30 janvier 2024 2 30 /01 /janvier /2024 06:27

Documentaire réalisé par Antoine Boutet (2023)

Réalisation image montage: Antoine Boutet

Musique originale : Ernest Saint-Laurent

Brazza est un quartier de la rive droite de Bordeaux, nommé d'après un commissaire-général du gouvernement français en Afrique centrale. Cette zone en friche vit ses dernières heures. 53 hectares à bâtir pour un vaste projet immobilier dans l'air du temps. Chronique d'un terrain vague en transformation, le documentaire scrute l'annonce d'un nouvel "art de vivre" dans la réalité brute du terrain.

Ici Brazza

Tracé assez lent d’une ligne blanche qui délimite des contours sur un plan, avant qu’un couple de retraités n’apparaisse à l’écran, (c’est le prologue)  ce couple  « commente » se rappelle -bien que  le mari complètement déboussolé ne reconnaisse  plus rien.. hormis que  l'Ici (la rive droite de la Garonne opposée à la rive gauche)  n’était que   saloperie, les charbonnages, les acides 

En écho au final tracé d’une ligne blanche avant de sertir le générique de fin

Entre les deux nous aurons assisté à un vaste chantier, - gestation et naissance d’un quartier sur d’immenses friches industrielles -le plan originel comme palimpseste ? Chantier dont rien n’est dit sur les enjeux politiques ou urbanistiques mais dont les slogans publicitaires (lettres agrandies parfois démesurément sur les panneaux) promettent un nouvel art de vivre. Le réalisateur est revenu à maintes reprises sur les lieux, a filmé les mêmes endroits à des instants différents de leur métamorphose (une matière boueuse qui vibre encore de la stridence de ses habitants les insectes, avant les excavations par exemple)

 

Dans cet univers comme déserté par l’humain, nous entendrons à un moment la voix de trois SDF conscients de leur départ imminent et forcé ; nous verrons un camp de gens du voyage voler en éclats -avec des gros plans sur des détails à valeur métonymique témoins d’une vie à jamais disparue.

Mais l’essentiel est dans le non-dit, dans ce qui entremêle deux temporalités (dont le sol était , reste  et restera le dépositaire, avec ses couches du passé et ses fondations du futur) 

Performante et originale sera la façon de filmer. Le réalisateur avoue s’être mis « comme à la périphérie, s’intéressant à l’enveloppe ; aborder comme un spectacle, un théâtre ». Parfois il filme  au ralenti (comme si le spectateur était aux côtés d’un grutier imaginaire découvrant tout un univers à 180 degrés alors que la bande son le plonge dans des profondeurs telluriques ; il superpose  décors cartons et blocs réels de béton, graphismes délicats et grues graciles à l’assaut de l’espace, personnages factices figés dans les panneaux publicitaires et personnages réels -en marche vers ?. Sans oublier cette superposition des significations (à la Tati ?) quand on essuie littéralement les plâtres par exemple,  quand dans ce concert du moderne, un couac retentit (grincement de volets roulants)

Antoine Boutet un cinéaste, archéologue du … présent ? 

Un documentaire à  ne pas rater !

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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commentaires

B
Merci pour la découverte je ne connaissais pas du tout
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