9 mars 2023 4 09 /03 /mars /2023 06:53

d'Elena Lopez Riera  (Espagne 2022)

avec Luna Pamies, Barbara Lennie, Nieve de Medina 

 

musique Mandine Knoepfel

 

Présenté au festival de Cannes 2022 Quinzaine des Réalisateurs

C'est l'été dans un petit village du sud-est espagnol. Une tempête menace de faire déborder à nouveau la rivière qui le traverse. Une ancienne croyance populaire assure que certaines femmes sont prédestinées à disparaître à chaque nouvelle inondation, car elles ont « l'eau en elles ». Une bande de jeunes essaie de survivre à la lassitude de l’été, ils fument, dansent, se désirent. Dans cette atmosphère électrique, Ana et José vivent une histoire d'amour, jusqu'à ce que la tempête éclate...

El agua

 

Qu’un fleuve tombe amoureux d’une femme et l’emporte avec lui dans l’impétuosité de ses flots c’est ce que viennent confirmer face à l’écran ces femmes à intervalles réguliers : plan fixe, elles disent -et miment de leurs gestes- cette fougue dévastatrice et « amoureuse » ; une légende incarnée et comme ancrée dans le réel? paroles de femmes et images d’archives télévisuelles (l’inondation de1987) comme si le réel (nous sommes à Orihuela province de Murcie), allait à la rencontre d’un récit et simultanément comme si ce récit fictionnel devait être documenté.

 

Ana va incarner cette Eve nouvelle et qui sait ? se laisser dompter par le fleuve ou lui résister ? Fleuve Segura dont les colmatages de fortune (la préparation du plâtre par Jose et son père scelle aussi leur réconciliation) ne résistent pas à sa puissance destructrice (cf la dernière séquence)

 

El agua, l’eau, cet élément liquide dont on connaît toutes les connotations liées à la femme (légendes peuplées de sirènes de nymphes ; liquide amniotique;  l’eau à la fois purificatrice source de vie guérisseuse protectrice et destructrice, etc…). Entourée de sa mère et de sa grand-mère, donc comme en symbiose avec la tradition, le corps embrasé par la fougue amoureuse, Ana incarnerait les deux éléments eau et feu, tout en vénérant certaines idoles religieuses (Sainte Rita au grand dam de Jose son amoureux). Comme la plupart de ses amis (on rit on boit on fume on danse) elle désire « partir ». Partir serait aussi s’émanciper !

 

El Agua : une romance, le temps d’un été dans un village qui suinte l’ennui

 

El agua: une légende « charriée par un fleuve qui devient la métaphore d’une jeunesse en plein désarroi » interprétée par des acteurs pour la plupart non professionnels.

 

Hélas ce premier film n’est pas à la hauteur de ses ambitions : trop de thématiques abordées, ce qui surcharge le scénario   et/ou  accentue son  "manque de relance" ; et le mélange fiction, histoire sentimentale, réel revisité, légende, qui impose aussi de mixer différentes tonalités -réalisme naturalisme et fantastique amplifié par la bande-son-  fait que la mise en scène manque (trop) souvent d'originalité ! 

 

Dommage !

 

Colette Lallement-Duchoze

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3 mars 2023 5 03 /03 /mars /2023 13:32

de Gustav Machaty (1929 Tchécoslovaquie )

 

avec  Karel Schleichert : Le cheminot Ita Rina : Andrea Olaf Fjord : George Sydney Theodor Pištěk : Hilbert Charlotte Susa : Gilda

 

Présenté en soirée d'ouverture au festival à L'Est (17ème édition) avec accompagnement musical en live

Groupe In Fine (  duo instrumental, avec entre autres  trompette, flûte à bec,  bugle)

Andrea, la fille d'un garde-barrière est séduite par un étranger. Mais l'homme l'abandonne en la laissant enceinte. Elle épousera alors un homme rencontré au cours d'une nuit dramatique. Plus tard, elle retrouvera son séducteur...

 

Erotikon

Erotikon. C’est la marque du parfum que le voyageur séducteur offre à la fille du garde-barrière- lequel venait d’accepter du whisky et un briquet !! Un parfum aux subtiles fragrances, qui agirait tel un élixir? à la limite peu importe ! Le titre met en exergue le triomphe de la séduction, du désir, par-delà les convenances morales !! Erotisme ou la concupiscence filmée dans l’audace de la suggestion : voici Andrea seule allongée sur son lit ; elle se pâme, son corps vibre de l’attente amoureuse…Et pour la « scène d’amour » voici des plans fragmentés, des chevelures que les mains triturent, un fondu enchaîné des deux visages, un regard dilaté, une caméra qui épouse le mouvement du corps, et après un fondu au noir, voici les deux amants se prélassant avec une cigarette. Désir palpable à fleur de peau, à fleur d’extase ! Une aimantation illustrée (redondance métaphorique ? peut-être) par le gros plan sur ces deux gouttes d’eau allant à la rencontre l’une de l’autre sur la vitre  (à moins que l’élément liquide ne s’inscrive dans une autre suggestion !)

