au labeur qui fait le quotidien des habitants

Un film pudique au lyrisme discret un acte de foi dans la capacité du cinéma à rendre justice aux siens ceux dont les corps ont été dévorés par la malédiction du labeur quotidien

L'huile et le fer

Commentaire de Tënk

Notre Coup de cœur de la semaine porte un nom qui a presque une odeur : L’Huile et le Fer. L’huile qui huile le fer des outils et des scies, l’huile des coudes qui toutes leurs vies charrient du bois ou sortent un légume de terre. Nous sommes très heureux de vous présenter enfin ce très beau film que Tënk a accompagné lors de sa production. Un moyen métrage qui sous sa douceur porte une grande colère : celle d’un fils qui a vu son père se tuer à la tâche, qui a vu tout son entourage ouvrier vivre une vie de labeur insensé. Un film qui questionne l’idée même, bien fichée en nous, que le travail serait une valeur pour laquelle nous devrions tout naturellement sacrifier notre santé, notre temps, tout. À voir !

Je voulais en premier lieu traiter de l’épuisement des corps par le labeur. Je me suis donc attardé sur des gestes répétitifs qui usent. Et puis, je crois que c’est le philosophe Giorgio Agamben qui dit du cinéma que c’est « la patrie du geste », je trouve cette idée très belle. Tous ces gestes de travail manuel qui parcourent le film me sont familiers mais je les ai rarement vus au cinéma, alors je les ai filmés pour les faire entrer dans la patrie du geste, pour les célébrer et les archiver. Quant à la bande son, nous avons travaillé à partir de machines et de moteurs qui produisent un son très rythmique et presque toujours dans le même tempo. Ce rythme est celui des cadences infernales qu’imposent ces machines mais il m’évoquait celui d’un battement de cœur ou d’un projecteur de cinéma analogique. Nous avons donc abordé la bande son en travaillant sur les correspondances qui peuvent se faire entre des sons réalistes et l’imaginaire qu’ils peuvent susciter. Nous avons ainsi tenté de créer une sorte de chant de machines qui invite le spectateur à entrer dans un état de méditation (Pierre Schlesser)

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8 avril 2022 5 08 /04 /avril /2022 05:07

de Gustave Kervern et Benoît Delépine (2022)

avec Vincent Macaigne, Jonathan Cohen, India Hair, Jenny Beth, Doully Laetitia Dosch, François Damiens, Yolande Moreau, Anna Mouglalis, Thomas VDB, Anne Benoît

 

Tourné fin 2021 en Occitanie,  le film est monté rapidement pour  être diffusé juste avant l'élection présidentielle 

A la veille d’un vote pour entériner la construction d’un parc de loisirs à la place d’une forêt primaire, un maire de droite décomplexée essaye de corrompre son confrère écologiste. Mais ils se font piéger par un groupe de jeunes activistes féministes qui réussit à les coller ensemble. Une folle nuit commence alors pour les deux hommes, unis contre leur gré

En même temps

 

Des vitraux aux couleurs vives envahissent l’écran alors que retentit l’hymne de Nina Hagen Naturträne et que défile le générique ; puis on devine des « morceaux » de fleur, des oiseaux et des feuilles…Ce préambule est-il annonciateur d’une utopie colorée, celle du « vivre ensemble » ? ou du moins  d’un projet, d’un cadre où s’exercerait la « communion » entre les êtres et la nature ?

Et voici son argument narratif loufoque : deux rivaux politiques « condamnés » à « marcher ensemble » tel un quadrupède car ils sont littéralement « collés » l’un à l’autre (pour ne pas dire « l’un dans l’autre »). Ainsi sera illustré -premier degré-  le slogan de campagne « en même temps » si cher à Macron ; une « conjugaison » au sens propre, à cause de ces « colle girls » (trois activistes féministes , "fuck le patriarcat")  et de leur glu…punitive drôlement efficace.

