de Soudade Kaadan (Syrie, Royaume-Uni, France, 2022),
avec Hala Zein, Kinda Alloush, Samer al-Masri, Nizar Alani, Darina al-Joundi
Festival de Venise 2022, Orizzonti, Prix du public Armani beauty
Festival MedFilm de Rome 2023, Prix Amnesty International
Festival de Cannes 2023, Ecrans Juniors
Au cœur du conflit syrien, Zeina, 14 ans, et ses parents sont parmi les derniers à encore vivre dans leur quartier assiégé de Damas. Lorsqu'un missile fait un trou béant dans leur maison, Zeina découvre une fenêtre qui ouvre sur un monde de possibilités inimaginables. Elle aime dormir à la belle étoile et se lie d'amitié avec Amer, un voisin de son âge. Quand la violence des combats s’intensifie, Zeina et ses parents sont poussés à partir, mais son père est déterminé à rester dans leur maison. Il refuse d'être un réfugié. Confrontées à un dilemme de vie ou de mort, Zeina et sa mère doivent prendre une décision
Partir quitter son pays en guerre et devenir un réfugié ou rester au cœur même du désastre , accepter de mourir chez soi ? c’est le dilemme qui oppose la mère (Hala /Kinda Alloush) et le père (Motaz /Samer Al Masri) de Zeina (Hala Zein.) Cette adolescente va "contourner" le tragique de la situation (bombardements, explosion, Damas un champ de ruines, imminence de la mort) en s’évadant (par ses rêves et sa rencontre avec le jeune voisin Amer (Nizar Alani). -un technicien geek qui récupère les appareils abandonnés du quartier !!! ) Son projet? réaliser un film témoignage du siège de Damas, un film où personne ne meurt ????
Il y a de la dérision dans l’acharnement du père qui " colmate" avec les draps toutes les ouvertures (surtout ne pas laisser un œil intrus percer l’intimité) ou dans son déni du réel (On rit jaune) Tout comme il y a de la poésie dans cette ouverture cette béance au plafond qui ouvre pour Zeina les portes de la transfiguration, contrastant d’ailleurs avec l’enfermement quand la caméra filme les personnages au plus près en les enserrant dans le huis clos.
Un récit ancré dans un " factuel" (toute puissance du mâle, dont se libérera l’épouse, désolation d’une ville éventrée, et les travellings, les panoramiques sur les façades et les amoncellements de gravats ainsi que les vues en plongée en restituent le douloureux tragique) mais un récit qui fait la part belle au "merveilleux" : à partir d’une immense déchirure voici que s’impose un firmament étoilé, à partir d’une corde tendue voici que s’ouvre un univers de légendes.
Nezouh ! ce mot arabe signifie déplacement. Soudade Kaadan en propose diverses acceptions sous forme d’une allégorie ; en déclinant la thématique omniprésente de la déchirure, en transcendant le tragique de la guerre par la poésie- sans occulter, bien évidemment, l’âpre réalité (sociétale et politique)
Certes non sans maladresses (jeu un peu appuyé des trois acteurs qui par moments donnent l’impression d’être maladroits dans l’appropriation de l’espace, des longueurs, trop plein de naïveté)
Mais on retiendra cette explosion filmée au ralenti qui mêle habilement mirage et chorégraphie, les reliques tels les cailloux du petit Poucet dont Hela parsème son chemin (une fuite faussement émancipatrice ? ), les cailloux lancés par Zeina depuis le toit et qui, en apesanteur, font des ricochets dans le ciel !!!
A voir
Colette Lallement-Duchoze