Tout cela concerne surtout la première partie. Andrea sera délaissée par l’amant volage -qui croit se « dédommager » en donnant de l’argent (à noter que la missive est apportée par un facteur dont on ne voit que l’ombre …) Elle devra tout assumer, seule. Figure de la transgression? Mariée, elle rencontrera à nouveau l’amant et usera de subterfuges pour forcer une rencontre ! Andrea la jeune femme abusée, Andrea la  séductrice !

Après plusieurs ellipses temporelles (avec fondu au noir) lors d’une soirée dansante elle délaisse son époux : les touches du piano et du saxo se meuvent agiles et muettes , et les corps des ex amants dans une langoureuse étreinte ressuscitent pour l’assouvir le désir -au grand dam de la maîtresse (le comique de situation ne minimise pas pour autant la force de l’excitation sexuelle)

Le corps contre la raison. Corps que la caméra se plaît à capter, suave, dans ses fragments d’attentes fébriles (visage genoux main regards) Erotikon

 

Le train qui revient à intervalles réguliers dit à la fois la prégnance de la machine dans l’univers cinématographique des années 1920 et la symbolique d’une marche inéluctable vers ??? Ici, en outre, il permet de relier – tout en les opposant- la stagnation d’un monde de labeur et l’effervescence du milieu urbain (hôtels, salles de jeux, salons de coiffure, tailleur).

Une main tendue qui dit adieu alors que les lignes aériennes et les rails (voies ferrées qui se croisent) dessinent leur implacable linéarité ; une main qui se tord de douleur (lors de l’accouchement) ; la même main s’était tordue de plaisir – et en surimpression tel un flashback revient l’image du baiser.

Le film est ainsi traversé d’effets spéculaires que renforcent les éléments dits naturels (dont la pluie dévastatrice ou annonciatrice de ?  et l’orage) 

Une « fin » « ouverte » , une fin qui  se prête à un « nouveau » départ, 

La morale serait-elle sauve ?  Que nenni !!!

 

Colette Lallement-Duchoze

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2 mars 2023 4 02 /03 /mars /2023 09:00

de Li Ruijun (Chine 2022)

avec Wu Renlin et Hai-Qing

Dans la campagne chinoise, province  de Gansu. C'est l'histoire d’un mariage arrangé, entre deux êtres méprisés par leurs familles. Entre eux, la timidité fait place à l’affection. Autour d’eux, la vie rurale se désagrège…

Le retour des hirondelles

Quelle grâce dans la disgrâce ! Quel émerveillement dans la réappropriation de soi par soi ! Quelle humanité dans cet univers rural que des potentats locaux tentent de désagréger au profit de … ! Oui le retour des hirondelles (le titre français est plus poétique que la simple traduction du titre anglais  Retour à la poussière) ne peut que séduire. Le réalisateur ne verse jamais dans le misérabilisme (et pourtant, la rusticité d’un autre âge, la rudesse du labeur avec des moyens rudimentaires, s’y prêtaient) ni la violence (et pourtant elle est bien prégnante dans l’exploitation des faibles, dans leur vampirisation dont le « don du sang » serait la « métonymie », elle est tangible dans le comportement des propriétaires usuriers, dans les dépossessions successives auxquelles est soumis le couple !!)

 

Nous assistons au triomphe de l’humain -par-delà l’injustice liminaire et les tourmentes, avant que les dunes de sable n’enfouissent l’âpreté du réel dans leur tombeau. Un film irrigué par des forces contradictoires, et par une tendresse qui n’exclut pas l’indignation, car le réalisateur propose -pour ne pas dire  "impose "- une vision très inquiète -pour ne pas dire "désespérée"  du monde paysan (on comprend pourquoi le film a été « censuré », tant il va à l’encontre du discours politique qui prône la « fin de la pauvreté absolue »,  mais aussi parce qu’il démontre qu’un « damné » de la terre préfère le contact avec la nature  au  croupissement dans les « clapiers » modernes de la ville)

 