Nous allons suivre pendant une nuit, le tandem Didier Bequet (Jonathan Cohen) ou la droite décomplexée et Pascal Molitor (Vincent Macaigne) l’écolo mollasson plutôt bobo. Qu’ils soient en costume ou en « tenue de camouflage », au volant d’une voiturette électrique ou sur une trottinette (électrique elle aussi). Pour "sauver leur peau" (sens propre)  les deux comparses n’auront de cesse de chercher à se "décoller"  Et les consultations -traitées en longs plans séquences-, auprès d’une sophro, d’un véto, d’un tenancier de bar américain se donnent à voir, à lire comme autant de « vignettes » comiques  et  assassines, car le duo Kervern/Delépine épingle les travers d’une société déboussolée par des politiques incapables et en même temps tire à  boulets rouges sur TOUT (et ce malgré une fin paternaliste ….douteuse…ou politiquement correcte ???)

Un road movie (genre que le duo de cinéastes affectionne  depuis Aaltra) ponctué de formules savoureuses ou potaches

Un film qui malgré des excès, des situations lourdingues, (mais n’est-ce pas le propre de la caricature ?) et son enlisement parfois, plaide pour l’écologie et le féminisme !

Un film militant ??? à vous de juger

En cette année d’élection présidentielle en France, il nous paraissait utile de faire le point sur le pouvoir politique, en particulier local. En ce qui me concerne, mon père ayant été maire d’un bourg en Picardie pendant près de quarante ans, et suivant de près la vie de mon village en Charente, je trouvais intéressant de faire un portrait humain de ceux qui nous gouvernent. Avec leurs bonnes et mauvaises volontés. Leurs limites. Leurs angoisses aussi » (Benoît Delépine) 

Colette Lallement-Duchoze

 

petit florilège

communiste? je le fus la preuve j'ai vendu des chaussettes Che Guevara à la fête de l'huma

ai viré  à  l'extrême droite? c'est là qu'il y a le plus de blondes au mètre carré

c'est ça le grand remplacement : elles (les femmes) vont nous prendre tous nos boulots; avant elles passaient toutes à la casserole

le Ramadan c'est comme la fashion week on a l'impression que c'est tout le temps

je ne suis pas rigolo, le réchauffement climatique c'est pas rigolo

 

vous risquez la double déchirure

 

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5 avril 2022 2 05 /04 /avril /2022 13:36

de Cédric Klapisch (2022)

avec Marion Barbeau, François Civil, Hofesh Shech­ter, Mehdi Baki, Pio Marmaï, Muriel Robin…

 

Musique : Hofesh Shechter, Thomas Bangalter

 

Elise, 26 ans est une grande danseuse classique. Elle se blesse pendant un spectacle et apprend qu’elle ne pourra plus danser. Dès lors sa vie va être bouleversée, Elise va devoir apprendre à se réparer… Entre Paris et la Bretagne, au gré des rencontres et des expériences, des déceptions et des espoirs, Elise va se rapprocher d’une compagnie de danse contemporaine. Cette nouvelle façon de danser va lui permettre de retrouver un nouvel élan et aussi une nouvelle façon de vivre.

En corps

Le prologue nous immerge dans les coulisses de l’Opéra de Paris ( ce qui se "trame" juste avant le spectacle la Bayadère. ?)   Voici Cédric Klapisch en régisseur. Voici les danseurs qui "répètent" s'entraînent. Et  des coulisses à la scène, ce rideau épais, marqueur et symbole. Dans  les coulisses, une « découverte » traumatisante, la trahison amoureuse. Puis délaissant le réel (le trauma de l’infidélité) voici sur scène le « spectacle » mais  où « le réel » va reprendre ses droits.... Ce prologue assez long, fait d’allers et retours -entre le "vécu" des "artistes" et le spectacle censé transcender les contingences-, semble « encoder le film »  : à la double chute sentimentale et physique, un « double » sursaut salutaire ?  Et voici un générique plutôt « punk-rock » -en discordance totale avec le protocole de l’Opéra- et ce flottement où le rouge du rideau s’éploie en vagues à la fois submersives et subversives. Ralentis, déformation, décalage entre la musique et la danse ; on pourra être  séduit par ces « audaces » formelles! 

