22 avril 2023 6 22 /04 /avril /2023 07:30

URSS, 1938. Staline purge ses propres rangs. Les hommes du NKVD qui mettent en œuvre la répression sont eux-mêmes arrêtés et exécutés. Capitaine zélé du NKVD, Volkonogov se sait parmi les condamnés et s’échappe. Dans sa fuite, il va chercher à expier ses fautes en recueillant le pardon des familles de ses victimes...

Le capitaine Volkonogov s'est échappé

C’est la « grande Terreur » : des centaines de milliers de personnes sont condamnées sur la foi d’accusations arbitraires, d’aveux extorqués sous la torture, et ce même dans les rangs staliniens. Le capitaine Volkonogov qui a vu le commandant Gvozdev se jeter par la fenêtre sait qu’il risque d'être convoqué pour « réévaluation ». Il s’enfuit de ce bâtiment qui abrite le NKVD. Mais que fuit-il réellement ?

 

Le film épouse le rythme de la course du capitaine, un capitaine traqué par son supérieur et ses propres fantômes, un capitaine à la recherche d’un hypothétique pardon ! (et l’acteur Yuriy Borisov, que nous avions vu dans Compartiment n°6 incarne avec brio la folie dévastatrice du  personnage). Le présent de cette double traque se mêle à un passé plus ou moins proche que restituent de nombreux flash-back. Et nous voici plongés dans un univers qui, à s’y méprendre serait celui d’une dystopie…-, où  la décrépitude, la saleté et la vétusté   - bâtisses, appartements communautaires, caves - sont  la métonymie de la déshumanisation, de l’agonie programmée ! L’ère nouvelle qu’impose Staline est illustrée, pour ne pas dire symbolisée, par ce « zeppelin » 1938. Or cet immense objet oblong que l’on regardera (fasciné ?) de la fenêtre en contre-plongée ne concourt-il pas à   faire peser sur chaque Russe la sensation d'être surveillé'Suicides exécutions (une seule balle dans la nuque permet d’économiser le temps et les munitions…) délation à tous les étages, triomphe de la mort et de l’arbitraire ! C’est la paranoïa du dictateur, épaulé par le NKVD! Ses membres? dès la scène d'ouverture l'accent est mis sur la culture du corps; des jeunes athlètes au crâne rasé jouent au volley dans une immense salle lambrissée puis Volkonogov et son pote Verretennikov s'adonnent à une "lutte" entre "chiens". Jeunesse insouciante? la suite démentira  cette première impression.!!!

 

Convaincu (après une vision) que le « pardon » (d’au moins une personne) lui ouvrira les portes du Paradis,  le capitaine Volkonogov s’acharne à le quémander auprès de familles dont il a exécuté iniquement, cyniquement, sournoisement, sadiquement un des membres (les flash-back qui le « montrent » à l’œuvre insistent -et c’est souvent à la limite du supportable- sur les corps meurtris torturés désarticulés dégoulinant de pleurs et de sang). 5 personnes consultées,  une démarche  identique : rappel de la formule méthodes spécifiques,  annonce de l’exécution  que jusque-là les autorités avaient maquillée, et demande insistante du pardon ; « va te faire enculer » ce sera la première réponse. Cuisant  échec avec les quatre autres   (ici les co-réalisateurs en "variant"  à la fois  les contextes et les réactions, ont élargi la vision de Leningrad, et rendu palpables la peur  et l'assujettissement  à la doxa!) 

Mais au final, voici, inattendue une séquence où la lenteur des gestes, où les mains de l’agonisante telles celles de dieu, où la toilette mortuaire et l’étreinte souriante dans la mort, accordent au « fuyard » une forme de réconciliation à défaut du paradis ( ??)

."peu importe que j'y croie ou non, ce qu'il y a ... c'est que je sais que je n'y ai pas droit".

 

Certes le film souffre de quelques longueurs, de redites, et d’une insistance (parfois complaisante) sur le sordide mais ces quelques bémols ne sauraient entacher les qualités de ce film audacieux et….engagé !

 

 

Colette Lallement-Duchoze

 

Le capitaine Volkonogov s'est échappé

Partager cet article
Repost0

commentaires

Mode d'emploi

Ce blog est destiné à collecter nos ressentis de spectateurs, à partager nos impressions sur les films (surtout ceux classés Art et Essai).

Envoyez vos articles ou vos réactions à: artessai-rouen@orange.fr.

Retrouvez aussi Cinexpressions sur Facebook

 

 

Recherche