Voici un couple d’éclopés, de « parias ». Un mariage « arrangé ». Lui c’est Ma Youtie (Wu Renlin ) surnommé frère Quatre par les villageois moqueurs de la province de Gansu. « Vieux célibataire », il est contraint d’épouser Cao Guiying (Hai -Qing), une femme handicapée et incontinente, suite aux maltraitances infligées par sa famille! . Qu’à cela ne tienne ! le couple va se  "construire" tout comme se "construit" leur  maison, alors que démolitions et déconstructions sont programmées. La caméra les suit dans leur quotidien. Dans leur intimité -pudeur tendresse en lieu et place de contact charnel ; l’œil de l’objectif est devenu caresse, une caresse comparable à celle que prodigue le couple sur l’encolure de l’âne. En extérieur surtout, dans tous les travaux  " agricoles" - retourner la terre, semer, récolter, etc. Rudesse du labeur dans des espaces arides sublimés grâce à la composition des plans (d’abord cadres dans les cadres puis élargissement en harmonie avec l'indéniable somptuosité de l'environnement) , le choix des couleurs (avec la dominante verte et ocre, ocre qui s’en vient contaminer la carnation des visages) et les effets de lumière (selon les moments de la journée ou les saisons).

 

Le réalisateur originaire de la région de Gansu (au sud de la Mongolie) aura assisté (et il nous aura entraîné dans son sillage) à une douloureuse destruction de la culture ancestrale, de cette osmose entre paysans et nature -incarnée par un couple de « parias » humble et aimant, déroutant de beauté fruste,  un couple bouleversant, tout simplement

 

Colette Lallement-Duchoze

Extraits du dépliant   "ARP et GNCR présentent" (ARP= auteurs réalisateurs producteurs; GNCR = groupement national des cinémas de recherche)

"Le titre chinois du film signifie "caché dans le pays des cendres et de la fumée". Cela signifie que les époques passées les vies passées n'ont pas disparu. Elles sont tout simplement enfouies dans les cendres. Ce que nous ne voyons plus ne cesse pas pour autant d'exister"  

Je retourne toujours filmer la terre où je suis né. Les deux héros de mon film viennent d'une campagne que les habitants ont désertée. Ils ont tous pris le train pour la ville. Mes deux protagonistes ont raté ce train"

"nous avons tourné le film au rythme des saisons, en suivant le cycle des cultures et des migrations d'oiseaux. Avec l'aide de l'acteur principal Wu Renlin, qui est mon oncle, de son fils qui joue le second neveu, ainsi que de mon frère et de mon père, nous avons construit la ferme et fait pousser les cultures jusqu'à leur moisson. Nous avons travaillé comme des paysans et consacré notre temps à la terre comme les héros du film. Nous avons tourné durant 85 jours de mars à octobre 2020. La pandémie a mis à mal notre production...

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24 février 2023 5 24 /02 /février /2023 05:53

documentaire réalisé par Zheng Lu Xinyuan (Chine Autriche 2022)

Début 2020, l’épidémie de covid-19 immobilise brutalement la réalisatrice et sa petite amie Zoé dans une chambre d’hôtel en Autriche. Alors qu’elle observe les rares passants sous ses fenêtres, Xinyuan se remémore progressivement un voyage à Mandalay qu’elle fit avec sa grand-mère au printemps 2018 pour assister au mariage d’un parent. En 2021, le coup d’État qui installe les militaires à la tête du Myanmar devient subitement très proche. Le film n’a de cesse de faire des allers-retours entre l’ici et l’ailleurs, entre l’intime et l’Histoire, entre le souvenir et le présent.

Jet Lag

Un documentaire  multiforme qui mêle vidéos familiales images piochées sur internet, captures d’écran, extraits de caméra de surveillance, avec au centre ce récit filmé dans la solitude d’une chambre d’hôtel -chambre que la réalisatrice partage avec son amie, en Autriche.

Un film qui abolit les repères spatio-temporels (nous sommes d’une image à l’autre dans le passé celui de la grand-mère à la recherche de son père mort en Birmanie dans les années 1940, dans le présent du confinement en Autriche mais aussi en Chine) et vers la toute fin un questionnement  sur la force du langage (séance d’apprentissage de la langue, séance d’écriture où des étudiants doivent évoquer leurs souvenirs douloureux en anglais !!!)

La cinéaste et sa compagne (souvent filmées dans leur nudité) s’approprient le réel et l’imaginé, le réel et le ressuscité, dans un flux mémoriel qui grâce à l’alchimie du montage donne à voir une œuvre pour le moins étrange sous forme de condensé (presque au sens chimique du terme) qui est à la fois journal intime documentaire pamphlet politique

Juste avant le générique voici un préservatif gonflé trituré jusqu’à exploser et dans les bris de son éclatement va apparaitre le titre du film. Un ballon une bulle, images récurrentes présentées à la fois dans leur dénotation (bulles d’enfermement, combinaisons des agents de la sécurité en Chine ou des professionnels de la santé) et leur connotation (bulles et bouffées de souvenirs, bulles phylactères où le mot peut être remplacé par une image incongrue, bulle existentielle)

Oui si décalage il y a (traduction littérale de jetlag) c’est bien au niveau de nos perceptions ou du moins de celles qui nous sont imposées (réagirons nous comme le père qui refuse la proximité de la caméra, l’œil intrusif de sa fille ??)

