22 janvier 2014
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De Martin Scorsese
Avec Leonardo DiCaprio, Jonah Hill, Margot Robbie
Adapté du roman éponyme de Jordan Belfort (écrit à sa sortie de prison), le film retrace la grandeur et la décadence d’un trader New-Yorkais, toxicomane et débauché; de son ascension irrésistible dans le monde de la finance des années 90 à sa disgrâce, sous les coups d’une enquête du FBI.
Beaucoup de bruit autour de ce film à succès, le dernier Scorsese : un must !...3 heures de projection qui en mettent plein la vue avec Di Caprio dans le rôle principal, du bling bling à la puissance 1000. La force d’attraction du film réside justement dans ce déploiement de moyens mis au service d’un grand technicien du cinéma pour faire vivre au spectateur ordinaire que nous sommes ce qu’est la vie d’un homme quelconque devenu rapidement milliardaire aux USA dans les années 90.
Vous avez compris, nous sommes au cœur du système capitaliste puisqu’il s’agit de la vie d’un trader...Et c’est là que je me suis dit en sortant du cinéma : décidément, l’idéologie dominante américaine est insubmersible, elle flotte comme un bouchon de liège sur la mer.
Car que nous dit réellement ce film, au fond, malgré l’apparent regard critique qu’il porte sur les personnages ?
Il nous dit que le système capitaliste devient intolérable “seulement” lorsqu’il est transgressé par des gens déséquilibrés, drogués, malades sexuels. Il y a une barrière à ne pas franchir, disons celle de la légalité de l’ordre libéral. Exactement comme dans “Apocalypse now” la guerre serait jolie s’il n’y avait tous ces fous, tel ce chef de guerre incarné par Marlon Brando que la justice de l’Oncle Sam vient faucher à la fin du film. Ici, c’est le bon agent FBI qui représente l’Amérique honnête (pas comme le juge qui a relaxé DSK, en vrai) ce juge arrêtera le trader fou, débauché, immoral, et tout rentrera dans l’ordre, le meilleur du monde comme chacun sait.
Autrement dit “le loup de Wall Street” n’est pas une dénonciation politique, humaniste, d’un système économique où règne la loi du plus fort, du plus bête, du plus vulgaire, du plus immoral, mais un divertissement sur un quidam déjanté qui est sorti du cadre légal.
Très symptomatique aussi cette idée que l’homme est mauvais et qu’il est impossible de tuer le mal...illustrée par l’image de la fin où sorti de prison, le trader s’adresse à une foule de gens ordinaires fascinés par la réussite financière, et s’apprête à recommencer ses méfaits : “vendez moi ce stylo”. Il y a vraiment là l’idée que le mal est en chacun de nous et ne demande qu’à se développer. C’est typique de l’idéologie spécifique américaine imprégnée de protestantisme.
Oui, l’idéologie dominante américaine est puissante comme un bouchon de liège sur la mer. Et la Bourse de New-York n’est pas près de disparaître, hélas.
Serge Diaz