14 octobre 2024 1 14 /10 /octobre /2024 03:41

Deuxième long métrage de Gudmundur Arnar Gudmundsson (Islande 2022)

 

Avec Birgir Dagur Bjarkason, Áskell Einar Pálmason, Viktor Benóný Benediktsson

 

 

Présenté dans la Section Panorama du festival de Berlin,

Argument: Addi, 14 ans, est élevé par sa mère "clairvoyante" qui perçoit l’avenir dans les rêves. Il prend sous son aile Balli, un garçon introverti et en marge, victime de harcèlement scolaire. En l’intégrant à sa bande, ces garçons désœuvrés et livrés à eux-mêmes explorent la brutalité et la violence, comme seuls moyens d’expression et d’exister. Alors que les problèmes du groupe s’aggravent, Addi commence à vivre une série de visions oniriques. Ses nouvelles intuitions lui permettront-elles de les guider et de trouver leur propre chemin ?

Les belles créatures

Un film uppercut. Un film sans concession sur la violence ….Violence sociale (région de Höfuðborgarsvæðið) qui se répercute sur des jeunes laissés à l’abandon (entendons face à l’impéritie notoire de leurs parents les quatre jeunes dont nous suivrons le quotidien sont livrés à eux-mêmes,  sans repères) marqués au fer rouge de l’ignominie ( ?) parentale -père alcoolique, père en prison, père violent, mère fantasque, mère immature ou mère absente.. Les difficultés du passage de l’enfance à l’adolescence, de l’adolescence à l’âge adulte s’en trouvent décuplées !!

Le recours quasi systématique aux plans serrés,(caméra à l'épaule comme "capteur émotionnel") , un rythme qui ne faiblit pas, l’alternance plongée contreplongée (quand ils  " partent en expédition" sur les toits croyant s’approprier l’univers), accentuent (ou du moins mettent en évidence) ce "mal-être" de la jeunesse islandaise «La montée de la violence » est de l’avis de ce journaliste (reportage tv) un fait indéniable déplorable. Connaissons nous vraiment le quotidien de nos enfants ? Un quotidien fait de rixes justifiées, provocatrices ou gratuites, un quotidien fait d’alcool, de drogue, oui … mais …comme palliatif à?  ou dans l’attente de ???

 

Le cas de Balli est emblématique. Voyez cet être chétif sans défense apparente, introverti,  harcelé à l’école; suivez le dans son milieu de  "vie" : un bric-à-brac pestilentiel, amas d'immondices dont les relents  à la fétidité méphitique l'imprègnent (il "pue" tellement qu’on s’éloigne de lui à l’école) Tabassé hospitalisé nez cassé ;   et plus tard quand le père sortira de prison fier de retrouver la " cellule" familiale, Balli n’aura de cesse de se venger de tous les abus dont chaque membre de la famille fut la victime… Caricature ? l’acteur interprétant ce père est un monstre (obésité adiposité, spasticité et crocs en gros plan en font un ogre, un animal un primate un sauvage…)

Les belles créatures ! Un titre antiphrastique ? Oui, serait-on tenté de répondre. Et pourtant…Quelle "belle" leçon d’amitié (pour ne pas dire d’amour) se lit dans ces regards ou se devine dans ces étreintes !!! ; quelle   peur au tréfonds de soi !!!! (qu'il "faut"  refouler en affichant  sa "virilité": c'est le cas de  Konni le "chef" dit l’animal)   Alddi  dont nous entendons la voix off de narrateur , Adi dont la mère interroge les forces occultes, le para ou le supra normal, (psychanalyse des rêves …) semble mieux loti… Avec sa gueule d’ange (gros plans sur son visage qui envahit l’écran) il sera la force tutélaire dont Balli a un besoin vital ; simultanément il se découvre des dons de voyance (et ses visions oniriques rompent momentanément avec le réalisme prosaïque ambiant), au final .torturé par le remords il est « empêché » dans ses aveux …par sa mère …mais il sera « béni » par son pote…

Grâce à une caméra immersive, le spectateur est ainsi plongé dans les contradictions de ces ados et le refus du manichéisme clivant (en ce qui concerne le fond) fait que formellement le film est en constante alerte -ce que résumerait la métaphore du toit ?  -escalade, vide et plénitude, vertige et conquête -conquête de soi sur soi, de soi sur les autres. -dont les "faux adultes" que sont leurs parents ?

 

Un film qui aura gravé à l’acide une dure réalité ! Un film dont la violence, et les évidentes  touches de dolorisme et de misérabilisme ,  peuvent mettre mal à l’aise  . 

Or voici dans un repli cette trouée de lumière ; elle  s’en vient « mordre » le motif…

Même si tout le reste est dur, l’amitié est encore possible, et elle peut devenir la chose la plus importante, à cet âge-là aussi.(propos du cinéaste)

 

Colette Lallement-Duchoze

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