De Jan Gassman (Suisse 2022)
avec Valentina Di Pace, Dominik Fellman, Danny Exnar
Musique Michelle Gurevich
Image Yunus Roy Imer
Acid Cannes 2022
Zurich Film Festival 2022
Bigna, une scientifique de 28 ans, contrôle toute son existence - y compris sa vie sexuelle, énigmatique. Frank, 33 ans, cherche quant à lui un sens à la sienne en se nourrissant de l'affection des autres et en plongeant dans l'obscurité des paradis artificiels. Leurs deux trajectoires contradictoires se rencontrent et se lient l'une à l'autre, jusqu'à l'obsession d'un amour fou.
Voici des images du tsunami 2011 qui défilent sur l’écran d’un PC. C’est le prologue. Zoom sur une voiture contrainte de faire demi-tour face à l’impétuosité des flots. Nous sommes aux côtés de Bigna (Valentina Di Pace) jeune scientifique sismologue BCBG. Nous la retrouvons au volant de sa voiture. Dans un parking souterrain, elle change de « look » Un homme masqué frappe violemment à la vitre; s’ensuit une bagarre; Bigna plaque l’individu au sol et ….surprise !! …elle coince le visage de l’inconnu entre ses cuisses, c’est le prélude à la jouissance par cunnilingus !
Les faits auraient dû s’arrêter là, car Bigna instigatrice de ces jeux de sexe savamment orchestrés, ne doit en aucun cas revoir son partenaire. Mais Frank, (Dominik Fellmann) – qui travaille dans une boîte de nuit post-futuriste où tout le monde porte des casques pour écouter la musique, et où la putridité n’a pas sa place, est -presque anormalement- mû par cette irrépressible envie de revoir sa partenaire…
Deux êtres si dissemblables (milieu social, mode de vie, conception de l’existence) mais inexorablement attirés ….
A partir de là Jean Gassmann va explorer ce que le prologue était censé encoder: le phénomène « amoureux » s’il s’apparente à un « choc », si deux êtres si différents sont comme des plaques tectoniques qui entrent en collision, l’impact -intensité spasmodique du désir, serait incontrôlable (à la différence des phénomènes naturels que l’on pourrait « observer mesurer anticiper »)
Le choc amoureux ou le pouvoir anarchiste dans une société fortement marquée par les principes économiques, précise le cinéaste dans les « notes d’intention »
Une relation qu’il structure en 6 chapitres, scandée par le passage des « lunes », -soit une durée de 8 ans-, une relation où les scènes d’amour torride sont filmées en frontal, où alternent ambiances nocturnes des paradis artificiels et séquences dans un paysage comme inviolé. Une relation où sont abordés des problèmes concrets :la jouissance sans pénétration, l’usure du couple, la maternité, la différence entre sexe et amour!
On fusionne on se sépare on se fuit on se retrouve ; et à chaque fois -quels que soient les lieux et les moments - ce sera la déflagration (là encore l’image du séisme est éloquente) Inséparables même dans la séparation?
Bigna et Frank ont en commun : la recherche d’une forme d’absolu ce quelque chose d’unique et d’indicible qui va au-delà des formes traditionnelles du "couple"; cette recherche serait-elle frappée d'inanité? (seule Bigna après bifurcations et détours ne succombera pas au conformisme ambiant ) et le "tremblement" final n'est plus celui de la chair, mais celui de la terre en Suisse ; la construction circulaire n'est pas anodine !!!
Une démarche qui se veut originale mais le ‘ "chassé-croisé" assez répétitif, les ellipses l’absence délibérée de psychologie, (l’essentiel appréhendé dans l’instantanéité est consacré aux déflagrations charnelles ) l’absence de contextualisation et bien d’autres choses, tout cela fait que malgré la "peinture" d'une torride attraction, on reste trop souvent extérieur à la gravitation erratique de ces "corps .....célestes?".
Dommage!
Colette Lallement-Duchoze