Une merveille ! un exploit esthétique qui défie beaucoup de « règles » selon certains spectateurs,

Alors que pour d’autres « le propos se délite, l’intérêt se perd, seule reste la forme hélas pas aussi esthétique qu’espéré »  (David Fontaine canard enchaîné 22/02/2023)

A vous de  juger  !!!

 

Colette Lallement-Duchoze

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23 février 2023 4 23 /02 /février /2023 07:29

de T Strugar Mitevska (2022 Bosnie Croatie) 

 

avec Jelena Kordic Kuret, Adnan Omerovic Labina Mitevska Ana Kostovska  Senjia Marinkovic, Izudin Bajrovic

Sarajevo, de nos jours. Asja, 40 ans, célibataire, s'est inscrite à une journée de speed dating pour faire de nouvelles rencontres. On lui présente Zoran, un banquier de son âge. Mais Zoran ne cherche pas l'amour, il cherche le pardon....

L'homme le plus heureux du monde

Des hôtesses en robe  "panthère", des chemises roses et des étiquettes nominatives pour les "candidats à l’amour" des jeux dits de « socialisation », tel est le rituel auquel Asja doit se soumettre, après son inscription au speed dating. Le décor ? un hôtel de style  "brutaliste"  celui qui avait triomphé après la Seconde Guerre mondiale.

Une mise en scène forcément "complexe": "diriger" tant de personnes, dans un huis clos, implique de changer d’angles de vue, de rythme, de cadrages, d'alterner duos et scènes de groupe, allers et retours -wc/ salle, salle conférence/salle à manger ; et hors de la salle voici tel une acmé. Asja filmée en plongée, danser avec frénésie au milieu d’un groupe de jeunes, avant que l’organisateur ne lui fasse comprendre qu’elle "n’est pas à sa place"  -elle était censée "retrouver" ses 17 ans, cet âge d'avant la "catastrophe" !!

 

Ambiance "joyeuse" bon enfant ? Légèreté de bon aloi -celle de la bonne humeur qui baptisera voire scellera les « nouvelles » rencontres ; légèreté que la réalisatrice saura faire voler en éclats avec un sens de la dramaturgie ; car dans ce huis clos, (une unité de lieu qui se conjugue avec les deux autres unités de temps et d’action) nous allons suivre les différents étapes comme autant de chemins vers les révélations, comme autant de cercles concentriques, pour que soit rendue palpable cette double cicatrice : celle d’une blessure -qui lacère le dos de l’ex victime-, celle d’un tourment intérieur qui hante la conscience de l’ex bourreau. Et la comédie vire au drame ! une question reste en suspens après la « démolition" (sorte de table rase) par Asja d’un équilibre précaire, le pardon est-il possible  30 ans après les faits ?

 

Certains "indices" avaient "alerté"  le spectateur : ce très gros plan sur une nuque que des mains croisées triturent et quand le plan s’ élargit nous voici avec cet homme au dernier étage d’un immeuble comme si nous étions happé avec lui par le vide ; -en fait il regardait la silhouette d’une femme en jupe verte traversant un chantier, et nous allons emboîter le pas de cette femme filmée de dos  (deux  ou trois métonymies, deux ou trois fragments -la nuque le dos et les jambes- pour un tout ???) ; voici des excavations -vues en plongée- pour signaler la "reconstruction"  d’une ville, comme celle d'une population ? en contre plongée un cimetière témoin douloureux d’un passé relativement récent! 

Passé/présent, une ambivalence qui est aussi la dynamique de ce film traversé et comme irrigué par des "forces" antagonistes -individu/collectif, réparation/pardon, mémoire/oubli. Oui la ville de Sarajevo est toujours hantée par son siège ; oui la Serbie la Bosnie la Slovénie la Croatie sont toujours hantées par la guerre et ses traumatismes. Sont-ils indélébiles ? Oui. Peuvent-ils, ces traumatismes,  cohabiter avec une forme d’apaisement -voire de réconciliation ? Oui peut-être. Dire et pardonner serait-ce la "leçon" de ce film (ce qu'illustreraient  la superposition des deux  "confessions" puis l'étreinte des deux corps)

 

Ce film au titre ironique , et dont le huis clos serait comme le microcosme d'un pays, est  servi par l’admirable interprétation des deux acteurs principaux : Adnan Omerovic (Zoran, un anti-héros qui porte les stigmates de la douleur et de l’attente angoissée) Jelena Kordic Kuret (Asja décontenancée par les révélations de son compagnon de "jeu"  mais toujours "combative" !)

