de Thea Sharrock (2023 G-B)
avec Olivia Colman, Jessie Buckley, Anjana Vasan
Littlehampton, 1920. Lorsque Edith Swan commence à recevoir des lettres anonymes truffées d'injures, Rose Gooding, sa voisine irlandaise à l’esprit libre et au langage fleuri, est rapidement accusée des crimes. Toute la petite ville, concernée par cette affaire, s’en mêle. L'officière de police Gladys Moss, rapidement suivie par les femmes de la ville, mène alors sa propre enquête : elles soupçonnent que quelque chose cloche et que Rose pourrait ne pas être la véritable coupable, victime des mœurs abusives de son époque
Comédie légère et grinçante, oui ; délurée, non ; car les salacités, les grossièretés, écrites par un « corbeau » si elles amusent au début -(d’autant plus qu’elles choquent tous ceux qui sont étriqués corsetés dans les principes de la bien-pensance et les préceptes de la religion)- perdent leur mordant irrévérencieux à force de répétitions. Dont acte.
L’intérêt de cette comédie ? Il est à chercher moins dans l’enquête et ses « faux » rebondissements que dans l’interprétation des deux actrices ; Olivia Colman en vieille fille bigote hypocrite et Jessie Buckley en Irlandaise libre gouailleuse. Edith et Rose. Deux voisines qui partagent -leurs maisons sont mitoyennes- bassine à linge et toilettes ; un mur très mince les sépare (absence d’insonorisation…) ; elles furent amies (cf le premier tiers du film et la « confession » d’Edith) mais un autre « mur » s’est dressé…
Nous sommes en 1920, perdurent les souvenirs traumatisants de la guerre.
C’est surtout le triomphe du machisme, d’un obscène patriarcat . Si le père d'Edith règne en dictateur éhonté sur son foyer, l’officière de police futée Gladys Moss (excellente Anjana Vasan) cherche à s'affranchir du joug de ses collègues autoritaires imbus de leur pouvoir de…mâles…) et c’est bien grâce à un élan de sororité qu’adviendra la vérité…La coalition des "suffragettes" renvoie à un autre combat (même s’il est traité avec désinvolture). .A cela s’ajoutent des relents de racisme, à l’encontre de l’Irlandaise qui élève seule sa fille, qui préfère les pubs à la grand-messe, qui affiche assume ses choix de vie Racisme et schisme ??
Lttlehampton? Voici un décor central, telle une scène de théâtre -avec entrées et sorties des « acteurs » (rares escapades vers le littoral); les couleurs -jaune orangé, tons clairs- sont censées dispenser une certaine chaleur humaine alors que les intérieurs (maison d’Edith) par contraste sont plus froids mais en harmonie avec l’austérité des personnages qui les habitent
Plans conçus telles des vignettes de BD, caricatures, rythme souvent rapide, contrastes, minauderies et rictus en gros plans, comique de mots, de situation et de caractère, oui tout cela s’inscrit dans le genre de la comédie
Mais il manque un "je ne sais quoi" -et simultanément il y a un trop plein (redondances redites étirements inutiles)-, autant d'entraves à une franche adhésion
Colette Lallement-Duchoze