 

Fondée sur le principe de la « résilience », l’histoire de cette danseuse - doublement « blessée », condamnée peut-être à ne plus exercer son « métier », mais qui,  par un heureux concours de « circonstances » (le kiné adepte de médecines parallèles, la rencontre avec le chorégraphe israélien et la découverte de la danse contemporaine, les efforts conjugués de proches, un nouvel environnement, une famille de substitution)  et grâce à sa pugnacité, renaît progressivement à la vie à l’amour à la danse, est avouons-le,  une intrigue assez convenue

Et… truffée de clichés (cf les conseils /aphorismes de Josiane -Muriel Robin, les parallèles qui se suivent à un rythme de plus en plus rapide entre la préparation culinaire et les répétitions sous la houlette de Hofesh Schechter, les poncifs amoureux) auxquels on peut ajouter des éléments de « sous-intrigue » (réconciliation avec le père (Denis Podalydès), les flash-back  sur la mère disparue, la déception amoureuse du kinésithérapeute Yann (François Civil)

Et même ce mouvement inversé : de la mort à la vie (dans la nouvelle troupe Elise doit jouer un corps de femme morte alors que dans les ballets classiques elle interprétait des femmes allant vers la mort) est assurément trop appuyé

 

En revanche,  les scènes consacrées à la danse (classique, contemporaine, hip hop) frappent par leur énergie, leur fluidité. C’est dans leur élan oblatif que tous ces danseurs (pieds amarrés au sol ou pointes éthérées, corps désarticulés) communiquent une fureur, celle de Vivre.

 

Oui quand la « danse » est la vraie star , « en corps » est un film qui emporte l’adhésion

 

Non le tutu n’est pas cucul

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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3 avril 2022 7 03 /04 /avril /2022 09:25

de Diastème (2021)

 

avec Léa Drucker, Denis Podalydès, Alban Lenoir, Benjamin Biolay

Elisabeth de Raincy, Présidente de la République, a choisi de se retirer de la vie politique. À trois jours du premier tour de l'élection présidentielle, elle apprend par son Secrétaire Général, Franck L'Herbier, qu'un scandale venant de l'étranger va éclabousser son successeur désigné et donner la victoire au candidat d'extrême-droite. Ils ont trois jours pour changer le cours de l'Histoire.

 

Le monde d'hier

 

Quand bien même le réalisateur affirme ne pas "reproduire" une situation bien connue du public, trop de similitudes (maladie de la présidente, suicide d’un collaborateur, querelles intestines, corruption en haut lieu, complot russe et surtout montée de l’extrême droite), l’étroite collaboration avec les deux journalistes Fabrice Lhomme et Gérard Davet (qui ont côtoyé Sarkozy et Hollande) la sortie du film quelques jours avant le 10 avril, ne laissent aucun doute:  ce ne peut être pur hasard !

Mais  le monde d'hier n’est pas pour autant un film à clé…

 

Le cinéaste ne cesse d’alerter sur la montée de l’extrême droite et en mêlant plus ou moins habilement thriller politique et histoire d’amour, en structurant son propos de façon très théâtrale (3 jours, un lieu de prédilection:  les lambris d'un palais présidentiel, dialogues stylisés) dans une ambiance crépusculaire, il en illustre la fatale victoire….à moins qu’au moment ultime, on puisse  "enrayer le  pire"  En d’autres termes le film pose la question « légitime » « tous les moyens seraient-ils bons pour empêcher de donner le pouvoir à l’extrême droite ? La fin justifie-t-elle les moyens ?

 

Ainsi naît une « tension » (propre au thriller) qu’accentuent ces marches répétées dans les couloirs, la montée des escaliers, les gros plans sur les visages et leurs regards scrutateurs, et surtout les non-dits, les ellipses ou l’implicite.

 

Un monde se meurt, le monde d’hier (la référence à Stefan Zweig apparaîtra dans le générique de fin)

 

Et pourtant ce film ne convainc pas…

Certes les deux acteurs principaux Léa Drucker en présidente de fin de règne qui assume ses échecs et en mère courage ainsi que Podalydès en secrétaire général dévoué - personnage le plus puissant dans notre République- sont d’excellents interprètes. Masse inerte, Benjamin Biolay est à peine crédible en premier ministre désabusé et le garde du corps (Alban Lenoir)  -taciturne forcément taciturne- est souvent réduit à une caricature

