d'Akira Kurosawa (Japon 1963) version restaurée
avec Toshiro Mifune (Gondo) Tatsuya Nakadai (Tokura détective en chef) Masayuki Muri Tatsua Mihashi (le secrétaire de Gondo) Tsutomu Yamasaki (le ravisseur)
Rétrospective A Kurosawa Omnia du 21 août au 3 septembre 2024
Séances jeudi 19h45, samedi 10h30, lundi 14h
. Actionnaire d’une grande fabrique de chaussures, Gondo décide de rassembler tous ses biens pour racheter les actions nécessaires lui permettant de devenir majoritaire. C’est alors qu’on lui apprend qu’on a enlevé son fils...
Multiplicité des genres -film noir, à suspense, polar thriller, drame social, -, inventivité de la mise en scène - d’abord un huis clos -qui devient le réceptacle d’une conscience confrontée à un dilemme, puis en extérieurs traque enquête d’indices et plongée dans les bas-fonds pour une chasse à l’homme, le ravisseur ; Oui le film de Kurosawa est tout cela à la fois. Si le ciel et l’enfer (du titre évocateur…) ne renvoient pas explicitement à « nos » catégories religieuses ils peuvent « signifier » en dénotation, le « haut » (soit la maison de Gondo "arrogante" dans son luxe ostentatoire ) et les bas-fonds (où croupissent les mal- logés les drogués en manque de came) le monde rutilant de la richesse opposé à celui de la crasse misérable et miséreuse …Les concepts "bien et mal" sont souvent imbriqués chez le cinéaste (ce dont témoignera le face à face final qui "oppose" Gondo au ravisseur lequel dévoile ses motivations profondes bien éloignées de l’appât du gain !) Peu (ou trop) de « distance » entre « le ciel et l’enfer » ? Et le personnage du chauffeur Anki (dont c’est bien le fils qui a été kidnappé...) ne représente-t-ll pas cet « entre deux » ???
La dimension « sociale » du film est patente -encore plus dans la troisième partie où la caméra nous entraîne dans les bas-fonds de Yokohama (années 1960) - avec cette alternance de rythmes (soutenu ou plus posé le passage de l’un à l’autre marqué par la reprise d’un thème musical -qui d’ailleurs scande les différents « moments » de l’intrigue… Ecoutons les fracas de la ville, parcourons ses ruelles nauséabondes, pénétrons dans ses plis et replis, dans les bouges, dans l’univers des dealers de la drogue. A l’aspect dédaléen de l’enquête (2ème partie) où à chaque réunion le chef résume avec méticulosité chaque avancée, chaque détail dont certains qui a priori semblent incongrus - les 7cm d’épaisseur de la sacoche par exemple -, alors que l'on visualise leur illustration sur l'écran , voici en écho l’intrusion dans le labyrinthe de la ville, cet « enfer » On retiendra la scène époustouflante où une jeune femme en manque d’héroïne, filmée de dos, titube accrochant ses mains ses ongles s’agrippant, tâtonnant, à la recherche de …et plus encore ce visage écumant d’une autre jeune femme sur laquelle le « ravisseur » a « testé les « effets » de la drogue…pure
Un film sous tension constante,
un film « noir »,
un film à voir ou revoir
impérativement !
Colette Lallement-Duchoze