Un prologue prometteur! Voici une voiture qui épouse téméraire la "trame" d'une route de montagne enneigée avec pour seul éclairage celui de ses phares; on est subjugué et l'on se dit (naïvement) que les passages obscurité/lumière, les crevasses, les précipices évités de justesse, le rythme et la musique vont être exploités déployés comme des métaphores ou du moins comme éléments représentatifs....Et le film ainsi encodé peut commencer après cette mise en abyme !!!
Il n'en est rien. Tout est sur-joué ou mal interprété (Amalric a beau être l'acteur adulé des frères Larrieu, il ne convainc pas en prof à la mémoire trouée, à l'esprit et à la psychologie lacérés; pas plus d'ailleurs que Karin Viard en sœur incestueuse ou Maïwen en fausse belle-mère de Barbara, la victime disparue; ou encore Sara Forestier en étudiante nymphomane). Jamais n'affleure une once d'étrangeté (et quand un crime est censé avoir été commis, écran noir ou ellipse; au spectateur de combler cet interstice...). Certains "éléments" à valeur de symbole(s) ne sont pas utilisés à cette fin (l'architecture du campus si originale dans sa transparence par exemple; et puisqu'on cite Breton il eût été judicieux d'évoquer "la maison de verre" au début de Nadja) ou au contraire ils sont exploités de façon si appuyée qu'ils sont vidés de leur contenu (présence et croassement de corbeaux; paysage et état d'âme, et jusqu'au titre du film que griffonne in fine Marc sur du papier)
Certes la montagne est belle imposante, attirante et redoutable à la fois, certes les étudiantes de ce professeur (qui enseigne l'art d'écrire en citant à tout va Breton, en projetant des extraits de "l'âge d'or" de Bunuel) sont sculptées telles des figures de Vogue (Marc est un "séducteur"...névrotique et c'est à travers son regard que nous sommes censés voir les "autres"); certes les allers et retours chalet/université scandent en la ponctuant, la narration.
Mais à l'instar de Marc qui attend fébrile l'arrivée du printemps, nous (=Nicole et moi) avons attendu, déçues, la fin de la projection! Cette "beauté convulsive" qu'appelait de ses voeux fougueux André Breton ne nous est pas apparue...
Colette Lallement-Duchoze