de Pier-Philippe Chevigny (Canada 2023)
avec Ariane Castellanos Ariane, Marc-André Grondin Stéphane, Nelson Coronado Manuel Morales, Marc Beaupré L'agent d'indemnisation , Micheline Bernard Nicole , Marvin Coroy Hector
Festival international du film Saint Jean de Luz (octobre 2023) : Prix du public + grand prix + prix d’interprétation féminine
Festival du film canadien Dieppe : Prix du public
Synopsis Dans la Vallée du Richelieu, région agricole du Québec, Ariane est embauchée dans une usine en tant que traductrice. Elle se rend rapidement compte des conditions de travail déplorables imposées aux ouvriers guatémaltèques. Tiraillée, elle entreprend à ses risques et périls une résistance quotidienne pour lutter contre l’exploitation dont ils sont victimes
Pour dénoncer l’outrageuse (et pourtant légale…) exploitation des ouvriers étrangers temporaires, ici guatémaltèques, pour mettre à nu les conditions de travail inhumaines cauchemardesques, pour démonter les « rouages » d’un système (le supérieur d’Ariane la « traductrice » sait lui rappeler, aux moments les plus opportuns, que lui-même obéit aux diktats d’un patron et que la moindre petite faille aura des répercussions sur l’ensemble) le réalisateur Pier-Philippe Chevigny a choisi le format 1,4 (censé enfermer encore plus les personnages) le recours aux plans séquences ; il use (et abuse parfois) des gros plans prolongés, il privilégie les face à face (deux visages dans le même cadre, ou champ contre champ témoins d’une incompréhension réciproque, il privilégie en outre une forme de « sensationnalisme » (cf la séquence à l’hôpital son ambiance chirurgicale verdâtre le vomi rouge etc. ) . Certains choix loin de servir le propos ont tendance à l’alourdir… C’est vrai !
Mais cela est largement compensé par l’interprétation d’Ariane Castellanos -le personnage est d'ailleurs au centre de l'intrigue, de la narration, de la dramatisation-, compensé aussi par la dynamique interne qui va de l’acceptation plus ou moins complice à la prise de conscience « dissidente » :Oui Ariane en est désormais persuadée chacun malgré tous les malgré peut influer sur ce qu’il jugeait inéluctable (sans arrière-pensée démagogique) Embauchée comme traductrice elle va jouer le rôle de déléguée syndicale
Certaines scènes révèlent des accointances avec le cinéma des frères Dardenne ne serait-ce que la justesse du traitement, la « peinture » du quotidien d’ouvriers corvéables englués dans les mécanismes d’un capitalisme sauvage, mais aussi leurs espoirs (sur le petit écran de smartphone voici que s’animent les attentes d’une famille) leur solidarité, alors que la dramatisation pamphlétaire aurait des accents loachiens ( ?)
Dans le bus qui les mène à l’exploitation agricole la caméra se pose sur le visage de Manuel Morales où perle une larme ; en écho au final, un bus, les ouvriers, le visage de Manuel, une larme mais ce n’est plus le regret qu’épreint ce pleur lacrymal …
Réaliste social politique oui Dissidente est tout cela à la fois
Un film à ne pas manquer !
Colette Lallement-Duchoze