d'Amat Escalante (Mexique 2023)
avec : Juan Daniel García Treviño (Emiliano), Ester Expósito (Mónica Aldama), Bárbara Mori (Carmen Aldama)...
Présenté à Cannes 2023 section Cannes Première
Dans une petite ville du Mexique, Emiliano recherche les responsables de la disparition de sa mère. Activiste écologiste, elle s'opposait à l'industrie minière locale. Sans aucune aide de la police ou du système judiciaire, ses recherches le mènent à la riche famille Aldama.
Quel changement notoire dans le traitement de la violence. Elle n’est plus frontale, d’une crudité parfois insupportable (cf . Heli - Le blog de cinexpressions) ; elle n’en est pas moins suggérée, diffuse et ce, dès les premières scènes, les « préludes ». Un plan large presque panoramique ouvre le film (étrangeté des éléments qui composent ce « paysage » extérieur) ; se succèdent des plans sur le "paysage intérieur" d’une maison luxueuse abandonnée ; avec "coupes à l’écran rouge", telle une giclée sanglante (cf Los Bastardos), Sur un mur, l’affiche du film de Zulawski, Possession : un indice ? un clin d’œil à La région sauvage ?. (La région sauvage - Le blog de cinexpressions ) Violence abstraite !! Puis nous assistons à un affrontement assez houleux entre locaux et officiels à propos de l’implantation d’une mine, en présence d'une police complice qui tue sans vergogne ; une femme activiste écolo s’oppose à ce projet…elle sera suivie, kidnappée, tabassée, rayée de l’H(h)istoire. Violence politique !! Et ultime incipit, voici Emiliano le fils de la "disparue" Après une ellipse temporelle de 3 ans, il entreprend les recherches. Embauché avec sa petite amie chez les Aldama (lieu de la disparition comme indiqué par le capitaine sur son lit de mort). Après ces prologues -qui contiennent telle une mise en abyme les thématiques chères au cinéaste -le film va mêler enquête, corruption et lutte de classes, entraînant son public dans un thriller nocturne où s’imposent, malgré le brouillage des « pistes » et de la lumière (cf le titre « perdus dans la nuit »), le pamphlet (contre le Mexique corrompu) et la satire (milieu de l’art et de « l’influence »). …
Dans ce nouvel opus, le réalisateur s’attache plus aux « personnages » qu’il ne le faisait auparavant ! même s’ils incarnent des milieux « sociaux » avec cette répartition : aux humbles, la lucidité, aux nantis corsetés dans leur outrecuidance, les dévoilements de leurs folies et frustrations. Voici le couple bourgeois espagnol (relents du colonialisme ?) Lui, artiste poursuivi par une secte car il a utilisé le cadavre du gourou pédophile pour son « œuvre » , elle, pop star, et Monica -née d’une première liaison- influenceuse connue sur Instagram génération Z. Leur maison ? un décor construit pour un an dans l’esprit de l’expressionnisme allemand (à la Fassbinder).
Un « prolétaire » s’immisce dans leur quotidien ? La famille va voler en éclat. La comparaison avec Théorème est « tentante » mais s'arrête là !! Emiliano est présenté surtout comme un justicier sympathique et un amant ….fidèle ! Or, par des jeux de renversement, il sera tour à tour, le « loup » et la « proie », chasseur et dupe, chat et souris (ce dont témoignent les traques et les courses effrénées). L’eau ? une thématique majeure : le lac lieu de l’enfouissement salvateur -quand Emiliano échappe à ses poursuivants- ou de la perte définitive ….
Ô secrets immémoriels !
Un film à voir !! c’est une évidence !
(à l’affiche depuis mercredi 4 octobre mais à des horaires….contraignants ! )
Colette Lallement-Duchoze