Documentaire réalisé par Leon Gast (1996 USA) Version restaurée
Festival Sundance 1996
Oscar du "meilleur documentaire" 1997
Argument: En 1974, à Kinshasa, capitale du Zaïre, a lieu une rencontre historique entre les deux poids lourds les plus réputés des Etats Unis, Mohammed Ali, alias Cassius Clay, et George Foreman. A trente-deux ans, Ali va tenter de reconquérir le titre de champion du monde face à Foreman, vingt-cinq ans, auréolé de ses victoires sur Frazier et Norton. Le 30 octobre, le stade de Kinshasa ouvre ses grilles à 4 heures du matin.(pour "coller" à l’heure américaine…)
Pour fêter les 50 ans (30 octobre 1974) du duel "historique" Rumble in the Jungle -, est sortie en salle une version numérique restaurée du documentaire réalisé par Leon Gast (un travail étalé sur 20 ans…)
En 1974 le pari était audacieux, combiner un événement sportif opposant deux Afro-Américains et un festival musical autour d’artistes noirs, éminemment politique (Ali vient combattre sur la terre de ses ancêtres), impudent aussi (le dictateur Mobutu en finançant le projet instrumentalisait l’événement …)
Et rappelons que le cinéaste Leon Gast s’était rendu au Zaïre (aujourd'hui RDC) pour filmer le black Woodstock …mais… Bien plus, les dés semblaient pipés "Nous regardions un homme qui allait à l’échafaud" dit un témoin tant le contraste était patent entre l’adipeux Mohamed Ali et l’"invincible" (?) Foreman âgé de 25 ans et donné favori…et pourtant…. Politiquement les "deux poids lourds" sont opposés : Ali ou le porte étendard du contre-pouvoir, Foreman plus conforme aux valeurs américaines (leur attitude réciproque avec les Zaïrois avant le match est finement analysée dans ce documentaire.)
Mêlant habilement images d’archives et témoignages (recueillis dans les années 1990 ceux de Norman Mailer, Spike Lee, George Plimpton) avec le souci constant de la contextualisation (le Zaïre de Mobutu dictateur cruel, par exemple) faisant la part belle aux propos militants et savoureux du vibrionnant Mohamed Ali (entre autres sur ses frères autochtones ou afro américains) ainsi qu’à la musique (James Brown, BB King, the Spinners, Myriam Makeba, ) when we were kings par ses fulgurances au rythme trépidant, ses audaces au montage (coexistence présent passé et futur), illustre cette adéquation entre fond et forme, gage d'une qualité indéniable et raison suffisante pour ne pas rater un tel événement
De ce documentaire foisonnant d’archives "qui parle autant d’une époque que d’un combat", on pourra retenir ces propos de Cassius Clay devenu Mohamed Ali (après son refus de faire la guerre au Vietnam et sa conversion à l’islam) "Je me suis battu contre un alligator, j’ai lutté contre une baleine, j’ai attrapé un éclair, emprisonné la foudre… la semaine dernière, j’ai tué un roc, blessé une pierre, envoyé une brique à l’hôpital" " hier soir, j’ai éteint la lumière; j’étais au lit avant qu’il ne fasse noir!"
Un film à la gloire d’Ali ? peut-être ! sûrement !
Mais loin de sortir ko de la projection, on aura eu loisir de s’interroger aussi sur un "désastre" psychologique et humain et sur le futur de ces épousailles entre cinéma et boxe …
A ne pas manquer !
Colette Lallement-Duchoze