Le plus déroutant toutefois n’est pas dans le jeu inégal des interprétations. Alors que nous sommes censés pénétrer dans les arcanes du pouvoir (les fameuses coulisses) et qu’un questionnement essentiel sur les chances de survie de la démocratie s’impose, Diastème semble survoler et parfois même prendre un plaisir malsain à évoquer des « incartades » (mélo)dramatiques (la présidente invite le député d’extrême droite à entrer dans le saint des saints, l’espace Jupiter haut lieu de la Défense,  pour lui signifier avec arrogance …qu’il n’y accédera jamais; la présidente en proie à un malaise, est filmée allongée sur l’herbe puis dans les bras du garde du corps à la manière de David Hamilton, le baiser volé dans l’embrasure de la porte, qui précède le saut fatal dans le Vide)° et que dire de ce coup de téléphone « magique » à l’homologue allemand  Heinrich qui va  "céder" sur une mesure écolo pour « contrecarrer » les USA? de cette musique illustrative et souvent boursouflée de Valentine Duteil ? de la diatribe contre « une internationale fasciste » ?on pourrait multiplier les exemples !!!

 

Condamnant l’extrême droite, le réalisateur rend   "humaine" voire "sympathique" - elle reconnaît d’ailleurs avoir « merdé » - une classe politique  "républicaine" hors sol, et partant ne se fait-il pas le chantre du "pouvoir en place"???

 

 « à voir à la rigueur »

 

Colette Lallement-Duchoze

 

Bien vu dans l'ensemble Colette, et je me suis demandé après la lecture de ta critique pertinente pourquoi j'avais tout de même passé un bon moment sans m'énerver....? justement parce que ces gens "d'en haut" sont montrés pour ce qu'ils sont : terriblement ordinaires, démystifiés de leur superbe, et on se dit, en tant qu électeur moyen, qu'il faut être toujours critique avec ceux et celles qu'on élit, que la méfiance et le doute devraient être les deux mamelles d'un vote citoyen responsable. Et surtout, ne pas les laisser s'installer plus d'un mandat. Le goût du pouvoir est diaboliquement nuisible à la bonne santé d'une république.
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2 avril 2022 6 02 /04 /avril /2022 06:37

de Kiro Russo (Bolivie, France, Qatar, Suisse 2021)

avec  Julio César Ticona, Max Bautista Uchasara, Fransisca Arce de Aro, Israel Hurtado, Gustavo Milàn Ticona

 

 

Prix spécial du jury Orizzonti Mostra de Venise 2021

Meilleur réalisateur meilleure photographie Festival du film d'auteur de Belgrade

meilleur réalisateur Bosphorus Film Festival 

Le grand mouvement

 

Exploitant toutes les possibilités,  toutes les  ressources de l’art cinématographique,  Kiro Russo crée une œuvre « unique » et stupéfiante. Certains spectateurs déboussolés ou réfractaires y verront peut-être un exercice de cinéma expérimental dont ils fustigeront la vacuité d’autres s’interrogeront sur l’apparente absence d’un fil directeur (sic)

Si l’on se fie aux propos du réalisateur (cf dépliant Gncr) le grand mouvement serait une recherche. Le cinéma est pour moi une recherche constante, esthétique et politique. Le grand mouvement est quelque chose d’organique mais qui implique le cinéma en tant que langage

Le long prologue en serait la parfaite illustration. Le cinéaste varie les positions de la caméra joue avec les « échelles » les raccords les angles de vue les couleurs mais aussi les «sons » (musique Apertura de Miguel Llanque et cacophonies du trafic urbain) Vue aérienne sur la ville de la Paz capitale de la Bolivie juchée à plus de 3000m d’altitude, puis zoom sur la compacité verticale et géométrique des immeubles et leurs façades géantes. Une ville apparemment inhumaine, une ville dédaléenne ; une ville grouillante (des vues en plongée sur les embouteillages) aux multiples enchevêtrements -câbles entrelacés, fils électriques des télécabines reliant la ville à la montagne- aux jeux d’anamorphoses (dues aux miroirs déformants). La ville « comme organisme vivant et indépendant »

Mais… Elle va être réduite en poussière !!! (c’est ce que prédit à plusieurs reprises Max le « sorcier-ermite »)

Avec l’entrée en scène  d’Elder le film s’oriente(rait) vers une fiction politique.