Un film qui s’inspire du vécu -ô combien hallucinant !- de la co-scénariste de Teona Strugar Mitevska

Un film que je vous recommande -malgré quelques bémols (cf. les plans trop insistants sur les jambes le dos les pieds d’Asja -quelles qu'en soient les connotations-,  la couleur verte comme filtrée qui au début contamine le décor)

 

Colette Lallement-Duchoze

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22 février 2023 3 22 /02 /février /2023 07:11
Des films, des avant- premières, des rencontres

 

Cinéma Omnia 20 rue de la République 76000 ROUEN

 

 

Mercredi 1er mars

18h L'Eden (VOST) d'Andrés Ramirez Pulido

20h30 NightSiren (VOST) de Tereza Nvotová - en présence de la réalisatrice

 

Jeudi 2 mars

18h Un varon (VOST) de Fabián Hernández

20h30 Chili 1976 (VOST) de Manuela Martelli - en présence de la réalisatrice

 

Vendredi 3 mars

18h Une affaire de coeur, la tragédie d'une employée des PTT (VOST) de Dušan Makavejev - présenté par le critique Marko Mormil

20h30 L'île (VOST) d'Anca Damian - en présence de la réalisatrice

 

Samedi 4 mars

10h30 La poupée (VOST) de Wojciech Has

16h La nature (VOST) d'Artavadz Pelechian

18h My love affair with marriage (VOST) film d'animation de Signe Baumane

20h30 Los reyes del mundo (VOST) de Laura Mora - en présence des deux co-producteurs

 

Dimanche 5 mars

11h Navigators (VOST) documentaire de Noah Teichner - en présence du réalisateur

16h Il boemo (VOST) de Petr Václav

Kinepolis centre commercial Saint-Sever 76100 ROUEN

 

mercredi 1 mars

20h Porno Melancolia de Manuel Abramovich (Argentine) 

 

jeudi 2 mars

20h Luxembourg, Luxembourg de Antonio Lukich   (Ukraine)

 

vendredi 3 mars

20h   Blanquita de Fernando Guzzoni (Chili)

 

samedi 4 mars

14h Silent Land de Agnieszka Woszcynska  (Pologne)

18h Tigru de  Agnieszka Woszcynska  (pologne)

 

Auditorium du Musée des Beaux-Arts  26 bis rue Lecanuet 76000 Rouen

 

jeudi 2 mars

18h Fokus Maria Silvia Esteve   Silvia (Argentine)

20h Fokus Dusan Makavejev  L'homme n'est pas un oiseau  (Serbie)

 

vendredi 3 mars 

19h30     Fokus Maria Silvia Esteve  Spiral & Criatura (Argentine)

 

samedi 4 mars

16h Compétition Made in Normandie

                                 france.alestfestival.com

XVII FESTIVAL DU FILM D'EUROPE CENTRALE ET ORIENTALE (28/02/2023 --05/03/2023)
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20 février 2023 1 20 /02 /février /2023 15:47

Documentaire  réalisé par  Delphine Seyrig  (1977  sortie 1981 Version restaurée sortie 2022) 

avec Jenny Agutter : Juliet Berto :  Ellen Burstyn :Candy  Clark :  Jill Clayburgh : Patti D'Arbanville :  R. de Gregorio : Marie Dubois  Louise Fletcher :  Jane Fonda : Luce Guilbeault : Shirley MacLaine :  Mallory Millet-Jones :  Maidie Norman : Millie Perkins  Rita Renoir : Delia Salvi :  Maria Schneider :  Barbara Steele :  Susan Tyrrell : Viva :Anne Wiazemsky : Cindy Williams

 

Delphine Seyrig s'entretient avec vingt-quatre actrices françaises et américaines sur leurs expériences professionnelles en tant que femmes, leurs rôles et leurs rapports avec les metteurs en scène, les réalisateurs et les équipes techniques. Bilan collectif plutôt négatif en 1976 sur une profession qui ne permet que des rôles stéréotypés et aliénants

Sois belle et tais-toi

Elle est et restera hors champ , elle filme en frontal, longs plans fixes sur les visages de ces actrices, actrices qui -sans se rencontrer-, sans se concerter- disent toutes leur écœurement, face aux injustices et aux discriminations sexistes dans le monde du cinéma ; et c'est là que prend forme  un discours éminemment "politique". Pour le faire advenir dans toute sa puissance Delphine Seyrig a refusé toute fioriture, tout mouvement de caméra, toute plongée dans l'environnement "la parole rien que la parole et un visage " démultiplié" .

