de Éléonore Saintagnan, (2023)
avec Eléonore Saintagnan, Rosemary Standley, Wayne Standley, Anna Turluc'h, Jean-Benoît Ugeux...
Festival de Locarno
Semaine de la critique de Berlin
Éléonore roule vers l'ouest. Sa voiture tombe en panne en pleine Bretagne. Elle y loue un bungalow dans un camping avec vue sur le lac, dans lequel, dit-on, vit une bête légendaire. De mobil-home en mobil-home, elle observe le présent, convoque le passé et se laisse envahir par la fiction.
Il m’est arrivé un drôle de truc que j’aimerais bien vous raconter
Une voix off un regard curieux une attente dans un lieu baigné de lumière et de soleil, l’argument scénaristique frappe par sa ténuité. Et pourtant ! A cause d’une pause imposée (attente d’un joint de culasse) puis assumée, puis prolongée, Eléonore va prendre le temps de se « familiariser » avec les résidents, avec les touristes, mais surtout avec un lac qui devient le personnage principal.
Des « instruments » d’observation (à distance) laisseraient supposer que la narratrice/réalisatrice s’adonne à un travail de documentariste avec la minutie parfois de l’entomologiste…Il n’en est rien. Surtout quand la rencontre avec l’élément religieux fait basculer dans le fantastique (une église une légende et la coexistence dans le même cadre du quotidien le plus banal et des images du conte (Pour rappel, le poisson aurait eu pour ancêtre le poisson/compagnon de Saint Corentin, ermite devenu évêque de Quimper, qui retrouvait son « ami » dans les eaux claires d’un cours d’eau se nourrissait d’un bout de sa chair avant que l’animal ne se reconstitue, par miracle …Jusqu’au jour où il dut s’enfuir pour échapper à la violence des hommes
Un procédé récurrent : filmer cadre dans le cadre, (visages scrutateurs qui démultiplient les points de vue ») ; comme pour « imager » les coexistences du réel et du fantasme ? S’intéresser à des détails du quotidien (épluchage de légumes coupe de cheveux) écouter, apprendre à.., Restituer les ambiances des sous-bois, des plans d’eau et des intérieurs des mobile homes, se focaliser sur des « cas » qui se veulent exemplaires (un trentenaire et sa passion pour les voitures, l’Américain originaire de l’Ohio et ses complaintes, la trans et son gamin)
Or à cause de l’alternance systématique dans la trame narrative, Camping du lac loin de « sublimer » le tout, le confine dans l’espace clos de la redite. Ainsi le spectateur est d’abord sollicité par des petits riens (des tâches répétitives le plus souvent) puis par des incursions (immersions ?) dans le fantastique (la voix off l’entraîne vers un ailleurs légendaire ou mythique qui n’exclut pas l’humour cf la nageuse nue, la danse érotique avec le poisson, le cri de pamoison et le giclement de l’eau dans une jouissance réciproque) Un va et vient permanent, entre une quotidienneté ordinaire et l’extraordinaire nuit à une approche plus approfondie de la vie authentique de tous ces « campeurs » car il la réduit au simple pittoresque (cf l’Américain, sa guitare ou encore la danse « folklorique », dont l’aspect hypnotique est d’abord assez bien rendu, mais en substituant une musique électro à la musique traditionnelle, le décalage (comique ?) entre son et danse, semble frappé d’inanité…
On retiendra la prestation de Rosemary Standley et de son père…. ainsi que le « message » écolo (?) (l’assèchement du lac -dû à une « libéralisation de l’eau »- …à l’instar de tous ces assécheurs de la planète ??)
A voir !!!
Colette Lallement-Duchoze