Film d'animation réalisé par Michel Hazanavicius
avec les voix de Jean-Louis Trintignant, Dominique Blanc, Gregory Gadebois, Denis Podalydes
adapté du conte éponyme de Jean-Claude Grumberg
Présenté en Compétition Officielle festival de Cannes 2024
Sortie prévue novembre 2024
Avant-première à l'Omnia mardi 10 septembre en présence du réalisateur
Dans un bois enneigé vivent un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne, dans la solitude, la misère et le froid. Suite à une prière près de la voix-ferrée, la bûcheronne recueille un bébé, balancé d’un train où un homme a aperçu sa silhouette. Malgré les réticences de son mari, elle ramène l’enfant au chaud dans leur maison…
Il était une fois, dans un grand bois, un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne”, dit la voix off (Jean -Louis Trintignant) l
Montrer l’horreur ? tendance fâcheuse au voyeurisme obscène. Ne pas la montrer ? être dans un déni injustifié voire inqualifiable… Comment trancher ? en recourant au « conte » et à l’animation. Voilà ce qu’affirmait (grosso modo ) Michel Hazanavicius hier soir lors de la rencontre après la projection de son long métrage d’animation (lequel d’ailleurs fut présenté à Cannes en compétition,) Et pourtant n’est-ce pas au même dilemme qu’ont dû être confrontés László Nemes pour le fils de Saül et plus récemment Jonathan Glazer pour La zone d’intérêt ?? Et pourtant....
En adaptant le « conte » de Grumberg Michel Hazanavicius a certes trouvé une forme d’équilibre, où la suggestion aurait le primat sur la démonstration. Même si à un moment de la narration le spectateur est « censé » voir par le regard du père biologique, rescapé au corps famélique, fantomatique, les « horreurs » des camps d’extermination (succession de dessins qui misent à la fois sur l’amoncellement et l’insoutenable (mais précisément dans le quotidien des « pauvres bûcherons polonais» cela reste hors champ…) ou encore le dessin où « découvrant » son reflet, ce père biologique « découvre» en même temps l’horreur qu’il suscite chez la gamine (sa fille !!!) Double découverte, double mise à nu… sans artifice
Suggestion au service d’une option, celle de la survie (dans le déroulé narratif) qui se confond avec celle de la Vie et de l’Amour (apologue) Et la simplicité des traits, des contours plus ou moins épais (les cernes évoqués par le cinéaste), les aplats de couleurs pour les personnages, le blanc pour « signifier » l’irréalité des lieux -que sillonnent pourtant des trains de manière récurrente, trains de plus en plus tonitruants et rougeoyants- …le passage du figuratif à l’abstrait, les oppositions à l’intérieur d’un cadre verticalité/horizontalité, tout cela sera gage de sobriété. Mais une sobriété qui n’exclut pas l’expressivité et les contrastes (à un moment un oiseau quittant sa branche bienfaitrice nous entraîne dans l’univers géométrique de constructions humaines où l’on devine - tas de chaussures sur lequel il vient de se poser…-- que s’accomplit « la solution finale » )
Contribution musicale d'Alexandre Desplat ? Le cinéaste affichait sa fierté d’avoir travaillé avec lui (compositeur régulier de J Audiard Wes Anderson, ou encore Guillermo del Toro, compositeur français de cinéma renommé comme le furent en leur temps Legrand ou Delerue …). Et pourtant ici le crissement des violons est à la fois pesant et sur-signifiant ce qui (à mon humble avis) nuit au propos (là où précisément la ténuité des dialogues et la qualité de l’image, des traits, de la composition du cadre etc… auraient suffi à rendre crédible le…cauchemar)
Un film d’animation assez « convenu » (dessins et propos)
Au final, impression mitigée….
Colette Lallement-Duchoze