Contrairement  à   Carole Roussopoulos qui aurait aimé filmer des maisons, par exemple   ou faire virevolter une caméra , Delphine Seyrig  est restée intransigeante  “non, je veux qu’on cadre le visage de ces femmes, en plan fixe”.  On donne pour la première fois la parole à des femmes qui ne l’ont jamais eue auparavant, on doit avoir les meilleures conditions pour se concentrer sur leurs propos. Pas de distractions.” 

Un cadrage rigoureux donc !  un cadrage pour l'émergence du verbe refoulé 

"sois belle et tais-toi"  un   titre explicitement machiste  que le film/documentaire  fait voler en éclats

Vous allez entendre des  "Paroles d'actrices, des  paroles de femmes "  c'était en  1976  !!!!

.L’objectif est simple : déceler et abattre les clichés pour tenter de réduire cette domination. Ne serait-il pas l'ébauche du test de Bechdel ? Line Peyron Productrice

 

Colette Lallement-Duchoze

 

 

 

 

 

 

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17 février 2023 5 17 /02 /février /2023 21:03

SynopsisBrahim est un jeune homme secrètement gay. Il est aussi la joie de vivre de sa mère, qui espère qu'un jour il trouvera l'amour de sa vie, il deviendra père de famille et les rendra tous fiers. Lors de la fête d'anniversaire de sa mère, les tensions autour de sa sexualité non acceptée deviennent insupportables. Brahim fuit la maison familiale qui lui est oppressante. Cette nuit-là, une terrible rencontre va tout changer."

Animals

Silence quasi sépulcral à l’issue de la projection, en présence du réalisateur Nabil Ben Yadir. C’était jeudi 16 février à l’Omnia

C’est que le public venait d’être témoin (complice impuissant ?) d’une barbarie : il avait assisté pendant 9 minutes aux tortures infligées sur un homme au prétexte qu’il était homosexuel. 9 minutes une éternité pour la victime

Surtout ne pas exiger du film la « reconstitution » des faits - homicide perpétré sur un homosexuel musulman à Liège en 2012 (certains spectateurs friands de détails, avides de morale punitive auraient souhaité des précisions sur le procès par exemple). Or ce n’est pas le propos…

 

Comme dans les films de Gaspar Noé, quel que soit le degré de violence, il s’agit avant tout d’une fiction, de la façon de la mettre en images, bref de cinéma. L’impact sur le regardeur est déterminant, c’est une évidence. A nous de faire les distinguos entre violence (image), représentation médiatique de la violence (jusqu’à une forme de banalisation) violence « fantasmée » -imaginer ce qui peut se passer, violence-objet commerciale institutionnalisée par Hollywood, violence plus insidieuse -institutionnelle par exemple.

 

Animals! Un film audacieux dans la façon d’utiliser les formats, de resserrer les cadres, de faire des vulgarités éructées (en II) la bande-son de la violence. Un film uppercut. Le choix des plans séquences, une caméra toujours proche des sujets filmés rendent palpable la tension. Structuré en trois mouvements - le meurtre partie centrale est encadré par deux séquences de fête, anniversaire et mariage-, mouvements aux raccords fluides (départ de Brahim à la fin de I embarqué à bord d’une voiture en II et retour de Loïc un des quatre bourreaux au domicile familial en III) et aux échos, inversés certes, comme illustrations de la déshumanisation. Dans le premier mouvement la caméra très proche de Brahim semble faire corps avec lui (son dos envahit souvent l’écran), il déambule dans la maison avec ses couloirs ses escaliers ses portes que l’on ouvre et ferme, comme dans les dédales de l’incompréhension, son visage en gros plan (que renforce le format carré 4,3) trahit l’inquiétude quand les appels réitérés à son ami Thomas restent sans réponse.; une « violence » larvée dans les non-dits ou dans les « reproches » du frère. Le même visage défiguré par la douleur de la torture, sera dans la deuxième partie filmé en un long plan fixe : le silence et l’effacement progressif jusqu’à l’obscur amplifient l’impression de mourir avec lui (le « jeu » partagé avec le gamin dans la scène d’ouverture, en I : se cacher jusqu’à s’effacer, ne plus exister n’est pas anodin…rétrospectivement il acquiert une dimension symbolique)

En écho dans la troisième partie la caméra suit de très près Loïc, celui qui vient d’achever sauvagement Brahim, les mains encore ensanglantées, et nous assisterons à une autre forme de violence ou plutôt au « basculement ». Après son crime Loïc participe, normalement, aux préparatifs du mariage de son père. Loïc, une figure angélique ? En réalité un monstre clamant sa victoire (revanche sur lui-même, son père ? à la limite peu importe, l’essentiel était de montrer « la naissance d’un monstre » « comment, à un moment donné, tu vas tout faire pour exister dans un groupe, quitte à t’oublier »

Et voici cette partie centrale celle qui a conduit certains spectateurs à fermer les yeux (alors que la bande son les poursuivait). Jamais dans la nudité arrachée n’apparaîtra le sexe mais les balafres, contusions, tortures, cris d’angoisse, autant d’humiliations forcenées, un acharnement mortifère contre l’autre l’étranger le « pédé ». Et voici dans le format carré 4,3 un autre format rectangulaire celui du smartphone comme si le réalisateur était hors champ comme si l’ignoble duplication devenait « cinéma » dans un dévergondage de trivialités.

