Documentaire réalisé par François Xavier Destors et Alfonso Pinto (France Italie 2022)
Argument: En Sicile, dans l’ombre de la belle Syracuse, bat le poumon d’un des plus grands complexes pétrochimiques d’Europe. 70 ans après l’arrivée des premières raffineries, le territoire et les hommes semblent aujourd’hui livrés à eux-mêmes dans l’empoisonnement du ciel, de la mer et de la terre. « Mieux vaut mourir d’un cancer que mourir de faim », entend-on sur la plage qui borde la raffinerie. Dans un contexte d’omerta, le film donne à entendre des voix qui luttent, se résignent ou simplement survivent au sein d’un territoire sacrifié sur l’autel du progrès et de la modernité.
Un écocide aux portes de l’Europe !.
En alertant l’opinion, François Xavier Destors historien de formation, et le photographe Alfonso Pinto lancent un cri d’alarme.
Voici des plans quasi oniriques ou carrément apocalyptiques -quand la dystopie n’est plus fictionnelle-que renforce une musique angoissante (images du désastre, de ravages indélébiles). Envelopper le tout dans la brume, le flou, les couleurs délavées, comme pour saisir l’écran d’une pollution toxique à défaut de le traverser résonne comme un glas (l’adieu aux cartes postales glamour idéalisant Syracuse) Entrecouper l’hommage du prêtre aux victimes de cancer (une messe le 28 de chaque mois) par d’autres images illustre une autre fragmentation plus réaliste et douloureuse, celle vécue au quotidien dont rendent compte des témoignages poignants. Quelques images d’archives (commentées par une voix off) rappellent en l’illustrant la genèse du complexe pétrochimique qui aura sacrifié la vie humaine au profit – expropriations défrichement excavations arrivée massive d’ouvriers Et voici ces victimes, celles qui ont subi les « dommages dits collatéraux », celle de cette jeune femme à l’avenir lourdement compromis, celle de l’enfant qui « ne veut pas mourir ». Nous les verrons et entendrons à intervalles réguliers ; voix enregistrées créant une forme de tempo (sous l’apparente monotonie de la succession) Promenons-nous avec ce couple dont le mari aveugle revisite par d’autres sens « son » vécu, écoutons cette « molle » indignation de deux comparses testant des fruits, etc.. Mais comble de l’ironie -pour ne pas dire cynisme :voici un plan large sur des vaches( ?) paissant derrière un grillage puis plans rapprochés avant un zoom sur une pancarte interdit …au bétail…
Mieux vaut mourir d’un cancer que mourir de faim
L’eldorado promis est vite devenu un « cimetière » ; les habitants ne peuvent ;« partir » Faute d'implication de la part de l'état, avec une mafia qui règne et plus particulièrement en Sicile, ces gens sont livrés à eux-mêmes et peinent à se défendre. Les lois sont détournées, et du moment que l'argent rentre, peu importante le peuple !!!
Notre « guide » encapuchonné (souvent filmé de dos) d’emblée nous avait confié « les gens, ici, ont peur de parler »
Un documentaire à ne pas manquer ! (même si parfois il se réduit à une « enquête journalistique »)
Colette Lallement-Duchoze