Long métrage d'animation réalisé par Joël Vaudreuil (Canada 2023)
Festival d’Animation d’Annecy 2023, catégorie contrechamp
Adam est un adolescent de 15 ans qui a l'étrange particularité d'avoir un corps qui se modifie en fonction des moqueries et des commentaires négatifs qu'il subit de son entourage. L'accumulation de ces changements physiques ne fait qu'ajouter une couche de complexité à celles déjà présentes dans sa vie.
J’ai toujours trouvé que t’avais un long tronc (la grand-mère sur son lit de mort à son petit-fils Adam)
Cruauté de tous les harceleurs (ici la grand-mère et les camarades de classe) trauma que l’on traîne avec et malgré soi, dans un corps qui se métamorphose en fonction des moqueries subies au quotidien, tel est bien le mal-être d’Adam. Mais par-delà n’est-ce pas celui de tout adolescent ? (Auquel cas, le film ne serait-il pas une parabole ? ou du moins une fable sur l’anxiété juvénile, la quête d’identité, le besoin de reconnaissance, la solitude)?
Pour réaliser ce portrait sans complaisance, le réalisateur a opté pour une animation épurée, à l’humour pince sans rire , grinçant ou noir. Et si l’ensemble était à l’image de Bouboule, le chat-tronc ? Aussi flottant -ou décalé- que bizarre !!!! (cf les déjections des chiens lancées dans les arbres) Rappelons que le père a proposé deux jobs pour l’été: Adam tondra la pelouse d’un voisin toujours torse nu et il gardera une immense maison où vit un chat sans pattes qu’il faut nourrir et caresser …
Adam sera de tous les plans - (parfois son visage apeuré envahit l’écran et une larme dit le désarroi la déception) Regardez ce corps énorme aux petits petons, ces bras immenses et frêles en cotons-tiges, un dos voûté, des mains minuscules, des tee-shirts trop courts, tétons et bedaine trop saillant.es, voyez le mollasson traverser la chaussée ou arpenter maladroit une pièce, guider en automate la tondeuse du voisin monomaniaque ou affalé dans le canapé contempler ses séries télévisées préférées…
Le graphisme est anguleux, le trait de crayon sobre et sûr, les couleurs en aplats pastel -vert pâle jaune, gris clair, bleu céruléen, dont la fadeur est censée reproduire celle d’une banlieue québécoise ( ?)…parfois un rouge flamboyant - mannequin qui , hors du magazine, s’anime avec volupté dans les fantasmes d’Adam, rouge bordeaux des lèvres charnues de Jeanne, l’aimée…Un noir de circonstance lors de l’enterrement de la grand-mère. Graphisme épuré des décors (intérieurs minimalistes, rectilignes) et parallèlement enlaidissement des « gueules » caricaturées (hormis la rondeur du visage d’Adam en écho à sa bosse ? rondeur et bienveillance ?).
Des qualités techniques indéniables au service d’une narration efficace, sans manichéisme : Adam souffre-douleur lymphatique, se réveille à un moment de sa torpeur…. et de ses bras tentacules met KO ses assaillants ; fantasme et réalité! fantasme et parodie des films dont il se délecte!
Il y a certes des répétitions, des temps morts, des étirements inutiles - ce qu’accentue d'ailleurs la simplicité du style graphique.
Mais ne serait--ce pas inscrit dans la « lenteur » de la quête ?? je ne sais ...
Colette Lallement-Duchoze