d'Una Gunjak (Bosnie/Serbie 2023)
avec Asja Zara Lagumdžija, Nađa Spaho, Maja Izetbegovic, Mediha Musliović, Izudin Bajrović
Festival Premiers Plans Angers janvier 2024
5e édition de Cinemed, festival du cinéma méditerranéen de Montpellier du 20 au 28 octobre 2023 :
Mention spéciale Cinéastes du présent festival de Locarno
Prix d’interprétation féminine pour Asja Zara Lagumdzija au Festival du Film de Marrakech,
Synopsis: À Sarajevo, Iman une adolescente en quête de reconnaissance affirme lors d'une partie d'action ou vérité entre collégiens -,-qu'elle a eu son premier rapport sexuel. Piégée dans son propre mensonge, elle invente une grossesse et devient le centre d'une controverse qui échappe à tout contrôle
Action ou vérité ?
Deux trames narratives principales créent la dynamique interne du premier long métrage d’Una Gunjak. Un "mensonge" dont on suit la "dramatisation" : de l’étonnement à l’auto persuasion, de l’acceptation au rejet par les proches et les autorités laïques ou religieuses, de l'ostracisme à l’exclusion. Parallèlement, on suit les préparatifs d’un voyage de classe sur fond de rumeurs (17 jeunes filles enceintes suite à un voyage organisé …) ces réunions avec les parents filmées en montage parallèle seraient-elles censées illustrer une confrontation générationnelle ? . Et voici comme toile de fond, la ville de Sarajevo (de rares plans d’ensemble ou en plongée, mais des ambiances urbaines) encore marquée par les dissensions entre Serbes et Bosniens, et Bosniaques, autochtones et étrangers et un contexte socio-politique imprégné du patriarcat d’un autre âge…. Et ce sont bien les différentes étapes de la première qui, contaminant les autres, illustrent le jeu (pervers ?) "action ou vérité ?
L’actrice (aux allures androgynes, aux cheveux teints) interprète royalement l’adolescente Iman Elle est de tous les plans (seule, en groupe, en classe, en duo avec son "amie" Mediha, en famille -grand-père aveugle, mère compréhensive, frère taquin) et son regard d’azur dira le désarroi quand le « mensonge » initial (avoir eu un rapport sexuel avec Damir, au-delà des prélis) prend d’imprévisibles proportions (surtout quand elle ne dément pas l’éventualité d’une grossesse… )
Oui il y a de l’audace à mettre en exergue les absurdités d’une société hétéropatriarcale (et les effets collatéraux dont les déboires imposés à la mère sont bouleversants) Oui oser avouer en public un désir en le maquillant derrière un mensonge, s’apparente à un cri de révolte- celui d’une jeunesse bâillonnée ici (Sarajevo) ou là (d’où la portée universelle du propos) Le désir sexuel serait donc tabou ? (on ne peut s’empêcher d’opposer le How to have a sex de Molly Manning Walker (prix un certain regard 2023) film beaucoup plus convaincant en son exact contraire……
Le film s’apparente parfois à un « teen movie » mais il manque de ‘tonus » et souffre d’étirements inutiles (surtout dans la première partie où la succession de « tableaux » censés contextualiser un parcours, s’encombre de longueurs ou piétine)
Dommage car le film se donne à lire comme la radiographie d’une certaine jeunesse contrainte à se « réinventer » face à un monde adulte, marqué par des décennies de troubles (c’est un euphémisme) et par les tentatives de l’économie néolibérale ; les sanction infligées, communiquées par téléphone interposé en disent long sur l’état de « santé mentale » de la société bosnienne
Colette Lallement-Duchoze