20 septembre 2024 5 20 /09 /septembre /2024 06:20

De Simon Moutaïrou (France  2023)

 

Avec Ibrahima Mbaye (Massamba),Camille Cottin: (Madame La Victoire) Thiandoum Anna Diakhere : (Mati), Benoît Magimel  (Eugène Larcenet) Félix Lefebvre (Honoré Larcenet ) Vassili Schneider (Baptiste) 

 

Musique Amine Bouhafa

 

Fenêtre sur le cinéma français » du Festival du cinéma américain de Deauville 2024, en avant-première mondiale

argument: 1759, sur l'Isle de France, actuelle Île Maurice. Massamba et Mati, esclaves dans la plantation d'Eugène Larcenet, vivent dans la peur et le labeur. Lui rêve que sa fille soit affranchie, elle de quitter l'enfer vert de la canne à sucre. Une nuit, elle s'enfuit. Madame La Victoire, célèbre chasseuse d'esclaves, est engagée pour la traquer. Massamba n'a d'autre choix que de s'évader à son tour. Par cet acte, il devient un "marron", un fugitif qui rompt à jamais avec l'ordre colonial.

Ni chaînes ni maîtres

Dénoncer le système esclavagiste pratiqué par la France pendant des siècles, privilégier le problème du  « marronage », mettre en exergue une violence frontale -le spectateur adopte le point de vue du père torturé, dévasté par le chagrin mais animé par une volonté quasi surhumaine d’en découdre avec « chaînes et maîtres » - insuffler une dimension « fantastique mystique » -voix off de la femme aimée disparue en mer, effets spéciaux qui métamorphosent les éléments naturels, tout en faisant de la relation père/fille, de la traque, de la résistance à l’esclavage l’essentiel du film  et  tourner in situ (Ile Maurice en des décors immersifs)  tout cela dénote une ambition rare et qui force l’admiration…. Simon Moutaïrou dont c’est le premier long métrage s’est beaucoup documenté (l’existence de la dame chasseuse d’esclaves fugitifs, les croyances des catholiques à l’encontre des Noirs …. « Dépourvus d’âme » la révolte des esclaves) il a fait appel à des historiens, s’est inspiré aussi des ouvrages de Franz Fanon, de Césaire.

Le monolithe de 500m face à la mer fut le haut lieu de la révolte des esclaves (la plupart venant du Sénégal)  au XVIII° Le montrer de façon récurrente (souvent en contre plongée) crée le tempo (le père, pieds nus, traqué par la dame chasseuse à cheval) le père et sa fille au sein d’une communauté gage d’une dignité retrouvée (Massamba peut renouer avec la spiritualité de ses ancêtres) avant que pourchassée par les militaires cette communauté  ne rejoigne la mer, la mer toujours recommencée (circularité du film qui s’ouvrait précisément sur le corps de la femme aimée plongeant dans les abysses mais qui de sa voix enchanteresse aura su perpétuer une foi inébranlable !)

Et pourtant alors que le cinéaste se propose de revisiter le destin d'êtres humains qui risquent tout au nom de leur droit à disposer d'eux-mêmes » une fâcheuse tendance à la complaisance dans l’illustration de la « violence » en dénature les « effets » attendus! Très gros plans fixes prolongés sur les stigmates de la flagellation, sur un pied déformé gonflé par la douleur, sur le sang qui gicle de la gorge, sur cette fleur de lys marquée au fer rouge sur le bras de celle qui a tenté de fuir, sur le visage muselé du père encagé tel un chien, zooms sur le ruissellement de la douleur à fleur de peau, etc…

Et cette musique signée Amine Bouhafa  -cordes dissonantes, percussions, sonorités rugueuses des contrebasses  - qui trop souvent au lieu de souligner,  surligne les tensions….et accentue l’aspect « survival » du film

Dommage

 

Colette Lallement-Duchoze

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