8 janvier 2025 3 08 /01 /janvier /2025 04:29

De Ray Yeung (Chine Hong Kong 2024)

 

avec Patra, Au (Angie)  Maggie Li Lin-Lin (Pat) Po Tai (Shing) Chung Hang Leung (Victor) 

 

 

Récompensé du Teddy Award du meilleur film de fiction à la dernière Berlinale 2024 

Argument; Angie et Pat vivent le parfait amour à Hong Kong depuis plus de 30 ans. Jamais l’une sans l’autre; leur duo est un pilier pour leurs parents et leurs amis. Au brusque décès de Pat, la place de Angie dans la famille se retrouve fortement remise en question...

Tout ira bien

Le film est encadré par deux plans, classiques certes, mais ô combien signifiants. La caméra suit de dos un couple cheminant à pas lents dans une allée c’est le plan d’ouverture ; le même couple assis immobile souriant  vu de face, c’est le plan final. Ante et post mortem. Le vécu souverain et le souvenir jamais aboli de ce vécu !

Entre ces deux plans tout le cheminement qui ira de l’entente  du partage (les proches acceptent le couple lesbien de sexagénaires ; agapes pour la fête de la mi automne savamment préparées ) à l’exclusion (à la mort soudaine de Pat on fait comprendre à Angie qu’elle doit « quitter » l’appartement -le légataire officiel est Shing frère de Pat …car .en l’absence de testament olographe ou autre signé on applique la « loi »)

Il est vrai que cette application stricte n’est pas l’apanage de Hongkong (on fait fi des sentiments face aux diktats de la loi de …succession…) 


Mais ici -et c’est la dynamique interne, le réalisateur oriente son film selon  deux perspectives : l’homophobie (qui avant la mort de Pat ne disait pas son nom et les promesses réitérées de Victor le neveu semblaient sincères) et la « revanche sociale » (ascension sociale de Pat et parallèlement galères financières et professionnelles vécues par le frère et le neveu) Récupérer l’appartement est une « aubaine » !!  

Et l’on « détruira » toute trace, témoin du passé heureux vécu par les deux femmes (cf le dessin réalisé par un  petit-neveu que la mère  arrache avec fracas …)

Lacération et fissures; arrachage définitif et  reconquête d'un espace "normal" .par "exclusion" de l'autre "anormal"  ...Ô  puissance des détails ! 

 

Or  ces deux forces (mouvements)  ne sont-elles pas étroitement liées ? Et en cela le film serait éminemment politique (quand on sait que la communauté LGBT est fortement méprisée à Hong Kong,  quand on sait que le capitalisme y est ravageur, un tel film ne plaide-t-il pas en faveur de …. ? simple question ! 
 

Pudeur et délicatesse grâce aux ellipses pour "dire"  la douleur de l’absence (pour exemple : la mort de Pat reste hors champ, une question d’Angie sans réponse, un fondu au noir … le plan suivant nous montre l'urne que rapporte la famille de Pat…) Et le procédé du fondu au noir qui se double d’une ellipse -temporelle le plus souvent- empêchera à chaque fois de verser dans le larmoyant … 
 

La formule tout ira bien  rassurante,  entachée par la cruauté ( ?)  des « ayants-droit» ? Tout ira bien, une antiphrase ? Certes mais par-delà le mutisme des apparences, Angie n’a-t-elle pas transcendé fissures convoitises et autres malversations ? Avec élégance le cinéaste filme le désarroi qui se lit sur son visage éploré ou attendri quand elle surprend son beau-frère hoquetant de larmes...


Et c’est avec des "amies" (dont la notaire) qu’elle peut s’élancer vers un futur vers un ailleurs là où reposera à jamais au profond bien vivante celle qui a partagé tant de décennies…

Qu’importe dès lors un appartement devenu "prison"  enfermement des cupidités et autres convoitises mesquines,  à moins que...

 

Colette Lallement-Duchoze
 

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