Film de Sandrine Bonnaire. Avec William Hurt, Alexandra Lamy, Augustin Legrand et Jalil Mehenni
Pourquoi ce goût amer, cette immense déception à la sortie du film?
Tout d'abord, William Hurt m'a semblé "sur-jouer" la tristesse et l'inextinguible désolation. Présent à chaque plan (ou presque) normal puisque c'est lui qui "enrage de l'absence" de son fils mort accidentellement; mais la réalisatrice a choisi la caméra fixe pour filmer son visage (en frontal, de profil) afin de pallier l'absence de mots, et d'habiter visuellement les silences (l'émotion est intraduisible selon Sandrine Bonnaire qui a voulu s'attaquer au "viscéral de la perte"); là où l'allusion eût été discrète tout en étant porteuse de sens, la caméra s'appesantit; trop c'est trop... ajoutons cette allure faussement dégingandée!!
Et tous ces symboles si appuyés qu'ils en deviennent "lourds", voire encombrants; ils desservent une narration qui se voulait fluide et heurtée à la fois. A commencer par la réclusion dans la cave; ce lieu d'en bas, sombre et inconfortable abrite, tel un sanctuaire, le reliquaire de l'enfant disparu; il devient par métaphore le réceptacle d'une conscience refermée sur elle-même qui ressasse ad infinitum. L'opposition "facile" entre une maison cossue (lumières tamisées) mais désertée par la vie, l'amour, et un appartement quelconque (lumineux) mais qui abrite l'âme d'un "foyer familial" (entendons présence du père de la mère et d'un enfant). Jacques, architecte, est capable de créer la "maison idéale" sous forme de maquette mais incapable d'habiter une parcelle de... La gourmette offerte au jeune Paul comme lien substitutif avec l'enfant disparu. Et là on pourrait s'interroger moins sur la vraisemblance que sur la volonté de faire porter le "poids" (sens propre et figuré) du "mort" à un "vivant" (même si l'enfant dans sa relation complice avec le "père de son petit frère" le considère comme un objet fétiche...garant de leurs secrets)
Trop de...tue...
Mais heureusement le très jeune acteur Jalil Mehenni oppose au jeu convenu des adultes englués dans leur désarroi, une franche spontanéité!
Et puis il y a la musique d'Arvo Pärt!
Colette Lallement-Duchoze