Atteint de silicose, condamné à périr, il incarne une classe ouvrière surexploitée (cf ces gros plans sur les visages des manifestants et leurs bouches éructant Mineur dans le sang, cœur de combattant)

Le mouvement de masse va se conjuguer aux mouvements individuels.  Elder, très affaibli, est comme "porté"  par ses camarades alors que simultanément le  "marcheur"  Max non seulement arpente les rues ou ruelles mais investit un espace inconnu (des abris sous terre, une escalade aux sommets). Avec ses allures de pèlerin encapuchonné il jouerait le rôle de samaritain, de chamane ou de "pythie". C’est lui qui "insufflera"  la vie dans le corps moribond d’Elder. De même la présence récurrente d’un chien blanc dans la noire vastitude ou les changements de rythme à partir d’hallucinations sont comme une échappée vers le fantastique.

Mais le cinéaste lie étroitement TOUS les aspects qui s’imposent aux yeux éberlués du spectateur, en une exploration visuelle et sonore (les visages deviennent des paysages, les habitants et employés du marché coloré sont les danseurs d’une nouvelle chorégraphie urbaine alors que les montagnes austères sont devenues des cathédrales et la critique de l’exploitation de l’homme réduit à l’esclavage alors qu’il exerce un travail de titan n’en est que plus féroce) Forces telluriques chtoniennes et apolliniennes se conjuguent dans cette dénonciation. A un moment le rythme accéléré des dispositifs de la mine (découpage, tapis roulant) et le raccord avec le hachoir à viande (filmé en très gros plan) sont comme la parabole du "broyage" de l’humain (séquences revisitées d’ailleurs par Elder en état de choc cérébral)

 

Le grand mouvement un film à ne pas rater !!

 

Colette Lallement-Duchoze

 

 

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27 mars 2022 7 27 /03 /mars /2022 06:44

de Kenneth Branagh (Grande Bretagne 2021)

avec Jude Hill Jamie Dornan, Caitriona Balfe, Ciarán Hinds, Judi Dench

 

Irlande Été 1969 : Buddy, 9 ans, sait parfaitement qui il est et à quel monde il appartient, celui de la classe ouvrière des quartiers nord de Belfast où il vit heureux, choyé et en sécurité. Mais vers la fin des années 60, alors que le premier homme pose le pied sur la Lune et que la chaleur du mois d’août se fait encore sentir, les rêves d’enfant de Buddy virent au cauchemar. La grogne sociale latente se transforme soudain en violence dans les rues du quartier. Buddy découvre le chaos et l’hystérie, un nouveau paysage urbain fait de barrières et de contrôles, et peuplé de bons et de méchants.

Belfast

Une vue aérienne en couleurs sur la ville de Belfast aujourd'hui  (en écho lui répondra le plan final) Ainsi s’ouvre le film de Kenneth Branagh. Mais ces premières photos censées mettre en valeur l’aspect cinégénique de la ville, l’enferment plutôt dans des images-clichés pour touristes !!! et d’emblée elles peuvent mettre mal à l’aise certains spectateurs….

Puis passage au noir et blanc ; la couleur «NB » du flash back serait-elle forcément celle du passé ? alors que des extraits de films – de l’époque- sur petit écran sont restitués en couleurs ???

Eté 1969. Voici Buddy enfant (le double de Kenneth Branagh?) au sein d’une famille aimante (parents et grands-parents pleins de sollicitude) et parmi des camarades d’école ou de jeux. Lui qui "joue" à la « guerre » -contre les dragons- armé d’un écu de pacotille n’a d’yeux que pour la belle Catherine et leur différence de religion (lui, protestant, elle, catholique)- n’a  aucune incidence sur « le cours des choses ». Un univers quasi édénique !! Et soudain la violence !!! Celle des affrontements entre catholiques et protestants.- qui veulent « dégager » les premiers de leur quartier. Un embrasement incompréhensible pour  Buddy; hébété il  s’en évade par des "images" celles des salles de spectacle celles du petit écran (émerveillé il découvre entre autres les « classiques » de la production hollywoodienne et les "stars" John Wayne, Gary Cooper,  Raquel Welch)

 

