15 avril 2023 6 15 /04 /avril /2023 05:46

de Joanna Hogg  (G-B, USA 2022)

 

avec Tilda SwintonJoseph MydellCarly-Sophia DaviesZinnia Davies-CookeAugust JoshiAlfie Sankey-Green

 

Sélection Mostra Venise 2022

De retour dans un hôtel désormais hanté par son passé mystérieux, une artiste et sa mère âgée confrontent des secrets enfouis depuis longtemps dans leur ancienne maison familiale.

Eternal daughter

Ce film vaut surtout pour l’interprétation de Tilda Swinton qui incarne à  la fois Julie, la fille,  et Rosalind, la mère

Voici un manoir  style géorgien, hôtel quasi désert, avec sa cage d’escalier (voir l’affiche)  et ses couloirs claustrophobes, un parc aux arbres séculaires, enveloppé de brumes, brouillards fantasmatiques, une atmosphère qui renvoie aux films « gothiques » -ce qu’accentuent les sinistres grincements qui percent l’obscurité, la visite de formes spectrales et la musique   . Tout cela est bien convenu  !!!

Convenues, les références à Hitchcock (l’arrivée dans l’immense allée et la furtive lumière émanant d’une fenêtre renvoient à Rebecca, le retour à Manderley -roman de Daphné du Maurier- et  la plongée dans le passé (Julie/Rosalind) ; ou celle à Orson Welles (le nom de la chambre Rosebud rappelle le dernier mot prononcé par l'acteur dans Citizen Kane ) Il en va de même pour la démarche : on arpente les couloirs comme on arpente les coulisses du passé, guidé que l’on est par des "sons" bizarres qui s’en viennent heurter, voire percuter,  la conscience ; on fait ses  "rondes"  de nuit comme on ferait celles de la "mémoire" Idem pour la thématique : deuil, relations mère/fille -Julie animée du seul désir de "comprendre" sa mère, de mettre en pleine lumière les incidences inévitables sur sa propre identité de fille, ne parvient pas à démêler l’écheveau -inextricable par définition- d’un passé qui lui échappe(ra) même s’il est ponctué de "révélations". Comme les deux "personnages" ne sont jamais filmés "ensemble"  dans le même cadre (en lieu et place d’une présence simultanée voici des champs et contre-champs) interpréter le final comme un « twist » est frappé d’inanité !

La mort, et partant le  deuil,  est omniprésente dans ce film. Et la quête de Julie en sera précisément l’acceptation (vécue comme une « délivrance »). Cheminement douloureux dont rend compte (entre autres)  cette séquence où ses appels effarés (elle est à la recherche de son chien Louis) se confondent (dans son esprit ?) avec les croassements des corbeaux ou les glapissements des renards ; une confusion (le chien était en fait immobile à l’intérieur) comme reflet de sa  "sensibilité maladive" , ou miroir des quiproquos répétés ? (le mélange des rêves des souvenirs et de la réalité).

Le huis clos du château, de la chambre (partagée avec le « fantôme » de la mère que l’on veut ressusciter) le calme séraphique  du gardien et les différents rôles de la réceptionniste ne renvoient-ils pas tels des effets spéculaires (renforcés d’ailleurs par la présence systématique de miroirs ou de vitres)  à la « complexité » du personnage de Julie, au jeu caméléon de Tilda Swinton, -dont celui de la gémellité (illustrée dès le début par les deux peluches offertes à Rosalind) ?

On retiendra le plan sur le serrement  des mains  qui scelle le passage vers la mort ; c’est le seul plan de la simultanéité (partielle), c’est aussi d’un point de vue narratif et dramatique la pérennité d’un souvenir tangible, et n’est-on pas en droit de l’interpréter comme la mise en abyme d’un film qui a fait cohabiter les vivants et les morts ?

 

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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