17 octobre 2012 3 17 /10 /octobre /2012 06:28

 Film d'Agnieszka Holland avec Robert Wieckiewicz, B Fürmann, Marie Schrader

 

sous-la-ville.jpg

Nous voici dans le monde des ténèbres; ce monde des remugles et de la promiscuité; ce monde de l'Ombre en quête d'une improbable lumière. La réalisatrice qui a travaillé dans l'obscurité quasi totale, avec des torches, filme au plus près des visages crasseux, aux regards hébétés par la peur; elle peut isoler aussi une partie de ces corps: c'est un bras une main comme détachés extirpés arrachés et pourtant signes/métonymies de la Vie, du Vivre-là. La scène d'accouchement et celle du Déluge sont des moments forts de cette palpitation souterraine. Une palpitation qui vibre d'accents cultuels (parmi les huit personnes de la micro communauté, il y a un religieux), de désirs charnels (voir les deux scènes de rapports sexuels) ou qui s'apparente tout simplement à un hymne à la vie (voir le rôle des deux enfants). Palpitation comme instinct de survie dans ces égouts aux pourritures méphitiques. 

Parfois un travelling ascendant permet de quitter l'ombre pour la lumière. Mais dans cette "partie du monde" (nous sommes à Lvov Pologne 1944) c'est le règne de la violence inhumaine qu'illustre la scène d'ouverture (des femmes nues courent affolées, poursuivies par des nazis; plan suivant vue en plongée sur leurs corps exécutés; la rapidité de ces deux plans en décuple la force suggestive). Pendant les 13/14 mois qu'aura duré la captivité quasi chtonienne des survivants de la mort dans les égouts, la ville aura arboré trois drapeaux... ;elle aura vécu la délation, la peur, la suspicion, les mensonges, les exécutions sommaires (celles de victimes expiatoires) jusqu'à la libération par les Russes...Pour la restitution de toutes ces scènes la réalisatrice semble sacrifier à des clichés; en tout cas elle est moins convaincante que pour  les séquences  "sous la ville"...

D'un point de vue purement narratif et thématique le film s'attache au personnage de Socha l'égoutier. Un voleur débrouillard hypocrite et cupide; 'ses' juifs au départ sont sa "pompe à finances" (les "sauver" rapporte plus que les dénoncer); mais à la cupidité va se substituer une forme d'empathie ('ses' juifs seront 'ses' frères compagnons de vie; les sauver-sans rémunération-  primera sur toutes les autres formes d'obligation, fussent-elles familiales...

 

Au-delà de l'ancrage historique (la réalisatrice s'inspire d'un épisode authentique du ghetto) et grâce au refus du manichéisme, le film acquiert ainsi une portée universelle dont Socha serait le passeur...

 

Colette Lallement-Duchoze

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commentaires

B
<br /> Nous voici dans les entrailles de la Terre, car il n'y a pas d'autres endroits pour accueillir le groupe de juifs s'échappant du ghetto tombant devant Socha (un cadeau du ciel pour lui). On fait<br /> la connaissance des ces polonais qui volent sans aucun scrupules les juifs au quotidien. Ici point de manichéisme, on assiste aux rafles en haut et autres actes ignobles de l'être humain, des<br /> tensions naissent en bas, un juif sacrifie sa propre famille pour une autre femme, d'autres s'unissent. C'est surtout l'histoire de la rédemption du personnage de l'égoutier qui s'opère<br /> tout au long des 14 mois durant se cache cette communauté dans les bas-fonds. C'est un film magnifique et poignant que je conseille sur le tard. On ne voit pas le temps passer... même si vous<br /> avez peur du noir, n'hésitez pas à le découvrir.<br />
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