De Jean-Baptiste Durand (2023)
Avec Anthony Bajon : Dog, Raphaël Quenard : Mirales, Galatéa Bellugi : Elsa, Dominique Reymond : Christiane, la mère de Mirales, Bernard Blancan : Bernard, Nathan Le Graciet : Paco , Mélanie Martinez : Charlotte, Mike Reilles : Dimitri, Mathieu Amilien : Enzo , Evelina Pitti : Madame Dufour , Kader Bouallaga : Ali , Marysole Fertard : Sonia, la copine de Dimitri
Festival Premiers Plans d'Angers 2023 : Prix du public
Festival La Ciotat Berceau du cinéma 2023 : Lumière d'or et double prix d'interprétation masculine pour Raphaël Quenard et Anthony Bajon
Festival de Cabourg 2023 : Swann d'or du meilleur premier film et Swann d'or de la révélation masculine pour Raphaël Quenard
Prix Pierre Chevalier 2023 pour le réalisateur Jean-Baptiste Durand et la productrice Anaïs Bertrand
Dog, le taiseux, et Mirales, le flamboyant, sont deux amis de longue date âgés d'une vingtaine d'années. Ils passent la plupart de leur temps ensemble et font les quatre cents coups dans leur village du sud de la France. Ils ne se cachent rien, leur amitié semblant plus forte que tout. Jusqu'au jour où Elsa s'installe dans le bourg le temps de l'été. La jeune fille tombe très vite sous le charme de Dog. Le jeune homme passe de plus en plus de temps avec elle, ce qui a pour conséquence de faire vaciller son amitié avec Mirales. Ce dernier éprouve de la jalousie et ne supporte pas d'être le témoin de cette histoire d'amour...
Dans le groupe de désœuvrés qui s’adonnent à des (petits) trafics, se détache le duo. Dog et Mirales. Leur relation? à la fois dyadique et hiérarchique dont Dog est le subordonné (et le jeu tout en retenue d’Anthony Bajon est exemplaire ) Raphaël Quenard qui interprète Mirales a cette audace qui lui sied, de proférer maximes et aphorismes, de citer Montaigne dans un langage soutenu avec la mélodie de la rue (on a beau savoir que le « chien de la casse » désigne en argot un « être vindicatif ou agressif dont les fins justifient les moyens employés on ne peut qu’être séduit par une étonnante singularité, un phrasé et une faconde quasi naturel.les.
De plus quand l’acteur est filmé arpentant les ruelles de ce petit village, son dos envahit l’écran; de même pour les gros plans sur son visage. Donneur d’ordres (à Dog son pote, et à Malabar son chien) lui qui se plaît à humilier publiquement, lui qui ne tolère pas la désobéissance, sait manifester de la tendresse (cf la relation avec la mère dans une surprenante inversion des rôles et cette attention portée à cet homme attendant le gain messianique du jeu d’argent alors qu’à chaque mise il se trompe de signe astrologique….) Et si cette carapace de "dominateur" maquillait une détresse intérieure?
Elsa est la seule à lui tenir tête, à passer outre ses diatribes, faire fi de son venin ! A partir de là s’estomperaient semonces et remontrances ? quand le réalisateur semble faire la part belle à une relation amoureuse hétérosexuelle? Mais la dynamique interne, rapport de force, n’en sera pas ébranlée ….Et au plus fort du désarroi, de profundis de la tempête, Dog sollicite l’aide de son ….Ami !! Cet ami qui lui veut du bien....
Le village est à lui seul un personnage. Filmé en un beau frontal éclairé de lumières vespérales (plan d’ouverture) en contre plongée avec ses couleurs ocres ou encore en légère plongée sur les toits (et leurs tuiles bicolores typiques du sud) ; nous pénétrons dans ses "entrailles" avec son labyrinthe de ruelles, son banc public, son PMU, avant qu’il ne s’inscrive dans une vue d’ensemble plus large sur le paysage environnant de la garrigue (somptuosité de la vastitude, de la palette de couleurs, des panoramiques) Un plan sur un ciel ennuagé, annonciateur d’un drame intérieur ? …
Quand la petite place sur le promontoire des rencontres devient un point de chute
Un premier long métrage tout en nuances et comme épuré, à ne pas rater!
A voir, (ou revoir) dans le cadre "Le Festival Cinéma Télérama" (Omnia samedi 13h30, lundi 20h, mardi 18h)
Colette Lallement-Duchoze