Documentaire réalisé par Cécile Patingre (2021)
Projeté à l'Omnia en présence de la réalisatrice et de Jacques Sylvain Klein dimanche 23 juin 2024
Synopsis Été 1976 un vestige archéologique est découvert lors de travaux dans la cour du Palais de Justice de Rouen. Au cours de la fouille une mystérieuse inscription en hébreu est retrouvée gravée sur un mur « que cette maison soit sublime pour l’éternité » Quarante ans plus tard l’énigme persiste toujours. Quelle est donc cette maison et quelle mémoire renferme-t-elle ? Une plongée dans l’histoire juive de la France et de la Normandie
En noir et blanc voici un escalier, voici des pierres gravées, et surtout un effacement progressif de la lumière avant sa reconquête dans un mouvement dialectique :clarté ténèbres ; c’est le prologue, ! Les mêmes images s’en viendront ponctuer le film documentaire mais drapées de couleur ocre après quasiment chaque interview d’un "spécialiste"
La documentariste fait alterner plans fixes, plans rapprochés ou d’ensemble et présence humaine : le rabbin de Rouen Chmouel Lubecki, l’historienne des religions et médiéviste Sonia Fellous, entre autres, quand ils se penchent sur la pierre gravée dans ce « sous-sol » en livrant leur interprétation.
De même les vues en extérieur les infographies les gros plans sur des plaques de rue ou des plans de la ville, les vues aériennes sur le palais de justice actuel vont alterner avec les « témoignages » de spécialistes in situ, dans leur bureau d’études.
Travail de bénédictin et pour la réalisatrice et pour ces historien.nes architectes voire paléographes chefs de chantier (rappelons qu’en 1976 lors de travaux de terrassement fut « découvert » -par hasard ?- ce lieu -le plus ancien monument juif de France et d’Europe. Jacques-Sylvain Klein, délégué de l’association Maison Sublime de Rouen)
L’accompagnement musical et le jeu de l'alternance, - qui d’ailleurs correspond aussi aux différences d’interprétation- , rendent moins rébarbatif un didactisme inhérent aux interventions des uns et des autres
Académie talmudique, synagogue, maison civile ?
Par-delà la "diversité" des points de vue et des "interprétations" (et Cécile Patingre les fait coexister, se répondre, se superposer s'opposer, laissant le spectateur libre dans ses choix, déceler ce qui relève de l'analyse exhaustive, non entachée de parti pris.... ) il est un aspect sur lequel la plupart s’entendent : la « maison sublime » est un lieu ouvert, où les Juifs vivaient côte à côte avec les Chrétiens. En ces XIe et XIIe siècles, Rouen est alors une très grande ville de 40.000 habitants, dont 20% de Juifs, selon certaines estimations. Ils bénéficient de droits de résidence, de commerce, de léguer des biens à leurs héritiers, de recouvrer les créances auprès de la Cour royale.
On retiendra que Rouen est à cette époque un haut lieu de la vie intellectuelle juive. Les lettrés juifs échangent et débattent notamment avec les lettrés chrétiens au sujet de l’interprétation des textes. La Maison Sublime est ainsi le témoin d’un temps exceptionnel de tolérance dans l’histoire européenne
On saura gré à la réalisatrice, d’avoir livré par une compilation orchestrée telle une symphonie quelques secrets (à valeur épiphanique ?), d’une mémoire gravée à jamais dans la pierre, de nous avoir familiarisé avec l’univers d’un vestige extrêmement rare du passé juif médiéval en Europe, (Judith Schlanger)
Oui la Maison sublime est un lieu de mystère merveilleux. On a trouvé beaucoup de choses avec ce documentaire mais je pense qu’il reste encore pas mal de secrets. (Cécile Patingre)
Colette Lallement-Duchoze