De Gilles Bourdos (France 2023)
Avec Vincent Lindon (Joseph) et les voix d'Emmanuelle Devos (Catherine) Micha Lescot (Damien) Pascale Arbillot (Béatrice) Gregory Gadebois (Garcia) Solan Machado Graner (Simon) Milo Machado-Graner (Lucas)
Joseph Cross ressemble à son métier. Solide comme du béton. Marié, deux enfants, son existence est parfaitement organisée. Pourtant cette nuit, seul au volant, il doit prendre une décision qui peut ruiner sa vie.
Exercice de style ? Peut-être, mais dont le rendu est bien en-deçà de Guilty du Danois Gustav Möller (cf http://www.cinexpressions.fr/2018/07/the-guilty.html ) -dans ce film le travail sur le « design sonore » était époustouflant !!!
Performance d’acteur ? discutable……
Voici un dispositif minimaliste : l’habitacle d’une voiture mais où l’asphalte de l’autoroute, et l'environnement (filmés en alternance avec le huis clos) jouent le rôle d’échappée (pour la forme) et de contrainte chrono (pour le fond) alors que les différentes voix (le téléphone est constamment sollicité) illustrent à la fois une « bataille des mots » (car il s’agit à chaque fois de « convaincre » l’interlocuteur) et les trois « missions » dont se sent investi Joseph: préserver une famille en "rassurant" une épouse, seconder consoler une parturiente, piloter un chantier colossal
A force de revendiquer son « honnêteté »,d'afficher sa droiture (quand bien même le ton de la voix change en fonction de l’interlocuteur), la « pureté des sentiments » de Joseph en devient suspecte ….(l’hymne au « courage » tout en se déclinant en multiples aveux -comme autant de mea culpa -est dissonant !!!)
Scotché à son volant, mais à l’écoute de sa femme Catherine, de Damien auquel il "dispense "des ordres, de son supérieur hiérarchique Garcia de Béatrice de ses deux fils Simon et Lucas, Joseph est devenu le temps d’une nuit une sorte de « chevalier des temps modernes", en l’absence duquel le monde s’écroulerait…et les kilomètres avalés (oui j’arrive je serai là ça roule bien sur l’autoroute) sont comme des secondes grappillées au temps : celui de la vie (naissance d’un enfant) de la survie (d’un couple ?) d’un futur en béton indestructible (érection d’une tour géante)
Le hic est que tout cela fonctionne un moment mais s’épuisant dans le répétitif, dans le « lisse » propret d’une « masculinité prétendue courageuse » , saupoudré de références psychanalytiques… dont témoignerait le dédoublement du "je" dans l'adresse au père...-, ne saurait convaincre….
Colette Lallement-Duchoze