documentaire réalisé par Wim Wenders (Allemagne 2023)
avec Anselm Kiefer (Lui-même) Daniel Kiefer (Anselm Kiefer, jeune) Anton Wenders (Anselm Kiefer, enfant) Ingeborg Bachmann Elle-même (Images d'archives) Joseph Beuys Lui-même (Images d'archives) Paul Celan Lui-même (Images d'archives)
présenté au festival de Cannes 2023 Séance spéciale
Une expérience cinématographique qui éclaire l’œuvre d’un artiste et révèle son parcours de vie, ses inspirations, son processus créatif, et sa fascination pour le mythe et l’histoire. Le passé et le présent s’entrelacent pour brouiller la frontière entre film et peinture, permettant de s’immerger complétement dans le monde de l’un des plus grands artistes contemporains, Anselm Kiefer...
Par un effet de circularité les sculptures de ces femmes/robes (mariées, martyres, fantômes) dans des lieux naturels ou insolites nous accompagnent dans notre immersion, et le mouvement de va-et-vient constant entre l’enfance (Anselm Kiefer enfant interprété par Anton Wenders) et l’âge adulte se superpose au mouvement tourbillonnant de la caméra qui capte l’immobilité muette , jusqu’à cette conclusion proférée par Kiefer lui-même « l’enfance commencement du monde » Filmé de dos, il porte sur ses épaules l’enfant qu’il fut, face à un plan d’eau qu’éclaire une lumière aurorale (ou crépusculaire ?)
Anselm Kiefer s’est toujours intéressé à la « position du regardeur » « je ne veux pas que l’on passe devant les tableaux je veux que l’on y entre » et de fait avec Wim Wenders nous plongeons dans les entrailles d’une œuvre (des encarts nous informent sur les différents lieux et ateliers, en Allemagne ou en France, à Barjac La Ribaute, à Croissy) comme nous plongeons simultanément dans les entrailles de l’histoire du monde (cf les images d’archives) De même que l’artiste explore l’intérieur de la terre (cf les métaphores des galeries et tunnels) de même le cinéaste nous immerge dans le « rêve » d’intériorité que la matérialité même de l’œuvre « extériorise » (hélas il manque l’équipement 3D pour l’apprécier pleinement)
Si les deux "œuvres" (peinture cinéma) s’interpénètrent en une osmose qui peut se révéler parfois grandiloquente, c'est que les deux artistes se complètent : la peinture de l’un, exaltée par le talent de l'autre , se prêtera aux abondantes mises en abyme .
Le film n’est-il pas autant un hommage à l’œuvre d’Anselm Kiefer qu’à celle du cinéaste ?
Colette Lallement-Duchoze
NB La lenteur presque hypnotique a pu décontenancer certains spectateurs ….(bercement - ensommeillement)