Oui "Si j'avais suggéré la violence, on serait passé à côté du sujet, et on n'en aurait jamais débattu

Et pourtant des programmateurs de salles art et essai refusent la diffusion de ce film au prétexte qu’il va choquer leur public… écoutons plutôt ce distributeur Ce filmporté par le père de la victime, est montré dans les collèges et lycées à travers la Belgique pour éduquer, et prévenir les assassinats homophobes. Ce même film, en France, est interdit aux moins de 16 ans et interdit d’accès aux salles par le refus des programmateurs de le proposer au public, qui reste libre ensuite de choisir ou non de le voir.  Animals propose l’image manquante de ce qu’est un crime homophobe. Force est de constater qu’en France en 2023, cette image manquante n’est pas bienvenue dans les salles de cinéma, sous prétexte qu’elle serait trop violente  (Jane Roger – JHR FILMS, distributeur engagé)

 

 

Un film à voir absolument !

 

Colette Lallement-Duchoze

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15 février 2023 3 15 /02 /février /2023 10:02

Samuel est un orphelin de douze ans à l'allure sauvage. ll est placé depuis quelques semaines dans le Morvan chez Marie, Clément et leurs deux garçons. Samuel s'émancipe, découvre les sensations et les troubles de son âge mais, très vite, il doit aussi faire face aux secrets de cette nouvelle famille. Jusqu'à ce que, un jour, tout se transfigure

Astrakan

Ne vous fiez pas trop au synopsis

 

Ce premier long métrage -certes chronique d’une enfance blessée- adopte en permanence le point de vue de l’enfant (ni flashback ni explication); un enfant qui préserve son intériorité, tapie au fond de lui -et comme remisée à jamais, à l’instar du « secret » planqué sous une brique  du plancher  (?) ; un enfant dont les pouvoirs supra sensoriels (apanage du devin) vont éclater sous forme de cauchemars ou s’illustrer dans les surprenantes (et somptueuses)  dernières minutes où la musique de Bach accompagne la succession rapide de ses images mentales mêlées à celles qui résument l’ensemble du film.

On est loin des films naturalistes sur l’enfance   "nue"  même si le corps est la cible de tous les dangers (sévices, punitions, abus) et qu’il en porte les stigmates. Les séances de gym (trapèze) seront comme des "parenthèses enchantées"  (propos du réalisateur, lors de la rencontre à l’issue de la projection à Angers, Festival premiers plans)

 

David Depesseville ·affirme vouloir Montrer par creux à la manière de Michaux dans « connaissances par les gouffres"; il opte pour l’ellipse, la juxtaposition, les effets spéculaires laissant ainsi le spectateur emplir les interstices (pour exemples : le lait qui bout, la neige, l’hostie, les aubes des jeunes communiants ; la prière à la Vierge et celle dédiée à l’autre Marie la mère « adoptive nourricière » l'alma mater; l’agneau porté avec amour par Marie, telle la pietà et l’agneau mort-né, l’astrakan, titre donné au film -un titre qui doit illustrer  l’enfance sacrifiée, le côté « mouton noir » de Samuel et une certaine tactilité – la caméra se pose telle une caresse « je voulais quelque chose qui soit proche du toucher »

Une vision fragmentaire donc : à nous de reconstituer une sorte de puzzle à travers ces tableautins qui nous conduisent de la maison des parents adoptifs, et de la chambre en particulier à celle de la voisine, de la maison de l’oncle (la porte que l’on ferme sur les non-dits de la pédophilie)  à celle des grands-parents, de  l’église  à la rivière, à la salle de sport, etc.. A chaque lieu s’accroche un pan de la vie de Samuel:  lambeaux de souffrances,  émotions ressenties.

 

Comme dans le film de Pialat (l’enfance nue 1968) les parents adoptifs revendiquent une impérieuse nécessité financière (on les paye pour prendre en charge ces enfants délaissés par les parents géniteurs ou ces orphelins) et sont tiraillés (du moins le prétendent-ils) entre l’évidence (c’est un gamin « insupportable ») et une approche plus clémente (Clément travaillera plus pour « payer » des vacances de neige à Samuel); mais David Depesseville  dans Astrakan, dénonce en outre  la pédophilie (incarnée par Luc le frère de Marie) qu’il aborde moins frontalement (d’ailleurs on peut se demander si les adultes ne sont pas complices….par leur silence) que par d’efficaces et douloureuses suggestions : les séquelles que l’on devine sur le visage apeuré du petit frère et les  "refus" réitérés de Samuel,  vecteurs de son mutisme désarmant !

