7 février 2024 3 07 /02 /février /2024 11:28

de Todd Haynes (USA 2023)

 

avec Julianne Moore, Natalie Portman, Charles Melton

 

Festival Cannes 2023 Compétition officielle

Pour préparer son nouveau rôle, une actrice célèbre vient rencontrer celle qu’elle va incarner à l’écran, dont la vie sentimentale a enflammé la presse à scandale et passionné le pays 20 ans plus tôt.

May December

Du fait divers dont s’inspire le film (et dont rend compte l’expression anglo-saxonne may december qui surligne une différence d’âge dans une relation), le réalisateur analysera (de façon quasi clinique) le retentissement perturbateur sur les êtres concernés (20 ans après…) retentissement dont chaque « étape » est scandée par le thème musical revisité par Marcelo Zarvos «  le pays étranger qu’est le passé  (composé par Michel Legrand pour le film de Losey le messager 1971)

 

Dès le début, l’entrée dans le cadre et le film d’une actrice (Elizabeth/Natalie Portman) -elle vient « interroger » le couple pour son futur rôle, est sujette à caution : en pénétrant dans la maison (soit l’intimité) elle apporte le colis déposé sur le seuil (message– dont le contenu (ne pas spoiler) malgré le déni, sera censé épouser les excavations d’un passé sordide ; et simultanément se devinerait la véritable motivation d’Elisabeth ? transformer en « ordure » le passé revisité du couple …Ce que confirmeraient ses aveux lors de la « conférence » avec les élèves dont la fille de Gracie « j’aime les parties sombres de l’individu » : et partant mutatis mutandis les zones grises de Médée seront celles du film, celles plus ou moins infligées au spectateur car ce dernier doit être à la fois dans le présent et dans un passé aux traces indélébiles (latente jusque-là, la révolte de Joe « jeune » mari et père va éclater !)

 

Et quasiment tout le film -qui est un film sur un film en préparation-, joue sur les mises en abyme, les effets de miroir : ceux du cadre (avec reflets dupliqués ad libitum) ; ceux des deux visages en frontal (on devine l’imminence d’une « fusion » par superposition comme dans Persona de Bergman ?) les échos (le mari échange en cachette avec une « inconnue » par sms, Elizabeth lit une lettre destinée à…) Le jeune époux élève des papillons et on assiste (très gros plan) à l’émergence de l’insecte (de la chrysalide à l’imago) -nouvelle mise en abyme ou simple métaphore- ; en rendant la liberté au papillon monarque, Joe n’avoue-t-il pas que cet épanouissement lui a été refusé (?) de même il « contemple » à travers son fils, une jeunesse qu’on lui aurait ravie ? (Rôle de la femme matriarche ? ) Le thème de la « vampirisation » sera décliné par la multitude des regards (ceux de la presse dont on affiche certains extraits, ceux de l’actrice qui fouine les secrets, afin de se nourrir du malheur des autres)

 

Un film aux plans souvent raffinés, au contraste constant entre la luxuriance ensoleillée de l’extérieur et le trouble feutré des émois, entre le venin insidieux et la quête de « résilience » (?) un film porté par la prestation talentueuse de Julianne Moore et le jeu délibérément artificiel de Natalie Portman (n’exister que par le regard d’autrui se complaire dans le reflet de soi cf. le dernier tableau )

Mais un film qui par ses ambiguïtés peut laisser pantois

Et qui par la redondance des effets miroirs, par ses clichés à manipuler et à décoder  peut lasser ! 

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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