Une  plongée dans l’enfance -comme dans Hope and Glory de John Boorman-,  un retour aux  "sources"  de la "création"? -découvrir le  cinéaste qu’il sera ? ou du moins  montrer comment cette  période trouble, tragique aura joué le rôle de creuset, de gestation (initiation aux comics, à Shakespeare grâce à la grand-mère) pour l’œuvre à venir.?  Peut-être. Mais si tel est le cas avouons que chez Kenneth Branagh (à l'opposé de Boorman)  tout semble « faux » « artificiel » Ici on pourrait énumérer des « dysfonctionnements » en dresser le catalogue (de l’utilisation du noir et blanc jusqu’au simplisme censé définir tel ou tel personnage en passant par le choix d’une succession de « vignettes » que lustrerait ce fameux temps mécanique allié qu’on le veuille ou non au temps intérieur). Contentons-nous de « cerner » le personnage principal, l’enfant, puisque tout est censé être filmé de son point de vue (pour la vraisemblance). Non pas à travers mais par ses yeux (d’où l’abondance des plongées et contre plongées). Or ce qui choque c’est moins l'absence de  questionnement sur les « troubles » (euphémisme) -questionner et contextualiser seraient l’apanage des adultes- que le manque d’imagination, de folie, à tel point que Belfast sue la mièvrerie le formatage bien propret (celui qui colle à Buddy et partant, à la plupart des autres personnages)

 

Mais si le dilemme « partir/ rester» est la thématique essentielle,  alors oui le questionnement est plus recevable. Le père protestant amené à travailler en Angleterre est souvent absent-. Pacifiste, il refuse de participer aux « émeutes » de ses coreligionnaires, de s’enrôler chez les orangistes et devient de facto une cible (par ricochet les siens sont inévitablement visés). Le choix sera douloureux mais c’est celui de la « survie « 

 

Le battement vital s’amenuise ou s’amplifie : c’est la leçon de la grand-mère tapie dans l’embrasure d’une porte quand démarre le bus vers un ailleurs !!!

 

Impression  plus que mitigée

 

Colette Lallement-Duchoze

 

 

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25 mars 2022 5 25 /03 /mars /2022 17:46

de Hélier Cisterne (France 2020)

avec Vincent Lacoste, Vicky Krieps, Jules Langlade, Marc Brunet

 

libre adaptation du roman de Joseph Andras 

Alger, 1956. Fernand Iveton, 30 ans, ouvrier indépendantiste et idéaliste, est arrêté pour avoir déposé une bombe dans un local désaffecté de son usine. Il n’a tué ni blessé personne, mais risque pourtant la peine capitale. La vie d’Hélène, devenue la femme d’un « traître », bascule. Elle refuse d’abandonner Fernand à son sort

De nos frères blessés

Il est des films rares qui savent allier maîtrise parfaite du savoir faire cinématographique avec œuvre de mémoire historico-politique. C'est le cas de l'adaptation réussie par le jeune cinéaste Hélier Cisterne, du beau roman de Joseph Andras.

La réalisation est sobre avec des acteurs qui ne surjouent jamais, à la fois touchants de simplicité et pleins de charme (notamment l'actrice Vicky Krieps au délicieux accent polonais). Ils nous emportent dans une histoire vraie qui s'achève en 1957, grâce à un montage souple, habile, où le flash-back se mêle en permanence au présent.

 

D'emblée le film commence par l'exécution capitale de Fernand Iveton, en 1957 à Alger, condamné par un tribunal militaire à la guillotine,  pour avoir commis un attentat (sans aucune victime) dans un local désaffecté pour protester contre la guerre coloniale que menait la France du président René Coty à ce moment-là. Rappel historique au générique de fin : 142 opposants à l'oppression ont été  guillotinés, 54 exécutions signées par le ministre garde des Sceaux de l'époque : François Mitterrand, malgré les demandes en grâce de nombreuses personnalités intellectuelles et pacifistes .

 

Il est bon qu'un film qui est avant tout une très belle histoire d'amour tragique résonne aussi dans notre présent. Ces gens qui applaudissent au tribunal à l'annonce de la peine, devant la compagne effondrée, ne sont-ils pas les mêmes qui aujourd'hui applaudissent dans les meetings d'extrême droite, les cracheurs de haine et d'anti-progrès ?

 

Saluons dans ce film la reconstitution d'Alger des années 50, les ruelles, la mixité, la cohabitation entre les Français pieds noirs et les Arabes travaillant dans la même usine, le mélange de calme et de répression, la peur, la torture (mais jamais montrée), l'amitié et l'amour. Loin de tout style militant il nous fait vivre de l'intérieur l'héroïque engagement d'un ouvrier Français, qui comme Albert Camus, se sentait aussi Algérien, et défendait la dignité, l'envie d'un bonheur simple dans un monde juste.

