9 octobre 2011 7 09 /10 /octobre /2011 18:15


 

tn-ceci-n-est-pas-un-film-22525-695498541.jpgSi l'on se réfère aux "fameuses" toiles de Magritte "Ceci n'est pas une pomme" "Ceci n'est pas une pipe" – où le peintre nous invite à ne pas confondre un objet et sa représentation - alors oui ce que le spectateur voit en 75' "n'est pas un film" mais sa représentation. Nous voyons par exemple Jafar Panahi (filmé par Mirtahmasb) se pencher, marquer à l'aide d'un ruban adhésif sur le tapis de son salon les limites (murs, portes, escaliers) d'un décor où est censée évoluer l'héroïne d'un film à venir (jeune fille cloîtrée par ses parents fondamentalistes) mais dont le script a été refusé; nous l'entendons évoquer les mouvements de caméra, choisir un plan serré; en "mimant"il est devenu acteur … "Mais si on peut raconter un film, à quoi bon le faire"?

 

Au-delà de cette première interprétation, quelle leçon de cinéma!!

Nous allons suivre l'auteur cloîtré dans son appartement -il a été condamné, il est assigné à résidence-, durant une journée. La première séquence, en plan fixe, nous le montre en frontal, prendre son petit-déjeuner. L'extérieur s'invite : coups de téléphone à son avocate; sonneries -une voisine, hors champ, le supplie de garder son chien-; actualités diffusées sur l'écran; échappée sur les buildings alentour. L'intérieur s'épaissit: il faut nourrir l'iguane de sa fille; et à défaut de "faire un vrai film" regarder sur l'écran des extraits de films précédents (Sang et or) et les commenter –ce plan où sont cadrés en alignement: extrait du film, profil du cinéaste, masque/marionnette sur le mur du salon, est tout simplement bouleversant! Il dit l'impossibilité pour un réalisateur d'exercer son art !-

  

Et de même que Jafar Panahi va de sa table à l'écran, du salon à la cuisine, revient, fait volte face, de même l'iguane va du canapé à la bibliothèque, escalade, s'étire, revient, comme si les deux locataires étaient enfermés dans un temps qui "tourne en rond".

Quand Mirtahmasb va quitter l'appartement, Jafar Panahi prend le relais le filmant avec son portable; puis un plan sur la caméra isolée sur la table et cette parole prophétique "Ce qui compte, c’est que tout ceci soit enregistré et documenté. Que la caméra reste allumée."

La dernière séquence est le "voyage" en ascenseur avec le "préposé" aux poubelles; discussions, arrêts à chaque étage, ouverture/fermeture des portes, ramassage des détritus. Extérieur nuit; crépitements de la Fête du feu –une fête illégale-; Téhéran s'embrase, (prodromes d'une insurrection??); mais le cinéaste doit s'arrêter au pied de son immeuble, devant la grille (ne pas être pris en flagrant délit de filmer..). Humour et non-dits! 

 

"Tout ce qui lui arrive est emblématique de notre situation" déclarait Mirtahmasb –lui-même sera arrêté le 18 septembre!!!-

Générique de fin: film dédié à tous les cinéastes iraniens….

 

"Ceci n'est pas un film" est plus que le témoignage d'un captif, c'est une force créatrice en marche contre les censeurs, un hymne à l'amour du cinéma !

 
Colette Lallement-Duchoze
"Ceci n'est pas un film "passe en ce moment à l'Omnia
 
Partager cet article
Repost0

commentaires

Mode d'emploi

Ce blog est destiné à collecter nos ressentis de spectateurs, à partager nos impressions sur les films (surtout ceux classés Art et Essai).

Envoyez vos articles ou vos réactions à: artessai-rouen@orange.fr.

Retrouvez aussi Cinexpressions sur Facebook

 

 

Recherche