 

 

Un film âpre et délicat, doux et violent tout à la fois,

un film sobre et parfois plus grandiloquent (cf le final musical)

Un film que je vous recommande

 

Colette Lallement-Duchoze

 

Attention : une seule séance par jour pour la semaine du 15 au  21 février  (consulter les horaires)

 

 

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14 février 2023 2 14 /02 /février /2023 07:19

de Tiago Guedes (Portugal  2022)

coscénariste Tiago Rodrigues

avec Albano Jerónimo,(Laureano)  Nuno Lopes (Samuel), Isabel Abreu,(Judite) João Pedro Vaz (Paulo), Gonçalo Waddington (Vitor) Leonor Vasconcelos (Salomé) et la  participation de Maria João Pinho (mère de Pedro) 

 

Festival de Cannes 2022  Sélection officielle séances spéciales 

Festival international du film d’Ourense (Espagne) 2022 prix du meilleur film

Festival du film de Lucca (Italie) prix du meilleur film Jury de la presse

Dans un village du nord du Portugal, un rite de passage hérité d'une tradition païenne laisse des séquelles irréversibles au jeune Laureano, battu par trois autres adolescents. 25 ans plus tard, Laureano vit toujours aux abords du village, en marge de la communauté et entouré de chiens errants. Les agresseurs, devenus maintenant des hommes, se retrouvent un soir pour célébrer la fête du village. À la nuit tombée, un évènement fait remonter le passé à la surface et la tragédie s'installe.

Traces (Restos do Vento)

 

Un film dense puissant et bouleversant !

 

Par sa mise en scène. Extérieurs traités comme des personnages ou des tableaux du XIX° ; jeux des lumières tamisées blafardes, plans séquences, récurrence symbolique de plans sur les vitres embuées, les escaliers et ruelles, panoramiques -où la vastitude absorbe l’apparente chétivité de l’humain-, économie des dialogues, atmosphère oppressante de bout en bout  -on devine sur les visages la peur, l'attente angoissée de?-, avec de petites étincelles, lueurs furtives dans l’opacité ténébreuse et mortifère

 

Un film construit telle une tragédie : un long prologue consacré au rite païen dit d’initiation -passage à l’âge adulte- restitué dans toute sa noirceur et sa violence machiste où celui qui a osé se rebeller contre les prémices d’un viol collectif, va payer le prix fort. Les traces du « tabassage » seront indélébiles -tout comme subsistent dans ce milieu rural balayé par les vents des éoliennes, les "traces" d'une malédiction ; une scène d’ouverture à laquelle répond en écho 25 ans plus tard le rite sacrificiel de la même victime innocente dans le mugissement des éoliennes et les aboiements des chiens. Entre ces deux scènes une violence larvée suggérée, avant la découverte du corps mort de Pedro, fils de Samuel puis la mise en place méthodique d’une justice immanente !!

 

Une interprétation qui force l’admiration : Albano Jerónimo incarne dans un pur dépouillement cet "idiot du village"  la  "mauvaise conscience" des habitants ; quand Judite (celle que lui adolescent avait sauvée du viol collectif) s’en vient le supplier de « se dénoncer » -pour sauver l’honneur !!-, il posera ses mains et ses lèvres sur ses cheveux -tel un Christ moderne qui pardonne et se sacrifie par amour !!!

 

 

Un film qui hélas quitte l’affiche ce jour

 

Colette Lallement-Duchoze

 

 

Ce film est né de l’envie de réfléchir sur la violence exercée par les plus forts sur les plus faibles, sur l’illusion du pouvoir qui envahit tous les aspects de la société. Réfléchir à la perte de l’innocence, où elle se produit et pourquoi. Mais l’envie la plus prégnante a été de réfléchir à la peur et à la façon dont elle nous conditionne. Comment elle nous transforme et déforme la réalité.

La trame de fond de ce film est la confrontation entre la noblesse fondamentale de l’être humain face à ce que nous appelons la méchanceté humaine, souvent née de la peur, de ce qui nous semble étrange, étranger, ou que l’on ignore. Une confrontation ancestrale que la société camoufle, cache, sans avoir l’idée, le savoir ou la culture pour l’éradiquer.

De là naît la nécessité de réfléchir aux rites de passage (représentés ici à travers une tradition ancestrale semi-païenne), presque toujours liés à des manifestations violentes et misogynes, qui tentent de symboliser cette « séparation » extrême où l’on abandonne un statut social au profit d’un autre.

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