 

On sort de la séance estomaqué et plein de questionnements sur cette époque si proche où la France se conduisait comme la Russie d'aujourd'hui.

 

Serge Diaz

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24 mars 2022 4 24 /03 /mars /2022 12:28

premier long métrage d'Omar El Zohairy (France Egypte Pays-Bas Grèce 2021)

avec Demyana Nassar, Samy Bassouny, Fady Mina Fawzy, Abo Sefen Nabil Wesa, Mohamed Abd El Hady 

 

 

Semaine de la critique Cannes 2021 Grand prix Nespresso, Prix FIPRESCI (fédération internationale de la presse cinématographique) 

Journées cinématographiques de Carthage Tanit d'or, Prix du meilleur scénario, Prix de la meilleure actrice 

Festival du film de Turin 2021 prix spécial du jury 

 

Une mère passive, dévouée corps et âme à son mari et ses enfants. Un simple tour de magie tourne mal pendant l'anniversaire de son fils de quatre ans, et c'est une avalanche de catastrophes absurdes et improbables qui s'abat sur la famille. Le magicien transforme son mari, un père autoritaire, en poule. La mère n'a d'autre choix que de sortir de sa réserve et assumer le rôle de cheffe de famille. 

Plumes

 

Le film s’ouvre sur une scène d’immolation (rappel des printemps arabes ? et du soulèvement ?) c’est le prologue! Un no man's land. Extérieur nuit  .

Et ce sera un décor de suie de fumée de noir de crasse qui prévaudra tout au long du film. Un environnement-dépotoir ? C’est bien une image sinistre glauque de l’Egypte qui s’affiche ainsi dès le début. Il en va de même quand nous pénétrons dans un appartement exigu spartiate insalubre -mais où dominent l’ocre et le sépia avec des effets de lumière diffractée et des aplats blancs-; microcosme où s’exerce la domination du « chef » de famille (il donne avec parcimonie à son épouse l’argent nécessaire à l’achat de denrées). Une épouse soumise qui exécute les tâches « ménagères » (lessiver cuisiner) et accomplit son « rôle » de mère éducatrice (3 enfants dont un en très bas âge)

Lors de la fête anniversaire d’un fils, un magicien de seconde zone fait « disparaître » le père…. ( il sera transformé en "poule") …Mais  ce faux(?) magicien est incapable de donner un  "contre sortilège" ! Cette intrusion du  "fantastique"  (surréalisme ?) va accentuer la précarité de la famille.

De personnage subalterne,  la mère devient la "cheffe" . La voici en quête d’argent pour payer le loyer (sous peine d’expulsion) en quête de nourriture, en quête de travail, en quête du  "magicien"  et ….à la recherche de son mari ou du moins d’un remède; alors que l’appartement s’est rétréci  -une chambre étant réservée au volatile, gallinacé  impavide qu'il faut soigner et ..nourrir-

 

Sobriété de la mise en scène, économie des dialogues, présence d’acteurs non professionnels, un point de vue unique -celui de la femme -soumise, regard  baissé, dont le visage ne s’illuminera d’un sourire qu’au final-,  ce premier long métrage de Omar El-Zohairy frappe par son mélange de réalisme -sordide-, de tragique mais aussi de fantastique… loufoque (qui peut évoquer  Roy Andersson)

 

Il faut saluer le travail sur la lumière et la composition des plans -le plus souvent fixes- (certains ressemblent à des natures mortes tout en "reflétant"  l’état d’esprit de la femme). En revanche l’espace sonore peut être saturé (amplification parfois outrancière des cris, vagissements, vrombissements de voitures et camions, heurtoirs ); et certains  très gros plans m’ont paru complaisants (même si nous sommes censés voir le sang, les ecchymoses et blessures sur ce corps de SDF troqué contre la poule, ou encore les crânes à l'abattoir à travers le regard grossissant de la mère)

 

 « Plumes est l’histoire d’une mutation obligatoire, un changement de nos comportements sociaux qui nous concerne tous, pas seulement les habitants de mon pays. Mon histoire peut se dérouler n’importe où et peut arriver à n’importe lequel d’entre nous » (Omar El Zohairy)

 

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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